Podcast : Vins Isaac, fabricant français de roller

Podcast : rencontre avec l'entrepreneur Vins (Vincent) Isaac, fondateur marseillais des marques françaises Famus et ALK13.

Par alfathor

Podcast : Vins Isaac, fabricant français de roller
Podcast Vincent Vins Isaac

Vins Isaac, l’un des précurseurs français du matériel de roller

L’équipe de rollerenligne.com part aujourd’hui à la rencontre d’un des pionniers des fabricants de matériel de roller en France. Il est sans doute aussi l’un des pionniers de la pratique du roller à Marseille. Vous avez probablement roulé avec le matériel d’une de ses marques sans le savoir. On pense notamment à ALK13 ou encore à Famus. Nous partons à la rencontre de Vincent « Vins » Isaac.

Podcast : rencontre avec l’entrepreneur Vins (Vincent) Isaac, fondateur marseillais des marques françaises Famus et ALK13. – télécharger le mp3

Bonjour Vins Isaac. Peux-tu te présenter ?

Salut l’équipe, enchanté, je m’appelle Vins Isaac. Je suis marseillais de naissance parisien. Pro rider à mes débuts et fabricant par la suite.

Alors comment as-tu découvert le roller Vins Isaac ? A quel moment, dans quel contexte ?

Le roller, comme tout le monde le sait, c’est un sport qui est accessible avec pas grand chose. Donc quand tu commences tes passions et un sport, ça te permet de faire un sport à pas cher tout le temps, et s’éclater, et avoir une sensation de liberté.

Donc j’ai commencé, je devais avoir 8 ou 9 ans. Je faisais du théâtre et on montait une pièce sur la place des Abbesses, en roller déjà, avec des rollers en ferraille. Et par la suite sur les coups des 11-12 ans, en 6e, j’ai commencé à faire vraiment du roller jour et nuit.

Et t’étais basé où à ce moment là ?

Sur Marseille. Et comme j’ai pu l’écouter dans l’un de vos postcasts dans une interview de Toto, c’est vrai que l’on s’est rencontrés dans un métro tous les deux. Et après on ne s’est plus quittés. Il a fait une maison à côté de chez moi.

Toto Ghali. Effectivement, on va l’aborder un petit peu en filigrane durant l’interview, notamment après sur votre partie sur les fabricants. Quelles sont les premières personnes qui t’ont mises en contact avec le roller ?

Je crois que c’était une vague qui était arrivée à une époque, dans les années 1980. C’était une vague californienne où on faisait du roller, où c’était fun, ça arrivait en France. C’était tout neuf, tout nouveau. Il y avait du nouveau matériel, des nouvelles roues qui roulaient sur le béton avec du matériel adéquat. Et de là, ça a fonctionné. Comme je te dis, c’était jour et nuit.

 » L’école, c’était roller. J’ai mangé roller, senti roller, bougé roller. C’était ma vie. C’était mon truc. C’était ma passion. »

Vins Isaac

Tu as des noms de riders de l’époque qui te reviennent Vins Isaac ?

Oui, j’ai des noms mais ça ne te dira pas grand chose. Au début du début, je vais te donner trois noms, Gérald, Tom et Jacques. Tu ne les connaîtras pas, mais oui, j’ai toute une équipe de jeunes. Après, par la suite, c’est devenu un peu plus professionnel sans l’être vraiment. Nous avons rencontré un peu plus de gens qui faisaient la même discipline que nous, à un niveau un peu plus élevé. mais il s’est passé 3 ans où j’ai fait du half-pipe, de la mini rampe. Et il y avait les championnats du monde à Munster (Allemagne). Mais je devais avoir 15 ans et demi je crois. Et je suis parti 10 jours en Allemagne. Là j’ai rencontré Tony Hawk, toute cette équipe qui était jeune à l’époque. Donc on se connait tous, que ce soit du skate, du roller, du BMX, on se connait de quand on était minots. Du coup, quand on se voit c’est toujours agréable.

Donc toute cette scène roulette, je l’ai vécue et je la vis encore.

T’as fait du skate ou du BMX toi ?

Ouais. J’ai fait un peu de skate. Tu sais quand tu fais du roller, à un moment donné tu te traînes tes guêtres sur tous les skateparks. Donc tu fais du rollo et puis t’es amené à avoir des potes skateurs. Puis, un jour, ils prennent des patins et toi tu prends le skate. Et tu rigoles, tu passes le temps.

Alors à l’époque, tu roulais avec quoi comme matos ?

A l’époque on roulait avec des Kryptonics de chez Bravo. Je l’ai su après par la suite bien évidemment. Et on roulait avec des platines Elite de la SER (Hawaii Surf). On avait du bon matos, du vrai matos quoi. C’était bien ! Bon après on a fait évoluer le truc encore bien évidemment. Mais les Krypto ont tenu peut-être 8-10 ans tu vois.

Après quand des passionnés sont arrivés dans le milieu comme moi, on a fait évoluer encore le truc. Parce qu’on était pratiquant et parce qu’on aimait ce qu’on faisait tu vois. Après quand t’es juste business man, t’en fous, tu fais du beurre avec. Mais moi je roulais avec, donc tout ce que je fais, ça passe dans mes mains, je l’essaye.

Et pour la rampe, t’avais quoi comme matos Vins Isaac ?

Pour la rampe, on utilisait des trucks de skateboard indépendants en freestyle. Je crois qu’ils faisaient 110 ou 103 mm et utilisait des Bullet. Maintenant ce qui roule bien c’est Type S en skateboard mais à l’époque on avait des Bullet, c’est ce qui roulait le mieux.

Et en chaussure t’avais quoi là pour mettre dessus ?

Des mauvaises Converse de basket montantes parce que la semelle était hyper rigide et on pouvait mettre des cavaliers sans passer à travers. C’était du bric-à-brac, c’était les débuts. On fabriquait nos paires de patins, donc c’est pour ça que quand je vois les gars qui galèrent pour monter des roues quand c’est des noyau en alu, je me dis que s’ils étaient passés par le rollo’, ils n’en seraient pas là !

Donc là tu est as Marseille. Tu roules avec un noyau dur de gens. Vous roulez tout le temps et vous faites des pratiques assez finalement hétérogènes : vous roulez dehors, vous faites du street, de la rampe etc. C’est bien ça ?

Ouais, c’est tout à fait ça.

Vous aviez des lieux dans lesquels vous pouviez aller pour pratiquer Vins Isaac ?

A l’époque tu avais des pipelines, c’est pas des half-pipes encore, c’était le half-pipe qu’on trouve maintenant, c’est un half où tu as un plat de 3 ou 4 mètres suivant la hauteur. Un plat entre les deux courbes de 3 ou 4 mètres suivant la hauteur. Mais à l’époque c’était juste des U, des demi-pipes. Et on faisait dans des demi-pipes. Souvent c’était en fibre de verre. Et quand tu tombais, tu te refaisais les fesses.

Tu te brûlais tout ce qu’il y avait à brûler sur le bonhomme. Mais bon, on était motivé quoi.

Tu te fabriquais tes protec’ ou tu achetais des matos de protection ?

On achetait des protection mais elles n’étaient jamais assez bonnes. Donc on mettait des renforts en néoprène dessous, pour pas que la protec glisse sur le genou. Mais tout ça, on a toujours été obligé de jongler avec le matériel parce que les genouillères étaient faites pour le skateboard. En skate, quand tu tombais, souvent tu faisais trois pas et tu te jetais sur les genouillères. Tandis qu’en roller, quand tu tombais sur les genoux, tu faisais pas trois pas. Tu tombais sur un genou et un roller, souvent. Ou sur les deux genoux. Donc souvent t’avais une genouillère qui glissait et tu te faisais des pizzas.

Donc on a bricolé depuis le début. C’est normal que par la suite, sans le vouloir inconsciemment, j’en suis arrivé à continuer à bricoler.

