James Leonard Plimpton (Etats-Unis) – le père du patin à roulettes traditionnel

Par | Publié le 19 décembre 2017 | Mis à jour le 9 février 2024 | Catégories : Toutes | Sous-catégories : Histoire du roller | 11732
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James Leonard Plimpton est sans doute l’inventeur qui a connu le plus grand succès et la plus grande richesse grâce à ses patins à essieux. Il a apporté de nombreuses innovations à nos très chers quads et les a popularisés à travers le Monde…

Portrait de James Leonard Plimpton

Biographie de James Leonard Plimpton (1828-1911)

Les patins traditionnels à essieux sont parfois appelés roller quads ou encore patins à roulettes. Des découvertes récentes laissent penser qu’ils auraient vu le jour dès 1670, soit près de deux siècles avant l’invention de James Leonard Plimpton. De même entre 1824 et 1828, le célèbre peintre Goya résida à Bordeaux et dessina lui aussi des patins à essieux, 40 ans avant Plimpton. Cependant, James Leonard Plimpton eut un rôle majeur dans leur diffusion à travers le monde. En effet, il créa les premiers trucks articulés qui facilitèrent les changements de direction. Et surtout, il industrialisa la production de ses patins et développa les lieux de pratique. Voici donc son histoire…

Les inventions d’Arlequin (vers 1670) de Jean Berain, présenté dans l’exposition « En scène ! », musée du Louvre, Paris, 2021 (©Guy Boyer).
Zilbadone avec Arlequin (vers 1670) de Jean Berain, présentées dans l’exposition « En scène ! »
Musée du Louvre, Paris, 2021 (©Guy Boyer)
Les Locos Patines de Goya à Bordeaux en 1824-1828
Les Locos Patines de Goya à Bordeaux en 1824-1828

La jeunesse de Plimpton

James Leonard Plimpton (Etats-Unis) est né à Medfield (Massachusetts, USA), le 14 avril 1828. Il passa les 16 premières années de sa vie dans une ferme. Il y démontrait déjà des talents de mécanicien. Avec ses économies, il acheta des des outils, des instruments de dessin et des livres de mécanique. Il se construisit un atelier dans une petite remise de la ferme de son père.

Un patin de James Leonard Plimpton de 1860
Un patin de James Leonard Plimpton de 1860

A l’âge de 16 ans, il quitta la ferme pour entrer durant un an dans un petit atelier d’usinage en tant qu’apprenti. Il accepta ensuite une meilleure place dans un plus grand atelier de Claremont, dans le New-Hampshire.

Avant d’avoir atteint ses 18 ans, il était déjà devenu contremaître. Il continua cependant ses études et ses expérimentations mécaniques.

A l’âge de 21 ans, lui et son frère ouvrirent une entreprise de construction de machines à Westfield, Massachusetts.

Plimpton déménagea ensuite à New-York pour s’occuper de la succursale de sa société sur place.

Les débuts de James Leonard Plimpton en patinage

De constitution frêle, son médecin lui conseilla de faire de l’exercice, et plus précisément du patin à glace, pour rester en forme. Convaincu que la glace artificielle était un échec en intérieur et que les patins à roulettes permettant de réaliser les mêmes courbes qu’en patinage sur glace n’existaient pas, il réfléchit alors à une solution pour forcer les patins à bien prendre les virages en fonction des envies du patineur. Ses chevilles fragiles ne lui permettaient malheureusement pas de pratiquer dans les meilleures conditions.

L’idée de départ : être plus stable latéralement sur glace

Si l’on en croit La Revue des Sports du 16 janvier 1892, Plimpton aurait rencontré M. Cook, patineur émérite sur glace, sur le lac de Central Park à New-York (Etats-Unis). Cette rencontre lui aurait donné l’idée d’inventer un patin sur lequel on peut se tenir tout de suite sans danger :

« …car il était déjà arrivé à l’âge mûr sans avoir jamais patiné. Ce patin bizarre avait quatre petites lames, deux en avant et deux en arrière ; un traineau en miniature. Ces lames restaient toujours à plat. Au moyen d’un ressort, elles convergeaient quand le patineur se penchait « en dedans », et divergeaient quand il se penchait « en dehors ». En un mot le patineur pouvait faire des dehors ou des dedans sans se mettre sur la carre. Cherchez un peu, et vous trouverez là l’origine du patin à roulettes moderne. En effet, désirant continuer son exercice, le dégel survenu, M. Plimpton fit, d’après ce modèle de patin-traineau, le patin à roulettes que vous avez tous essayés. »

Si l’invention n’a pas eu le succès escompté sur la glace, il en a été tout autrement pour sa version à roulettes.

