Podcast : Anaëlle Nogueira (2/3)

Par | Publié le 28 mars 2023 | Mis à jour le 1 juillet 2023 | Catégories : le hangar nantes podcast skatepark le Hangar de Nantes anaelle nogueira podcast roller Le Hangar skatepark le hangar | Sous-catégories : Roller agressif | 117
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Second volet du podcast consacré à la rideuse roller street Anaëlle Nogueira. Nous abordons sa carrière professionnelle au skatepark Le Hangar de Nantes…

Anaëlle Nogueira au FSE Montpellier 2022
Anaëlle Nogueira en grab
Roller agressif
Podcast : Anaëlle Nogueira (2/3)
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Seconde partie du podcast consacrée à Anaëlle Nogueira : sa vie professionnelle

Bonjour Anaëlle Nogueira, nous passons à la seconde partie de ton podcast. Comment es-tu arrivée au skatepark Le Hangar de Nantes ?

Anaëlle Nogueira : Mon métier ne se limite pas au Hangar. En effet, je suis employée au skatepark Le Hangar, mais ce n’est pas ma seule activité. Je suis à mon compte et je travaille dans plein de structures et un peu partout en France. J’entraine principalement en roller freestyle. J’ai la chance d’avoir rapidement pu ne faire que du roller freestyle et que du skatepark. C’est cool !

J’ai aussi fait beaucoup de scolaire, mais je préfère rester sur ma spécialité. Au Hangar, c’est un CDI à temps partiel. J’y donne des cours le mardi soir, le mercredi toute la journée et de tems en temps le weekend. Puis des stages pendant les vacances scolaires.

Est-ce que tu as toujours les mêmes personnes en cours ?

Oui, pendant les périodes scolaires où ce sont des cours réguliers à l’année. Mais pas pendant les stages durant les vacances. En parallèle de ça, nous avons aussi depuis la rentrée un club de roller et de trottinette. L’objectif de ce club est de promouvoir le haut niveau. Nous les emmenons en compétition. Ce sont des profils de très bon niveau.

Anaëlle Nogueira au skatepark Le Hangar de Nantes
Anaëlle Nogueira au skatepark Le Hangar de Nantes

Quelle est la fréquence des compétitions en France ? Combien de compétitions fait un jeune dans l’année ?

Tout dépend du fond et des financements ! Quelqu’un qui a un peu d’argent pour faire les déplacements peut faire une dizaine de compétitions dans l’année. C’est souvent les fonds le problème ! (rires).

Les compétitions sont réparties dans toute la France, mais il commence à y en avoir un peu plus dans le sud. Mais aussi en Bretagne, nous venons d’avoir une étape à Quimper, une autre à Strasbourg. Malheureusement, il n’y a pas d’étape à Paris, ni dans le Nord.

Le nombre de personnes qui prennent des cours est-il constant ?

Quand je suis arrivé, les cours étaient presque complets, mais il y en avait moins. Une douzaine de participants. Nous avons ouvert d’autres créneaux. Mais comme nous n’avons pas le budget, nous sommes bloqués. Et comme il n’y a pas d’autres éducateurs, nous sommes malheureusement obligés de dire non et de refuser du monde.

A ton avis, cette demande est-elle représentative pour la France ou est-ce lié à l’endroit et à la façon dont tu entraînes ?

Non, je ne pense pas que cela soit forcément représentatif, mais nous avons fait un constat : là où il y a des équipements, des clubs et de l’encadrement, il y a de la demande. Nous sommes sur un sport qui n’est plus médiatisé depuis de nombreuses années. Le déclin a débuté en 2003-2004, lorsque les X-Games ont cessé de diffuser le roller. Le marché du roller street s’est effrondré. Mais là, ça revient extrêmement bien et en particulier dans les villes où il y a des événements, des clubs et des structures.

C’est rassurant de savoir que quand l’offre est là, la demande suit… Parlons maintenant des World Skate Games. Anaëlle Nogueira, tu as été sélectionnée en équipe de France. Comment cela se passe une sélection ?

Bonne question. Je suis en équipe de France depuis 2016 ou 2017. En général, le sélectionneur appelle et demande si l’on souhaite participer à un stage de sélection (rires). Tu rides, tu reçois un courrier et on t’indiques si tu es sélectionné. Ensuite, c’est reconduit en fonction de tes résultats. Actuellement, je suis championne de France, donc il y a peu de chances que je sorte du collectif pour l’instant, sauf si je fais une bêtise.

Anaëlle Nogueira en unity
Anaëlle Nogueira en unity

Combien êtes-vous en équipe de France de roller street ?

On doit être trois ou quatre filles et six garçons. Les entraînements équipe de France se déroulent de façon très ponctuelle. Le dernier s’est déroulé juste avant les championnats du monde. Ce n’est pas une question de volonté, mais de budget. Nous faire déplacer coûte de l’argent. Malheureusement, nous sommes un peu livrés à nous-mêmes.

Vous ne vous voyez-donc que sur les compétitions ?