Je reviens deux minutes sur les personnes avec qui tu roulais. Est-ce qu’à l’époque tu roulais avec des Niçois ? Parce que je pense qu’on a de mémoire on a parlé de toi dans l’interview de Manu Locus est-ce que tu roulais avec Alex Colin?

Grave mais c’est toujours mes copains tous ces mecs. Alex c’est toujours mon poteau. Tu sais le truc c’est que c’est une famille. Les mecs qui ont fait ça, il n’y avait rien à gagner au départ. Tous ces gars-là, c’est ma famille. Tu sais, tu as une famille que tu choisis. Et tous ces mecs-là, Alex, Zabo, Manu, Dallas, Toto… Mais bon Toto ne compte pas, c’est mon frère ! Tous ces mecs, tu les as choisis. Et puis ce qu’il y a de sympa, c’est que 40 ans après, ou peut-être 35 ans après, on est toujours là. On est toujours passionné parce qu’on est des mecs passionnés. Et puis c’est tellement agréable de se recroiser, de se voir, de passer un moment ensemble. C’est ça la vie, je crois.

Vins Isaac et Toto Ghali
Vins Isaac et Toto Ghali

Vous faites toujours du roller ensemble ou pas ?

On fait d’autres sports, d’autres trucs. On fait du kite, du wing, des sports qui font beaucoup moins mal, qui sont beaucoup moins physiques. Parce que le truc c’est que quand tu as été professionnel du roller et que tu as été très bon dans un truc… Je n’ai pas la prétention de dire que j’ai été machin, mais bon quand tu fais des shows, tu fais 180 shows dans l’année, trois fois par jour, que tu as un jour pour aller, un jour pour revenir, t’es jamais chez toi, tu as un niveau qui est un vrai niveau. Et quand tu arrêtes d’être une machine, tu régresses… Bien que tu as toujours tes acquis. C’est comme le vélo, mais ton cœur, ta pompe, ton machin pour tout remettre en route, c’est le roller. En street ou en half-pipe, c’est vraiment un sport, t’as un cardio qui monte à pas possible et t’as besoin de jus.

Si je me fais bander dans un truc, je me lance, sinon je préfère faire autre chose. C’est mon but, c’est mon lifestyle. Après il faut avoir les possibilités et se donner les moyens. Mais quand t’as compris que tu voulais te faire plaisir dans la vie… Et puis le jour où ça me fera chier, je ferai autre chose. Mais le roller, je continue encore. Je me démerde pour faire évoluer de temps en temps quelques produits, pour les mettre sur le marché. J’ai toute une équipe de riders qui me suivent et qui me prennent pas pour ce que je ne suis pas.

Vincent "Vins" Isaac en kitesurf
Vincent « Vins » Isaac en kitesurf

Tu as de bonnes relation avec nombre de riders on dirait…

Je m’entends bien avec tout le monde et c’est cool.

On va en parler après, effectivement, parce que je vois que, notamment chez Famus, tu as beaucoup de riders qui ont leur roue à leur nom. Juste pour revenir sur la partie compétition : quels ont été tes moments forts ? Les compétitions qui t’ont marquées Vins Isaac ?

Moi, ce qui m’a fait kiffer, c’est quand j’avais rien et que j’étais en panne de cœur et que mon vieux, mon pote, il est venu me chercher. Il m’a dit :  » Ecoute, je suis chez Rollerblade, viens on va tourner, on va faire des shows, je te mets le pied à l’étrier et on va voir ce que tu fais. »

Et il m’a pris un mois dans son camion, on a fait tour de l’Europe. Lui faisait ses shows, moi je faisais mes bricoles à coté. Jusqu’au moment où j’ai pu m’enquiller chez une première marque, Razors, qui commençait. Donc consciemment j’aurais fait un patin, ça a été le début du truc. Après je vais tourner. Quand Toto Ghali a commencé à faire « Out », je lui ai donné un coup de main aussi pour ce produit. Puis, il est parti de chez Rollerblade. J’ai enquillé chez Rollerblade pendant trois ans. Là, ils m’ont pris pour un citron. Bon, j’ai beaucoup appris, mais ils m’ont pris pour un citron et ils m’ont bien pressé.

Et puis avant d’aller chez Rollerblade, j’avais fait un tour chez Roces. Je les ai tous fait. Oui, je suis allé dans toutes les boîtes. Je suis allé voir comment ça se passait, comment ça tournait. Ça m’a permis de voir un peu ce qu’il en était et de voir que c’est pas ce que je voulais faire. J’ai donc commencé à monter mes produits. Donc par la suite j’ai eu l’occasion de faire des produits pour tout le monde. Cela m’a amené en Chine. Et puis, on te montre une fois et puis à un moment donné quand on t’as montré une fois, logiquement, tu sais retranscrire.

Tu es donc un autodidacte. Tu travaillais sur quoi comme matos ? C’était les patins complets ? Les roues ? Les platines ?

Surtout les patins, les grindplates. C’est moi qui les ai sorties avant que Fifty/50 et que tout le monde les sorte. Après j’ai fait le premier Razors qui est sorti complet. C’était une vraie merde. Mais bon, ils avaient écouté qu’à moitié. Après, qu’est-ce que j’ai fait ? J’ai fait pas mal de trucs, pas mal de produits. J’ai bossé un peu sur Powerslide à l’époque, avant que Matthias soit énorme. C’était une micro-industrie.

Avant que je sois pro et que ça explose, c’était une micro-industrie, tu vois. Donc c’était à taille humaine. Après ça a explosé dans les années 97-2000, 2002-2003. Puis, ça a commencé à descendre. Donc après il est resté à peu près que les puristes.

Tu avais quel âge quand tu as commencé à bosser dans le matos ?

J’avais… 18 ans je crois. Un petit peu comme Toto finalement.

Vous avez démarré super tôt !

Oui, on a démarré super tôt parce qu’on s’est retrouvés super tôt tous les deux dans un métro à faire du roller. C’est parti de là.

Tu dis que tu as fait toutes les marques. Cette période où tu as enchaîné les marques, elle a duré une dizaine d’années Vins Isaac?

Je crois que j’ai signé en 1997 ou 1998 chez Rollerblade. Et pendant deux ans, deux ans et demi, j’ai tourné pour tout le monde, j’ai fait le tour du monde.

Il y avait des shows qui se faisaient un peu à droite et à gauche. Donc je prenais les shows jusqu’au moment où j’ai enquillé chez Rollerblade. Là, t’avais un salaire. A un moment donné, en fait, je pouvais plus faire le gitan. J’avais mes vieux qui étaient là, qui me disaient « oh qu’est-ce que tu fais, qu’est-ce que tu fais, qu’est-ce que tu fais ? »

Donc je suis reparti sur la route en Chine et j’ai fait quelques produits. Je suis revenu avec et puis j’ai fait l’épicier. Parce que je me suis dit :  » Des épiceries fines il y en aura toujours «  parce que je ne me considère pas du tout dans ce milieu, dans le game, dans ce gros game.

Donc les premiers produits que tu fais toi-même en Chine après Rollerblade c’est quoi ?

Un protège-hanches que je livrais dans une boîte à pizza. Etant donné qu’on se faisait des pizzas sur les hanches. Je l »avais fait sous la marque Out. Et après, avec Alk13, j’ai récupéré ce protège-hanches. Puis, j’ai fait des premières genouillères, protège-tibias et après j’ai décliné les casques. Mais les casques c’était compliqué. En effet, il fallait faire son moule et il fallait investir beaucoup d’argent pour le moule. Après il fallait faire des patentes et passer des tests de conformité. Et quand t’es un piou-piou, c’est beaucoup d’investissement.

En même temps il fallait faire le fichier client, aller voir les clients. J’ai tout fait seul.

Casque ALK13 H2O blanc
Casque ALK13 H2O blanc

A ce moment, tu fais des produits pour plusieurs marques ? Ça se passe comment ? Tu produis de la marque blanche ? Tu faisais tes produits en Chine ?

Non, non, j’ai des copains clients qui me demandent des produits. Et de temps en temps je leur sors un produit.