Plimpton : du patinage sur glace au patinage à roulettes

Les premiers patins à essieux de Plimpton furent construit sur le même principe : 4 roues en buis montées sur deux essieux articulés par un ressort un caoutchouc. L’inclinaison latérale des pieds faisait converger les essieux et permettait de tourner.

Il créa sa paire de patins à roulettes en 1863 et les nomma « Rocking Skates » (littéralement « patins à bascule »). Cependant, les premiers prototypes dateraient de 1860. Plimpton eut l’idée de séparer les roues de la plateforme pour accroître la maniabilité, à l’image des boggies des trains.

La brillante idée de Plimpton : uniquement équiper les skating rinks

Proposer un véritable modèle économique aux skating rinks

Selon l’ouvrage « Rollermania » de Sam Nieswizski, les patins de Plimpton n’étaient pas vendus aux particuliers, mais exclusivement aux propriétaires de patinoires qui les louaient par la suite à leurs clients.

En outre, nous pouvons dire que Plimpton a eu de la suite dans les idées. Pour favoriser la pratique du patin dans les meilleures conditions et accroître les ventes de ses patins, James Leonard Plimpton ouvrit ou favorisa l’ouverture de nombreux « skating rinks ».

En 1863, Plimpton créa la New York Roller Skating Association. Il dessina et construisit également un skating rink à Manhattan (New-York) à côté de son magasin. Son coût avoisinait alors 100.000 $ ! Il fut ensuite nommé le Plimpton Building.

Un brevet de Plimpton déposé en 1908
Un brevet de Plimpton déposé en 1908

Puis, durant l’été 1866, l’association loua la maison de l’Atlantique à Newport (Rhode Island). James Leonard Plimpton convertit ainsi la grande salle à manger en skating rink d’été.

Plimpton cible les classes favorisées

Il fit la promotion du patin à roulettes comme activité noble et aux standards moraux élevés. Plimpton visa particulièrement la clientèle riche et distinguée.  L’inventeur de son mieux pour faire découvrir le patinage aux « classes sociales éduquées et raffinées ». Les membres du clergé, les élus, la presse et les professionnels étaient élus membres associés de l’association pour la saison. Il invita des organisations liées au patinage d’à travers tout le pays. De nombreux visiteurs étaient issus de la noblesse Européenne, des militaires décorés comme les Généraux Sherman et Anderson ou encore le juge en chef Bigelow. Tout le monde fut ravit de ce divertissement et Plimpton reçut de nombreux messages de félicitations.

Couple dansant en patin à roulettes durant la période Victorienne
Couple dansant en patin à roulettes durant la période Victorienne

Il décrivait le patinage à roulettes comme une activité commune aux hommes et aux femmes. En cela, il participe au mouvement d’émancipation des femmes qui s’amorce dans l’Angleterre Victorienne. Il permet aux jeunes couples victoriens de se rencontrer sans craindre de réprimandes et en éloignant les vélléités de chaperonnage.

Un troisième skating rink vit le jour à Londres avec le Crystal Palace en 1865. Puis, vinrent Cincinnati (1867), Louisville (1869)…

Le patinage à roulettes se répandit à travers le monde grâce à Plimpton

Son invention suscita un engouement sans précédent pour le patin à travers les Etats-Unis en 1870, puis à travers l’Europe, en commençant par l’Angleterre. Vint ensuite l’Australie. La première mode du patinage à roulettes était lancée !

Progressivement, les skating rinks délaissèrent les surfaces en asphalte qui fondaient durant l’été au profit de revêtements en lamelles de bois qui offraient une excellente surface de patinage.

washington dc roller skating rink 14th st antique engraving original 1880
Washington DC roller skating rink (1880)

Des conditions favorables au développement de la pratique

Après la Guerre Civile, les américains eurent une fièvre de remise en forme. L’invention de Plimpton rencontra alors un succès considérable. D’après Harvey Green, professeur d’histoire à l’Université de Rochester et vice-président du Strong Museum de Rochester, le succès initial du roller était également dû, en partie, à sa popularité auprès du public féminin. Le patin à roulettes aurait ouvert de nouvelles possibilités de faire la court, favorisant « un contact physique étroit, un sens du mouvement libératoire des femmes confinées dans les normes de l’époque victorienne » (article du Washington Post du 5 mai 1989).