Mais t’es freelance à ce moment là ? Tu as quoi comme statut ?

Ah, j’ai un statut mais je n’apparais nulle part. Et je ne te donnerai pas de nom de marque non plus. Tu vois, je fais mon truc de mon côté. Et à côté de ça, j’ai des potes qui me demandent de faire tel ou tel produit.

Donc là aujourd’hui on connaît principalement la marque Alk13 et ses protections multi-glisses. Il y a la marque de roues Famus. Quelles sont les marques que tu as créées ?

Après j’ai une marque de skateboard qui s’appelle Magnet. J’ai fait une marque de trottinette qui s’appelait Ultimate. Comme je te dis, je fais des produits à droite et à gauche. J’ai aussi fait des produits de kite, des planches de surf, plein d’autres trucs quoi.

Mais quand je te dis j’ai fabriqué, ça veut dire que j’ai fait les modèles, créé les modèles, passé les patentes, et j’ai mis les modèles sur le marché. Après évidemment tu vends du roulement. Le roulement, tu n’inventes rien à part que tu choisis les cages et les billes suivant ce que tu veux. Mon truc c’était de créer des produits. Alors c’est long, c’est coûteux, mais au moins tu sais ce que t’as. Et tu sais ce que tu vends.

C’est quoi le process de création ? Comment il fonctionne Vins Isaac ?

Ça dépend si tu fais de l’injection ou de la couture. Au départ, pour de la couture, tu fais du bric à brac avec du fil. Tu fais tes protections et tu montres tes échantillons ou tes prototypes à la couturière qui est là-bas en Chine. Puis, tu les montres sur place. Au début c’était comme ça, après ça a évolué. Mais à la sortie, ça reste comme ça, je me retrouve toujours avec le mec qui fait l’injection ou la nana qui fait la couture pour choisir les points, les croisés, savoir si ça tient.

Donc le gros avantage que j’ai, c’est que quand je vais en Chine, je fabrique et j’essaye tout de suite après.

Donc le retour sur produit, tu l’as de suite…

Oui, tu sais si ça fonctionne ou pas.

Tu y vas régulièrement en Chine ?

Là, je pars dans huit jours.

Mais tu y vas plusieurs fois par an ?

Oui, environ quatre fois par an. Là j’étais un peu malade avec la Covid19. C’était un peu compliqué. C’était très compliqué en fait. Avec ce Covid, tu vas une première fois pour fabriquer, une deuxième fois pour voir si ça tient la route et une troisième fois pour contrôler et une quatrième fois au sol. Tu vas faire des foires. Tu peux trouver aussi des fabricants qui vont te permettre de faire évoluer tes produits.

Par exemple, la roue c’est pas compliqué. La roue Famus avec le core (noyau) en alu. Je ne comprenais pas pourquoi les mecs en trottinette avec ces deux pauvres roues, ils allaient plus vite que nous en roller. Et bien c’est pas compliqué, j’ai essayé avec des « core » en aluminium, parce que je savais que la gomme fait pas tout, la gomme fait beaucoup, mais ce qui fait le plus c’est le corps. C’est à dire que si ton corps s’écrase autour de ton roulement, et bien tu perds de la puissance sur ta gomme. Ta gomme elle s’écrase et au lieu de revenir, ton corps s’écrase aussi. Tandis que quand tu as un corps dur, ta gomme revient.

Roues Famus avec noyau  en aluminium
Roues Famus avec noyau en aluminium

Du coup, le jour où j’ai essayé ça et j’ai trouvé ça fou. Tu prenais 30% de vitesse en plus ! On est à 1,5 mètres au dessus du coping en half pipe. Et 1,5 mètres, à un moment donné, c’est énorme ! Et après, j’ai fait évoluer la gomme. Parce que les gommes que j’utilise, c’est sûr, elles sont hyper tendres, les plus tendres que le marché. Elles s’usent plus vite, mais elles vont plus vite que toutes les autres roues. Et ça, que tu prennes des Undercover ou autre… Tu sors un bon produit, au moins tu vois si ton produit il est bon.

 » Si les gens te copient, ça veut dire que ton produit est bon et que tu es dans le bon chemin. »

Vins Isaac

Donc je pense que les roues peuvent évoluer encore.

Je voudrais revenir juste sur ta découverte : les premières fois que tu vas en Chine et que tu commences à comprendre comment ça marche. Comment ça se passe pour toi ?

Je suis d’abord allé en Thaïlande pour voir une usine qui n’existait pas. Puis, je suis allé en Chine pour rencontrer des gens qui n’existaient pas. Mais ça c’est une autre aventure, tu vois. C’est pour ça qu’il faut être là-bas. Tu peux rencontrer des gens ici, des peintres, et qui te disent « Ouais, si je fais ça ».

 » Mais tant que t’es pas allé à l’usine, que tu n’as pas rencontré les gens, que tu n’as pas vu ce qu’ils faisaient, ça n’a pas de sens. Entre ce que les gens te disent et ce que les gens font et ce qu’il se passe là-bas, ce sont deux choses différentes. »

Vins Isaac

Donc tu disais tout à l’heure que tu avais commencé à fabriquer du matos vers 18 ans. Tes parents te demandaient un petit peu ce que tu faisais ? Comment ça se passait toi ? Qu’as-tu fait comme études ?

Écoute, l’école j’y allais en roller et je repartais en roller. Souvent je tombais sur le dirlo et je rentrais à l’école en chaussette. Ouais c’était compliqué pour moi l’école. Qu’est-ce que je me suis emmerdé !

Mais peut-être parce que j’ai pas trouvé les profs qui m’ont fait décoller. Et c’est ça le problème : des fois tu trouves des profs qui sont extraordinaires et t’as envie. Et comme moi je marche avec l’envie et la passion, si tu ne me fais pas vibrer, tu ne vas pas m’intéresser. Donc je suis parti de là, je ne parlais pas anglais, je parlais pas espagnol. Je ne parlais rien du tout, j’étais personne. Ça a été plus compliqué par la suite. Après j’ai donné des conférences dans des amphis et on peut dire que je me suis rattrapé par la suite. Mais c’était une période où je me suis régalé parce que je faisais du roller. Mais à l’école, c’était compliqué. On va pas dire que je me suis fait chier, mais c’était compliqué quand même. Il y a des gens pour qui c’est compliqué et moi c’était compliqué.

Expliques-nous s’il te plaît…

Bon après, ça ne m’a pas empêché d’apprendre sur la route. Mais j’ai mis beaucoup plus de temps. Par la suite, il a fallu que je paye beaucoup plus de gens pour ma boîte. Et puis tu apprends, on te montre une fois quand t’es intéressé, si on te montre une fois comment ne pas payer autant, la deuxième fois tu vas le faire parce que la première fois tu t’es fait assommer ! Mais bon, tu payes pour apprendre, chose qui était gratuit à l’école. Je n’ai pas compris cela quand j’étais gamin. Mais c’est gratuit quand même ! Enfin, en partie.

Donc il ne faut pas cracher sur l’école. J’ai des minots, je les tanne pour qu’ils aillent le plus loin et le longtemps possible. Quand t’as été un pseudo cancre, tu te dis :  » Ouais mon fils, il faut qu’il aille plus loin parce qu’avec un peu plus, il ira encore plus loin. »

Tout à l’heure on parlait de Munster. En fait c’était un peu les débuts du street et de la rampe et tu étais en quad. Tu parlais aussi du fait d’être passé professionnel. Est-ce que ça c’est concomitant au passage en ligne ou est-ce que déjà en quad il y a cette notion de professionnel ?

Absolument pas ! Le quad, il n’y avait rien c’est à dire. Il y avait 15 pélos qui allaient faire la compète. Tu avais deux français. Si c’était trois c’était nous, on était en force.

Munster RadMag 1987 avec Jimmy Scott en bas à gauche et Brian Wainwright en bas à droite
Munster RadMag 1987 avec Jimmy Scott en bas à gauche et Brian Wainwright en bas à droite

Il y avait, je crois, Tahir, Toto et moi. C’était un groupe qui était en force. Après t’avais deux Suisses, Raphaël Sandoz et Ivano Gagliardo. Après en américain t’avais Brian Wainwright. C’est comme si c’était hier. T’avais aussi Jimmy Scott. Mais c’était mes idoles tout ça, tous ces mecs-là ! J’avais 18 ans. Les mecs je voyais sortir du half pipe, j’étais un piou-piou. C’est des extraterrestres les gars.

Il y avait Kallak, un Allemand. Tu avais deux frères aussi. Tu avais Longares. Et tous ces mecs là, Longares, Toto, Raphael, Ivano, moi, on est tous passés au inline. Quand on a vu qu’il y avait moyen de vivre de ça et on a tous franchi le pas. C’est-à-dire que quand le inline est arrivé en Europe, il a fallu faire la promo pour les grosses marques et on a essayé de s’enquiller. Je crois que Raphaël Sandoz était sur Rollerblade avec Toto, Ivano était sur Roces, Marco était chez Rollerblade. On était tous en quad à l’époque à Munster. Et le skateboard était mélangé avec le roller.

À l’époque, il n’y avait pas de distinction entre les deux ? De toute façon vous utilisez le matos du skate en plus ?

Oui, il n’y avait aucune distinction. Et surtout quand on se revoit, on prend plaisir. Quand je revois les skateboards, ces vieilles chaussettes, c’est toujours un plaisir. Passage en inline égale professionnalisation. C’est à partir de là qu’il commence à y avoir plus d’argent. Et c’est à partir de là que j’ai commercialisé du matos. Enfin, avant de commercialiser du matos il a fallu traîner ses guêtres, cramer les transports, que ce soit train ou autre pour aller faire des compétitions.

En Suisse, avec Dallas, on nous appelait les missionnaires ! On arrivait, on n’avait rien à bouffer, on arrivait sans un sou. Et là, il fallait qu’on gagne la compète pour prendre un billet. Souvent, on se faisait inviter à bouffer là-bas. On dormait dans le skatepark avec des duvets. Et on avait un peu de sous parce qu’on ne pouvait pas frauder le train en Suisse. Pour partir en Allemagne, on payait un peu de train en Suisse, on allait en Allemagne pour faire des compètes ailleurs. Là-bas, pour gratter encore un petit billet on allait à l’autre compète. Et c’est comme ça que tu te fais connaître.

Les missionnaires on nous appelait. Ça veut bien dire ce que ça veut dire.

Mais les premières années, quand t’arrives par exemple chez Rollerblade, là Rollerblade il te paye quoi ? Il te défraie ou il te donne un salaire ?

Non, parce que la France voulait me récupérer. Mais je les avais envoyés se faire foutre avec mon bon ton. Ce qui m’intéressait c’était l’Europe. Parce que moi, je tournais en Europe. J’avais fait le tour d’Europe, toutes les compètes et j’étais là-bas. Ce n’était pas pour me cantonner à faire les shows sur les plages.

Je ne dis rien pour les gens qui ont fait des shows sur les plages, c’était super génial, mais ce n’était pas du tout mon but. Je m’insultais quand à l’époque, j’étais un peu extrême. Avec le temps ça s’est calmé.

La marque Alk13 13 naît quand ?

Elle naît après Out. Après avoir fait Out, en même temps, je roulais pour Rollerblade. J’ai fait 2-3 ans pour Rollerblade. Et comme je te disais, ils m’ont pressé comme un citron.

Donc du coup, il fallait que je me casse.

Donc Out ?

À la fin de Out, enfin, à la fin de Out, quand Toto faisait Out, moi je faisais des produits là-bas, mais je roulais chez Rollerblade aussi en même temps. Et en fait Rollerblade, ce qui se passe, c’est quand tu fais 180 jours de show dans l’année. Tu as un jour pour y aller, un jour pour revenir. A un moment donné, comme ils disent les Marseillais, t’es jamais chez toi, tu sors des compètes, puis d’un coup ça devient un métier. Tu gagnes bien ta vie, franchement tu gagnes bien ta vie.

On gagnait vraiment bien sa vie. C’était une vie de rockstar. Mais surtout quand tu venais de rien, tu n’avais rien, et que d’un coup on te donnait 1500 ou 2000 balles en euros, ça te faisait je sais pas, 30 000 balles, 30 000 francs, 35 000 francs avec les shows. C’était quand même beaucoup. D’un coup, tu te disais :  » Oh, c’est super ! « 

Le problème c’est que d’abord je n’avais pas la mentalité, et puis moi le roller ça a toujours été un kiff et une passion. Et là d’un coup ça devenait un travail quoi, c’était une machine. Alors je me cartonnais le soir avec toute l’équipe et tout c’était génial. Mais le matinn je faisais que ça. Et le soir tu remets le couvert. Et le matin tu remets le couvert… Toute la journée ! Et tu fais que ça pendant… Et puis à un moment donné, ça ne peut plus.

La marque Alk13 elle sort quelle manière ?

Elle sort parce que je roule chez rollerblade et que rollerblade me presse comme un citron. A un moment donné, je me dis je donnerai plus mon cul pour personne. Donc le truc c’était que j’avais eu une expérience avec Toto en Chine et j’avais fait quelques produits pour lui. Donc je me suis dit :  » Je repars en Chine, je vais me faire mes produits et je vais vendre mes produits. »

Voilà et je vais me faire la communication moi-même des produits que je vends. Mon but c’était ça.

Les premiers produits Alk13 alors c’est quoi ?

Protège le hanche, genouillère, protège tibia et après les casques. D’accord donc le protège-hanche dont tu parlais de tout à l’heure avec les boîtes à pizza. Exactement, c’est ça qui m’a permis me faire de connaître un peu, de voir comment ça se passait.

Quand tu montes ta marque, il faut se faire sa pub. Qu’est ce que tu fais ? Comment tu fais pour faire ta pub ? Donc là tu montes un team, comment ça marche en fait pour te faire connaître ?

Le début c’était moi, je me vendais moi-même, c’est-à-dire que jusqu’à présent je vendais mon corps pour les autres. Et comme j’ai tourné énormément et que quand tu es dans les top 5, top 10 Europe, à peu près tout le monde te connaît un petit peu, tu vois ce que je veux te dire. Donc à partir de là, moi souvent on faisait des shows avec Rollerblade dans des gros magasins. Je prenais les cartes à l’époque, je me préparais. Ainsi, je me préparais au jour où je ferais mes trucs et où j’aurais déjà quelques clients.

Mais, je ne faisais pas beaucoup de produits au début mais j’aurais un panel de clients et c’est comme ça que j’ai commencé. C’est-à-dire que j’étais au four, au moulin et sur le marché.

On trouve vraiment la même approche que Toto. Toto, il nous disait qu’effectivement il continuait à rouler et qu’à chaque fois qu’il allait faire une démo ou quelque chose, soit il prenait les cartes, soit il en laissait et il préparait en fait l’arrivée de sa marque et de ses produits.

Ben ouais, c’est parce qu’on a toujours fonctionné comme ça. On a toujours été sur le terrain. Là maintenant tu as des réseaux sociaux. Mais à l’époque il n’y avait pas ça, il faut se rappeler. Pourtant on n’est pas vieux ! T’étais obligé d’être sur le terrain. Et c’est pour ça que j’ai un bon affect et un bon rapport avec toute la scène du roller. D’abord, quand j’étais pro, ils étaient plus jeunes. Et puis j’ai toujours eu énormément de respect pour ces mecs-là, parce qu’ils faisaient ça par passion. Et ils ont grimpé tous ces mecs.

C’est-à-dire que nous on s’est retirés, par la force des choses. Et puis eux ont pris notre place, et c’est génial. Ces minots gravitaient autour et ils sont encore dans la partie.

Et tu peux te donner des noms ?