Les skating rinks : un business florissant

En 1869, des investisseurs comme Jos. W. Wayne ne s’y trompèrent pas et ont investirent dans cette invention pour la faire fructifier. Ils attirèrent alors d’autres investisseurs et revendeurs en quête de rendement. A 4$ la paire (par lot de 25 paires), Jos. W. Wayne parlait alors d’un retour sur investissement dès le premier mois ! Il incita même des entrepreneurs à monter des skating rinks en leur précisant les caractéristiques techniques nécessaires pour les salles et leur taux de rentabilité :

Patin de Plimpton
Extrait d’un brevet déposé par James Leonard Plimpton

« The Expense of Fitting Up a Hall for Skating purposes is not necessarily large, as the main requisite is a smooth and solid floor. A room 25 by 75 feet will accomodate 50 or more skaters, and an audience of 150 to 200, an so in proportion to size. »

Des innovations successives

L’usure prématurée des roues sur les essieux constitua le seul problème posé par ce système. James Leonard Plimpton perfectionna son invention par l’ajout d’une bague en bronze à l’intérieur du trou de l’essieu. Il mit également au point un système de lubrification. Ce système, composé d’une vis sans fin, permit de limiter l’usure des roues en entraînant la graisse sur les points de friction.

Plimpton ou la guerre des brevets

Plimpton déposa de nombreux brevets tout au long de sa vie. Les deux premiers datent vraisemblablement du 6 janvier 1863 et du 26 juin 1866. Ses patins étaient si supérieurs aux autres que de nombreux imitateurs tentèrent de produire des modèles similaires. Morris Traub estimait que pas moins de 60 brevets britanniques et quatre cinq autres brevets à travers le monde ont été pris pour tenter d’égaler les patins de Plimpton. Il intenta des poursuites et il fit valoir ses droits dans une décision rendue le 28 janvier 1976. Elle obligea les contrevenants à négocier avec Plimpton. La loi jugea que les patins devaient être achetés à la compagnie de Plimpton avec une concession du droit exclusif de les utiliser dans une patinoire située dans une zone désignée.

Toute sa vie, il ne cessa de défendre son invention en faisant des procès aux copieurs en tous genres. Le plus récent que nous ayons trouvé date de 1908, trois ans avant sa mort. A partir de 1884, il rencontra une sévère concurrence de Levant Martin Richardson.

L'entrée du magasin de Plimpton
L’entrée du magasin de James Leonard Plimpton

Les skating rinks sortent de terre dans les états américains

  • Kentucky : Indianapolis, Hopkinsville, Henderson, Louisville, Madisonville, Owensboro, Paducah, Russelville
  • Tennessee : Brownsville, Chattanooga, Clarksville, Fayetteville, Murfreesboro, Menphis, Nashville, Paris
  • Georgie : Atlanta, Augusta, Athens, Albany, Brunswick, Columbus, Cartersville, Griffin, La Grange, Macon, Newman, Rome
  • Louisiane : Nouvelle-Orléans, Shreveport
  • Mississippi : Brownsboro, Eufaula, Greenville, Meridian, Natchez, Viksburg, Yazoo City
  • Texas : Galverton, Jefferson
  • Indiana : Evansville, Indianapolis, New Albany, Terre Haute

Plimpton : une fortune considérable pour l’époque

En 1867, ses patins sont présentés à l’exposition universelle en France et seront importés par la suite. Plimpton fait fortune grâce à son invention et gagna l’équivalent de 20 millions de Francs-or entre 1863 et 1876, l’équivalent d’un demi-milliard de francs en 1991 ! La période qui suivit vit l’apogée du patin à roulettes.

Patins Plimpton - Credit: Science Museum
Patins Plimpton – Crédit : Science Museum

Un chèque signé de la main de Plimpton

Un chèque signé de la main de James Leonard Plimpton
Un chèque signé de la main de James Leonard Plimpton à Henry R. Plimpton pour la somme de 2000 dollars le 10 décembre 1908

Pour aller plus loin

Notre dossier consacré à l’histoire du roller et du patin à roulettes

Anatomie d’une paire de quads / patins traditionnels

Auteur

Alexandre Chartier

''alfathor''

Alexandre est le fondateur et webmaster de rollerenligne.com depuis 2003. C'est un passionné de roller en général, tant en patin traditionnel qu'en roller en ligne. Il aime le patinage à roulettes sous tous ses aspects : histoire, économie, sociologie, évolution technologique... Aspirine et/ou café recommandés si vous abordez un de ces sujets !

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