Tu as Kevin Quintin, tu as Anthony Avella. C’est des mecs qui ont créé des assos, qui travaillent du roller. Après tu as des mecs sponsorisés. Tu as Julien Cudot, qui est là depuis des années et des années. Maintenant, c’est le plus fort, qui a roulé chez moi à un moment et qui re-signe cette année. C’est que de l’affect, c’est-à-dire que je ne connais pas un gars qui me crache dessus. Par contre, les patrons de marque, je veux bien qu’ils me crachent dessus, ça ne me dérange pas. Mais tous les riders, c’est ma famille. Donc à un moment donné, entre faire du business et privilégier les riders, je préférerais privilégier les riders. Et je pense qu’ils le diront tous.

Portrait de Kevin Quintin
Portrait de Kevin Quintin
Anthony Avalla aux X-Games 2002 à Philadelphie
Anthony Avalla aux X-Games 2002 à Philadelphie
Julien Cudot, vainqueur du Winterclash 2023
Julien Cudot, vainqueur du Winterclash 2023

C’est intéressant ce que tu viens de dire. Je veux bien que les patrons de marque me crachent dessus.

Mais quel est ton rapport avec les autres marques ?

Ils viennent me pleurer dans mes guêtres. Ils me disent :  » Lui il m’a fait ça, lui il m’a fait ça ! «  Ça me fait beaucoup rire. Je ne dirai pas de nom, non plus. Parce que j’ai ces deux étiquettes d’être patron de marque, mais d’être quand même un rider. Je me mets plus du côté des riders que du côté du patron de marque.

Ils n’ont jamais fait de roller la plupart, ce n’est pas ma famille. Et puis ils n’en ont rien à foutre. C’est la différence entre ceux qui sont là, ils font du produit, ils font du business, et ceux qui viennent du patin.

Ce sont des choses dont on a discuté assez longuement avec Gregoire Pinto et Sébastien Laffargue d’Universkate par exemple. Ils racontaient qu’ils faisaient des patins pour les patineurs. On est là. Pour que notre écosystème fonctionne, il faut faire des choses pour notre écosystème. C’est un peu la même chose que tu es en train de dire finalement…

Oui et ils sont très bons. Je les aime beaucoup ces deux mecs, bravo ! Belle dédicace à eux. Franchement, chapeau les gars.

Je voulais en faire la transition vers Famus, marque de roues avec jante/noyau alu. C’est une technologie qui a laissé du bitatif du monde pendant un petit moment. Plusieurs marques ont tenté cela, notamment PSI à Montpellier à une époque avec Zoran. Les patineurs de vitesse avaient essayé et n’avaient pas été convaincus à ce moment, parce que finalement ils étaient en petit diamètre et ça leur apportait pas une grosse plus-value. Puis finalement, avec les grands diamètres, les jantes alu reviennent. Qu’est ce que ça apporte ? Tu l’as un petit peu abordé tout à l’heure, particulièrement dans le street…

C’est le futur, c’est pas compliqué ! Tu t’imagines des roues de bagnole avec des jantes en plastique ou quoi ? Ça va être compliqué. Quand tu sautes de 4 mètres et que tu tombes sur des plastiques, tu vas avoir de l’absorption, mais tu n’auras pas un retour. Et puis elles vont se casser au fur et à mesure.

L’aluminium, c’est l’évolution. Après la grosse évolution qu’il faudrait faire, c’est que ce soit plus léger, avec des nids d’abeilles ou des trucs comme ça. Mais le problème c’est que le prix de la roue serait vraiment trop cher, et il n’y a pas de marché. Bien sûr, moi je peux la faire évoluer le truc. Mais après, ta roue, elle vaut une blinde. Le marché ne s’y prête pas. Il y a plein d’évolutions à faire encore.

Carton de roues roller Famus
Carton de roues roller Famus

Justement, tu parles du prix des roues. Moi, je suis d’autant plus sensible à ça qu’à la base, j’étais plutôt patineur de vitesse. C’est un marché où, globalement, les roues sont hors de prix. Aujourd’hui, tu arrives sur des roues de course qui sont entre 30 et 40 euros l’unité, ce qui devient complètement délirant. Qu’en penses-tu de ces politiques de prix ?

Ça dépend de qui la fait, c’est-à-dire d’où elle arrive et avec quelle uréthane. Qui la met en route, qui la fabrique, qui la distribue, qui fait la communication et comment elle est faite. Mais la plupart du temps, à part des bi-composants sur de l’uréthane, pour moi c’est de la branlette. Mais si tu mets un corps dur, avec une gomme, ça fait le taf. Le problème c’est que si tu fais deux gommes, tu as deux étapes. Donc à un moment donné ta roue va forcément coûter plus cher. Et le truc c’est que c’est pas dit qu’elle marche mieux. Ce n’est pas dit que tu en vendes plus, tu vois.

Après t’es limité, si c’est pour vendre des roues à 30 balles, jamais je vendrais des roues à 30 balles parce que c’est destiné qu’à une certaine catégorie de gens. Il faut des prix pour tout le monde c’est un sport de pauvres le roller à la base. Faut pas oublier.

Il y a une autre question que je me pose là dessus pourquoi est-ce que les roues elles sont vendues par quatre alors que nous on a quand même 8 roues sur nos rollers ?

Bah parce que t’as des gars en street qui utilisent que 4 roues ! Mais moi je les vends à l’unité. Si tu veux une roue chez moi tu peux acheter qu’une roue. Mais après, un magasin, il voudra t’en vendre quatre c’est évident, parce que les roues de street t’en as deux grosses aux extrémités, puis des anti-rockers au centre.

Oui c’est vrai…

Mais après c’est une question de marketing, de commerce. Les mecs essayent de bourrer, de vendre le plus possible. Mais bon, chez moi, si y’a un problème sur une roue, d’abord je la remets. C’est à dire que c’est rare que j’ai des soucis sur des roues, mais ça arrive, des fois t’as des bulles, ça arrive. On peut pas dire que mes roues c’est les meilleures, ce n’est pas vrai. Des fois t’as un problème, mais moi je remets, c’est cadeau. Y’a pas un mec qui fait ça dans l’industrie.

Quelle est ta relation avec les magasins ?

Avec le peu de magasins qui restent, Il en reste très peu, tu peux les compter sur une main. J’ai des relations assez « friendly » parce que d’abord c’était des passionnés. Des mecs qui montent des vrais magasins, je parle, comme Clic N Roll, Roller & Co, Makio, Nomades. Après, ce sont des gens qui m’ont toujours soutenus et que j’ai toujours soutenu dans les moments difficiles. Ça a été un échange. Tout le temps, quand ça a été dur, j’étais là et ils ont essayé d’être là quand c’était dur pour moi.

Mais le problème c’est que quand tu es en distributeur, c’est toi qui fais la banque. C’est toi qui fais la banque pour tout le monde. Donc c’est compliqué comme place. Je pense qu’à un moment donné, mon métier va sauter.

Quand tu parles de métier de distributeur, c’est un peu l’intermédiaire entre l’usine et le magasin. Les modèles économiques varient pas mal en ce moment à ce niveau-là, ils sont en constante mutation. On a vu des marques comme Rollerblade notamment qui essayent de bypasser un peu les distributeurs et les shops avec de la vente en ligne directement.

Ça c’est un modèle qui se développe de plus en plus. T’en as d’autres qui eux essayent d’éviter le réseau intermédiaire de distribution et de ne plus avoir de distributeurs et de passer en direct avec les shops.

En fait l’histoire qui se passe c’est que suivant où tu bases ta boîte et le nombre de magasins qu’il y a à l’heure actuelle et en plus de ça, c’est toi qui fais les avances, à un moment donné tu te dis :  » Ouais, est-ce qu’il vaut mieux pas envoyer directement de l’usine ? « 

Oui, ça c’était le modèle de Bont typiquement…

Mais oui, mais ça va être le modèle de tout le monde. C’est ça le problème. Il y a 5-6 ans avec Toto, on avait proposé ça aux fabricants. On avait dit :  » On monte une boîte là-bas et nous on fait des agents et ça dispatch tout depuis la Chine. » Mais c’est ce qui est en train de se passer avec Amazon, avec AliExpress, avec Wish, etc.

« Dans notre secteur et dans tous les secteurs économiques, ça va être comme ça. Les distributeurs vont sauter et un jour les magasins en physique vont sauter. »

Vins Isaac

Oui, effectivement on sent arriver la tendance. Il reste quand même une question : comment choisir correctement une paire de roller quand tu ne l’as jamais mis le pied dedans ? Est-ce qu’on va finir comme avec l’Allemagne ou avec le marché de la chaussure où typiquement les gens ils achètent la taille au-dessus, la taille en dessous et puis après ils prennent celle qui leur convient et puis ils renvoient l’autre ?

Ouais. On ne fait pas encore ça, on n’est pas aussi vicieux que ça… Ou dépensier ou intelligent, comme tu veux. Mais on fait pas ça nous. C’est à dire que mon site à l’heure actuelle, c’est pas pour faire de la promo.Ce n’est pas pour défoncer les produits. C’est moi qui les fais et c’est moi qui mets les prix. Mais c’est juste pour bloquer les prix par rapport aux clients, par rapport aux magasins. Pour pas que les magasins délirent, ou qu’ils défoncent mon produit. Après, s’ils veulent le vendre plus cher, ce n’est pas un problème. Parce que les gens s’ils le vendent plus cher au magasin ça veut dire qu’il ya eu un service ou qu’il y a eu quelque chose en plus. Mais avec les prix que je fais les gens travaillent à deux. Les autres ne travaillent pas à deux sur les produits.

Vins Isaac, on va expliquer juste pour les auditeurs ce que c’est que « travailler à deux ».

C’est simple. Moi j’ai un prix d’achat, j’ai un prix de vente, le prix de vente est hors taxe pour les retailers, c’est à dire les revendeurs. Et les revendeurs multiplient le prix que je vends par 2, plus TVA. Et vous avez ce prix à la fin. Tout simplement. Mais les mecs je leur donne à manger quoi…

Un produit acheté 100 chez toi, il est disponible à 200 en magasin, moins la TVA…

Et il est vendu à 500 par la suite parce que le magasin prend 200 et il y a la TVA ça fait 500. Bon j’ai pas de produits à 500 encore mais bon nous on fait plutôt avec 10 balles, 20 balles, 40 balles, 50 balles. Mais bon un jour, j’aurai des trucs à 500 mais pas encore.

Est ce qu’il est possible pour certains produits de produire plus localement qu’en Chine ?

Non.

Ou est ce que c’est juste impossible parce que le savoir-faire de tous les cas il est là-bas en fait ?

Bah écoute, on a tout importé là-bas. Toutes les machines sont là-bas. Ici, faire quelque chose, ne serait-ce que faire tourner une machine pour faire de l’injection, il va falloir ramener le chimique ici, c’est-à-dire l’uréthane. Rien que ramener l’uréthane, t’en as pour 34%, parce que ça pollue. A un moment donné, regarde les bagnoles, une bagnole qui vaut 80 000, l’Etat il la vend 140.000 maintenant et il te met un bonus écologique pour produire en France, c’est pareil. Et en plus de ça, tu aurais les charges qui seront dingues. Et pour les produits qu’on fait, le coût est tellement moindre, petit, que ce n’est pas possible. Tu ne pourrais pas les faire fabriquer ici, ou tu aurais pas les mêmes prix.

Je ne parle pas forcément en France. Par exemple, ça peut être en Europe de l’Est ou ailleurs…

Ouais, en Europe de l’Est, mais le problème c’est que même que le transport soit pas cher, c’est ce qui s’est passé là pendant un moment, les transports étaient prohibitifs. Je sais pas. Moi j’ai payé le gros conteneur 19.500 €, 20 mètres et 40 pieds parce qu’il y a eu un embargo. Et tu sais c’est pas compliqué : les gens qui font les transports c’est eux les patrons. Et là on a bien pu voir que c’était les patrons parce qu’ils nous ont retourné l’économie. Le truc c’est que en ayant un transport aussi cher que ça, ça a un avantage pourquoi ? Déjà tu vas être obligé de mettre beaucoup plus d’argent dans ton conteneur parce que tu sais qu’il te faut 5 à 7% du prix du transport par rapport à la valeur de ta marchandise. Donc du coup tu vas être obligé de faire arriver beaucoup de marchandises et beaucoup d’argent dans ton conteneur.

Quand ton conteneur va arriver ici, d’habitude tu fais 50.000 de commandes dans un petit conteneur. Là, tu vas en remettre 200.000. Mais tu vas devoir payer la TVA à l’arrivée. Et tu fais grossir le PIB du pays, tu ramènes plus de valeur à ton pays. Et c’est ce qu’il s’est passé en faisant augmenter les transports. Dans le monde entier, les gens ont été obligés de commander plus. Ainsi, les états ont pris plus de TVA. J’ai fait une commande x4. Mais tout le monde a fait ça ! Donc chaque pays a pris plus de TVA et l’économie est montée.

« Après, pendant le Covid, on a super bien travaillé. Et après, ça a été la dégringolade, mais grosse dégringolade. »

Vins Isaac

Ouais, ça a été le paradoxe de la Covid, c’est-à-dire que les usines en Chine étaient fermées. Mais les marques avaient du stock et qu’elles ont pu écouler le stock. Pourtant, elles se sont aussi rapidement retrouvées en rupture à causse de la demande. Donc la Covid19 a été bénéfique d’une manière assez inattendue pour le roller. Par contre la reprise a dû être un petit peu plus difficile parce qu’il a dû falloir remettre les usines en marche, non ?

Les usines, quand c’est des petits, ils travaillent… Tu sais à une époque, ils coupaient l’électricité pour les faire arrêter de travailler. Mais à un moment donné les mecs il faut qu’ils vivent et qu’ils mangent là-bas. Donc je peux t’assurer que la Chine a bien changé. C’est-à-dire que t’as un revenu, t’as une middle class qui s’est créée, les gens qui sont à l’usine touchent désormais 600-700 dollars.

Alors effectivement, c’est pas beaucoup pour ici, mais crois-moi que tu vis là-bas correctement. Du coup, il y a des gens qui ont un peu tourné, tu vois. Les médias, ils te disent ce qu’ils veulent te dire. Donc les usines elles n’ont pas toutes fermées et pas toutes aussi longtemps qu’on te l’a dit. Et puis les gens sont restés chez eux. Ils ne sont pas partis pour l’Europe. Donc ils n’ont pas dépensé d’argent au resto et n’ont pas fait de sortie. Donc les gens, qu’est-ce qu’ils font pour se faire un peu fantasmer ? Ben ils achètent sur le net ! Et c’est ça qui a fonctionné, c’est ça qui a permis de fonctionner. Finalement c’est des revenus disponibles en plus du contexte où on a envie de prendre l’air et de faire du patin à côté de chez soi.

Autre question que nous n’avons jamais posé jusqu’ici : les roues, quand elles sont usées, on les jette à la poubelle. Ecologiquement quand même ça reste du plastique ou de l’alu, de l’uréthane, etc. Est-ce que si on voulait, il y aurait des moyens de refaire un peu d’économie circulaire ? Et de pouvoir récupérer et d’en refaire autre chose ?

L’alu, éventuellement, tu pourrais le fondre. Tu l’amènes chez un fondeur,. Mais je ne vois que ça. Après, s’il y a de la vieille roue, il faudrait récupérer toutes ces vieilles roues qui traînent de tous les riders.

C’est ce qu’ont fait des collègues. Avec mes collègues, on fait beaucoup de kite. A Madagascar, on a créé une association et on récupère les vieilles ailes de kite que tout le monde donne. Puis, on en fait des voiles de bateaux pour les pêcheurs. Tu pourrais les envoyer, toutes les roues, les récupérer et les envoyer en Afrique, parce qu’il y a un potentiel en Afrique. Et maintenant que l’Afrique s’est séparée de la France et qu’on va plus les plumer, je pense qu’ils vont évoluer. Tout simplement. Les secteurs changent, ça serait les aider d’envoyer notre vieux matos en Afrique, ça c’est un vrai truc. Ça c’est un truc les gars que vous pourriez communiquer et faire la promo et récupérer.

Ouais on a déjà fait ça !

Mais vous l’avez fait ?

Ouais, c’est ça dans les années 2000, on demandait aux gens de laisser leur vieux matos dans les magasins et après on avait Bruno Roland, un pote qui malheureusement n’est plus là…

Mais Bruno, je connais très bien Bruno. Les gars, oh Bruno Roland !

Bruno était routier à l’époque. Il passait chez un pote à nous chez lequel on centralisait tout, il prenait ça, il amenait ça à Toulon. A Toulon on mettait ça dans un bateau militaire parce qu’un de nos potes était militaire et ensuite ça partait à Dakar. Et à Dakar après ils étaient vraiment contents de récupérer tout ce matos. A chaque fois, on envoyait 400-500 kg de matos quand même.

C’est comme vous en fait, c’était la débrouille quoi. Tu connais des gens qui disent : bah ouais moi je peux faire ça.

Ouais il y a eu plein d’associations qui ont fait ça. Il y a eu Kalou qui y est allé je me souviens, avec sa voiture…

Ouais c’était par Kalou qu’on faisait ça. Il y a eu aussi Planet Roller qui avait fait ça. Puis, il y a eu quelques grandes associations parisiennes qui l’ont fait à un moment, il y a eu Ride on Lille. Et il y a plus récemment Yohan Camboulive, qui est un gars qui a traversé pareil l’Afrique du Nord en patin qui avait fait une action caricative de ce type. Donc il y a des actions en ce sens là. Ça bouge. Et est-ce que Toto vous a parlé du GTK?

travel by blades collecte roller
Collecte de roller de seconde main pour Travel By Blades

Ah le clan? Non on n’en a pas vraiment parlé…

Ah mais quelle histoire ça! Ça c’est de l’histoire, ça c’est un truc de fou. Un jour on s’est dit : « Comment on pourrait faire pour faire des tournées aussi la promo du truc mais plus rassembler tous les meilleurs ? Bon, on va organiser un tour freelance. Tu vois, les mecs vont venir. Ils vont payer leur trip et puis on va tous se rassembler. On va prendre des camions et on va partir. On est allés en Suède, au Danemark, en Allemagne. Une autre fois on a fait tout le tour de France avec tous les meilleurs européens. Et une autre fois on est parti en Afrique, au Maroc, Toto ne vous a jamais raconté ça ?

Non, c’est vrai que le GTK on aurait pu, c’est un point qu’on avait oublié.

Ah le GTK, en plus tu sais quoi, il a une vente d’images et des interviews sur tout le monde. Toto était dans les films. il montait les images. Du coup, il a des teasers pour tout le monde avec des images dingues. Un jour on pourra faire l’anthologie du truc. Avec toutes ces jeunes têtes qui sont devenues vieilles après quelques années. On a plein d’images rigolotes. Donc c’était le GTK… C’était une aparté et c’était vraiment un truc super !

Je voulais revenir sur Famus. Tu parlais aussi de ta relation avec les riders et effectivement quand on voit le nombre de riders qui ont leur pro modèle on se dit que ça se passe plutôt bien avec eux.

Alexandre : On peut les citer : Nicolas Mougin pour la rampe, Otto Bolanos qui est aussi un rampeur, Coco Onoda, Ravira Garido, Cyril Dussoulais, Nel Martin, Amandine Condroyer, qui fait à la fois du street et aussi du Red Bull Crashed Ice.

Anaëlle Nogueira, qu’on a interviewée ici et qui est au skatepark de Nantes. Anthony Avella. Romain Godenaire, qu’on a connu tout petit à RollerParc Avenue. C’était un gros gros client quand il s’agissait de faire des tricks très aériens. L’Australien, C.J. Wellsmore. Atkinson, lui fait des super lignes en skatepark et il est hyper connu pour un style vraiment à part. Il a gagné plusieurs fois des étapes des FISE World Series. T’as Fabiola da Silva, dans les noms que t’as indiqués. tu la connais bien ?

Vins Isaac : Ouais, c’est des gens de mon époque. Excuse, elle est un peu plus jeune que moi, elle doit avoir 42-43 ans.

Tu as beaucoup cotoyé ces riders ?

Oui, c’est des gens que j’ai côtoyé sur les compètes de partout, dans tous les pays. Et puis tous ces petits jeunes là, c’est que des minots ! Et puis à un moment donné, je me suis dit qu’ils avaient la légitimité d’avoir un produit dans l’industrie du roller. Alors les marques elles m’ont craché dessus. Moi je dis : « Mais tu sais pas d’où viennent ces mecs ? Tu ne sais pas ce qu’ils ont fait ces gens-là… ». Et moi, je fais les roues que je pense que les gens méritent pour avoir une trace dans l’industrie. Parce que sinon on n’est que de passage. Après il n’y avait rien à gagner, je t’explique, je n’aurais fait pas grand chose. Je crois que j’aurais sorti 1000 roues ou 1500 roues, tu vois, un truc dérisoire.

Je leur filais des roues à eux pour qu’ils les revendent et qu’ils se fassent un bon billet dessus. Voilà, le deal, ça ne cassait pas trois pattes un canard. Mais ça leur permettait d’avoir un produit en main, comme moi je l’ai eu. Il m’en reste deux ou trois, mais effectivement j’avais Jérémy Kessler, César Andrade, Lamine. Il y a Kessler, il y a César Andrade, c’est ma famille, c’est toute la famille. Ceux qui ont 10 à 15 ans, c’est tous mes minos. Et les autres, c’est mes brothers. Toi, t’as eu quoi en termes de pro-modèle? J’ai eu des pro-modèles de roulement, je crois.

Moi, on m’a donné des roulements et ce n’est pas moi qui les faisais ! (rires). Et par contre, il y avait ma tronche dessus. C’est-à-dire le super menteur. Mais bon. Tu vois, moi aussi, je suis un peu vieux.

Quand on me dit Vins Isaac, la première chose qui me revient c’était la couverture de Crazy Roller numéro 1…

crazy roller 01

Le troca ! Alors tu vois par exemple pour te donner un truc, avec vous je l’ai fait. Mais je n’avais pas spécialement envie de me faire interviewer. Après j’ai vous regardé les articles que vous faisiez et tout ça. Mais le plan c’est que faut pas oublier que Crazy Roller, c’est moi qui lui ai mis le pied à l’étrier. Bon lui il était un peu plus comme ça, mais il était gentil, il est venu de chez moi. Et j’ai fait la démarche tellement de fois à tellement de gens. Après, finalement ça m’a servi un peu. Heureusement. Par la suite, j’ai arrêté les médias. Je ne me vois pas beaucoup sur les médias, je n’ai pas envie de me voir.

D’ailleurs, on trouve très peu de traces de toi, j’ai galéré pour trouver des infos pour préparer l’interview…

Tu n’en trouveras pas, j’en ai quelques-unes, j’ai beaucoup de presse avec beaucoup de photos, je faisais pour les autres. Après, le plan c’est que moi j’ai toujours fait ça par passion tu vois. Et les mecs qui ont fait quelque chose ça m’a toujours fait kiffer. Que le mec se bouge et qu’il fasse un truc dans ma passion, tu vois.

J’avais une dernière question : ton avis sur le retour du quad dans les skateparks ?

Ah, on va en parler de ça. C’est important quand même. C’est quoi ce sectarisme? Les gars, évoluez quoi ! Les gars en quad ! Je ne vais pas me faire des copains, on va être plus intelligents. Alors le truc c’est ça, nous on vient tous du quad, que ce soit Aktarus, que ce soit toute l’équipe là. Dernièrement dans un événement, les gens du quads qui organisaient n’ont pas voulu inscrire des mecs qui faisaient du inline. Mais c’était des mecs qui ont commencé par le quad et qui se sont remis au quad. Et effectivement le problème c’est que les mecs qui faisaient du inline comme Aktarus, il va à Nantes, il m’appelle et tout et il dépité. Je lui demande ce qu’il se passe : il me dit : ils ne voulaient pas m’inscrire sur la compétition parce que je venais du « line ». Mais c’est quoi ce délire? Maintenant ils choisissent les gens qui veulent s’inscrire ?

Non mais attendez, c’est quoi ce délire ? Aktarus a fait du quad au début, et après du line. Il est allé sur une compète et ils lui ont refusé de s’inscrire en quad ?

Ouais, le problème c’est que c’est sûr que s’il y avait pas du copinage, il a gagné la compète, c’est pas le problème. Mais c’est la façon de réfléchir, de penser.

 » Pour faire évoluer ton sport, si tu commences par refuser des gens dans des événements et que tu restes en vase clos dans ton univers, tu ne vas pas ouvrir tes écoutilles. Il faut ramener des gens, qu’ils aient fait du roller, du skate ou autre. Sinon tu gardes ton sport qu’à toi. »

Vins Isaac

Tu auras le derby, un peu le freestyle, courbe et street. Il faut que les gars réfléchissent et il faut qu’ils montent un vrai tour. Il y a un truc à faire en quad. Mais bon, c’est très élitiste, c’est une petite scène.

Ça revient, on en parle beaucoup, mais il faut refuser personne, ça n’existe pas ça.

En filigrane, il y a peut-être un truc que Walid a abordé de manière implicite, c’est qu’il y a un retour du quad, mais c’est un retour aussi beaucoup du quad féminin. Comment tu vois cette évolution ?

J’aime bien regarder les nanas qui font du quad et du line, je trouve ça vachement joli. Maintenant, elles viennent d’arriver.

 » Mais il faut se souvenir quand même : il y avait des gens qui ont fait évoluer le quad ! Le quad n’est pas arrivé comme ça, avec les trucks larges par exemple. Il y a eu une histoire. L’histoire elle ne commence pas de maintenant. Donc c’est ça en fait le truc, c’est qu’ils ne regardent pas l’histoire qu’il y a eu avant eux. Or, pour nous elle a commencé depuis très longtemps. »

Vins Isaac

Ouais j’en vois. Je suis d’accord, c’est un sport pour eux qui est jeune, qui revendique et tout ça, mais le problème c’est que si nous on revient en quad, elles et ils seraient étonnés de ce qu’on est. Parce que moi j’ai mis des quads la dernière fois, ça s’oublie pas, c’est comme le vélo en fait. C’est assez rigolo quoi. Je fais des roues de quad pour la danse, avec un gars qui est super populaire. Et ça marche très bien, on va à la Love Parade à Barcelone. C’est juste qu’ils sont un peu étriqués les mecs. Ils croyaient que ça y est, ils sont arrivés… Mais quand t’es arrivé nous on revenait cousin !

Ouais clairement ouais, on le voit sur la scène. C’est pas moi qui l’ai dit cette fois-ci c’est bien !

Ça me fait plaisir de te parler avec des gars comme moi dis donc ! Souvent on explique ça.

Ces figures là vous les trouvez géniales et tout, vous avez l’impression de les inventer mais ça fait 30 ans que ça existe !

C’est un grand débat.

Ouais, tu sais une fois je suis tombé sur une pub pour une platine italienne, avec les trucks à 45 degrés, etc. Et après j’ai regardé le marketing d’une marque américaine qui sortait la même la même platine en disant que c’était tout neuf ! En fait j’étais mort de rire parce que la platine elle devait dater des années 1970. Et c’est là que tu dis quand même que effectivement on oublie assez vite notre passé quand même.

C’est clair ! C’est des petits jeunes donc tu les prends pour des petits jeuns.

Walid : Ce que je veux dire, c’est que ce n’est pas pour faire les vieux cons, mais quand moi j’ai commencé à faire du roller par exemple, j’ai commencé à rouler avec les grands de mon époque, à la fin des années 80. Et en fait les gens ils te passent cette culture. Et puis si tu fais le petit con, ils vont te mettre une baffe et ils vont dire : « Vas-y c’est bon attends, il y avait des gens avant toi. » Maintenant il n’y a plus vraiment ça parce qu’à un moment il y a eu une espèce de coupure. Voilà ces sports sont arrivés avec les réseaux sociaux etc. Et il n’y a pas forcément non plus d’anciens qui sont arrivés à l’intérieur pour dire oh les gars attendez il y avait des trucs avant. Donc voilà c’est la situation elle est un peu comme ça maintenant.

Alexandre : Il y avait une transmission d’une génération à l’autre et alors que là finalement le truc il est un peu ressorti ex-Nihilo. Donc t’as pas eu cette transmission qui avant faisait qu’on avait un héritage derrière? Bah parce qu’il n’est pas venu de chez nous.

Vins Isaac : Merci les gars ça me fait plaisir !

Walid : Mais parce que c’est pas venu de chez nous en fait ! C’est un sport qui a été importé d’ailleurs. Alors qu’avant la manière dont on faisait du roller, la manière française, on a notre manière de faire du roller, elle a été transmise de génération en génération parce qu’on roulait tous avec les plus grands, c’est un peu ma théorie.

Vins Isaac : C’est exactement ça, t’as tout résumé quoi. Et que là maintenant c’est que des petits et qu’ils arrivent. C’est reparti avec le derby, ça a été un coup de vent pour le roller. Et quand le derby a fait le tour, hé bien il a fallu remettre un coup, donc il y a eu le halfpipe, le street en quad, mais ils n’ont rien inventé.

Mais bon, après c’est rigolo. Le seul problème c’est que dans le roller, c’est un sport pour les pauvres et on se mélangeait avec tout le monde, que le mec soit riche, que ce soit clochard ou qu’il soit homo ou qu’il ait des palmes ou des grandes oreilles, c’était ça qui nous rapprochait, tu vois ce que je veux te dire. Et quand je vois qu’il y a des secteurs qui se font, tu vois, je trouve ça un peu ridicule. Clivage, pardon, excuse-moi. Je trouve ça très très ridicule. C’est dommage. C’est pas comme ça que tu fais évoluer un sport. Tu vas rester comme ça.

Walid : Moi je disais toujours que le roller c’est la société en modèle réduit…

Qui t’aimerait qu’on interviewe ?

Il faut faire Nel Martin. Ouais, parce qu’il faut faire les gars. En français tu as Diako Diaby, aussi c’est un petit jeune. Il se démerde il s’est transporté au cirque il bosse elle a changé de vie et de travail. C’est fantastique !

Maintenant, c’est ta tribune libre Vins Isaac. Alors à toi de jouer !

Je vous ai donné un truc, au départ, je n’avais pas très envie mais comme je vous sens super cool, je suis assez content. Voilà ma tribune libre.

Alexandre : Je te remercie Vins Isaac pour cet échange intéressant sur ton parcours. Mais aussi sur le marché du roller et les différentes marques que tu as pu animer. Merci à tous pour votre écoute. N’hésitez pas à faire la promotion des podcasts que nous avons réalisés et qui vous plaisent. Ils sont disponibles sur la plupart des plateformes les plus réputées. Faites des likes, faites du partage et vous pouvez aussi faire un don à l’association pour la promouvoir et puis nous permettre de continuer à vous faire des podcasts de qualité.

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Auteur
Alexandre Chartier 'alfathor'

Alexandre Chartier est le fondateur et webmaster de rollerenligne.com. Le site a vu le jour officiellement le 11 décembre 2003 mais l'idée germait déjà depuis 2001. C'est un passionné de roller en général, tant en patin traditionnel qu'en roller en ligne. Il aime le patinage à roulettes sous toutes ses formes et tous ses aspects : histoire, économie, sociologie, évolution technologique... Aspirine et/ou café recommandés si vous abordez l'un de ces sujets !

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