Essentiellement, ou alors ponctuellement sur des stages.

Quelle est l’ambiance lors des compétitions ?

L’ambiance en équipe de France de roller street est bonne. Nous nous connaissons depuis des années. Tout le monde est adorable. C’est ce qui fait la richesse de notre sport. D’autre part, sur les compétitions, il n’y a rien à gagner et c’est un peu ce qui fait la beauté de notre sport. Nous nous encourageons mutuellement, nous avons besoin les uns des autres. Bien sûr, il y a des affinités, mais il n’y a pas de rivalité. Nous savons que nous ne sommes pas nombreux et que nous représentons une petite discipline. Dans le football, il y aurait certainement eu des rivalités, vus les enjeux.

Comment se déroule une compétition ?

En général, il y a des qualifications, puis des demi-finales et des finales. Quand il n’y a pas suffisamment de compétiteurs, nous passons des qualifications aux finales. Les formats varient selon les compétitions. Dans les compétitions officielles, nous avons un format de « run », de 45 secondes à 50 secondes dans lequel tu es libre de faire ce que tu veux dans le skatepark. Trois à six juges évaluent ta prestation selon ta prise de risque, ton amplitude, la technicité, l’exploitation du park, le style. Le but est d’être le plus diversifié possible, de ne pas chuter. Nous sommes une discipline « artistique » donc cela reste beaucoup à l’appréciation du juge.

Anaëlle Nogueira en grab
Anaëlle Nogueira en grab

Quand je suis allé voir le Nantes Roller Festival, il y avait la compétition, puis le best trick, la meilleure figure…

Oui, ce sont plutôt des formats spectacles, en plus du format classique de compétition. Ainsi, c’est plus cool pour le public. Et cela rajoute des points, en plus du run (15 points de plus ssur le best trick en plus des 100 points du run).

En roller artistique, les programmes sont très cadrés et millimétrés, c’est pareil en street ?

Tout ce qui est strict n’existe pas chez nous, c’est totalement libre en freestyle, par définition. Tu t’exprimes avec tes rollers aux pieds, tu peux faire un poirier, mettre tes mains au sol, il n’y a aucune limite de style. Certains tricks sont plus stylés que d’autres, certains sont connus et nommés, mais chacun aura sa façon de se positionner.

Racontes-nous une grosse compétition qui t’a marquée Anaëlle Nogueira…

Je parlerais du FISE World Montpellier de l’année dernière. C’était la première fois que j’avais la chance d’aller sur une grande compétition avec mon coach. C’est un ami avant tout, qui entraîne dans une autre discipline que le roller. C’est une richesse, il ne pratique pas mon sport. Il m’amène beaucoup au plan mental. J’ai débranché ma cervelle, je lui ai fait confiance à 100% et cela a tout changé. Je n’aurai jamais fini seconde sans lui !

Une rideuse lors des qualifications pro sur le FISE Montpellier 2022
Une rideuse lors des qualifications pro sur le FISE Montpellier 2022 – photo : Bastien Seon

Et tes runs Anaëlle Nogueira, sont-ils improvisés sur ce type de compétition ?

Non, pas du tout. Déjà, nous disposons souvent des plans du skatepark avant l’événement. Nous réfléchissons donc aux figures que nous allons faire avant la compétition. En effet, nous connaissons les modules FISE depuis des années et nous savons donc quelles figures nous pouvons faire dessus. Avant de partir, j’étudie la question avec mon entraîneur pour construire le run de 50 secondes. Il faut évaluer quelles figures on peut rentrer dans ce délai.

Au moment où je m’élance, je sais exactement ce que je dois faire. Et quand je réalise un trick, je suis déjà en train de réfléchir au suivant. Et si je roule sans tomber, dans ma tête, j’ai gagné. En fait, on ne roule pas pour contre les autres, en tous cas pour moi, je roule pour faire ce que j’ai envie de faire. Si j’ai plaqué tout mon run, je me fiche du classement final. Je ne prends pas le risque de modifier mon run, car je pourrais tomber. Après, c’est sûr que pendant les qualifications, il est intéressant de voir ce qu’il y a en face. Je ne regarde pas forcément ce que les autres font, je me concentre sur mon run.

En revanche, mon coach regarde et me dit ce qu’il serait intéressant de modifier pour aller grapiller quelques points. Il apporte un soutien psychologique indispensable. Je vois désormais mon métier différemment, parce que j’emmène des jeunes en compétition. Je travaille beaucoup sur cet aspect psychologique, j’essaie de rentrer dans leur tête. Notre sport est essentiellement mental.

Le mental est dur à avoir quand on est tout seul. Rares sont les athlètes à avoir un coach et les meilleurs sont ceux qui ont le meilleur mental.

Tu préfères faire la compétition toi-même ou encadrer les jeunes que tu entraînes en compétition ?

C’est exactement la même intensité. S’ils plaquent tous leurs runs, c’est comme si moi je le faisais. Même chose à l’entrainement, quand vous avez passé trois semaines à leur apprendre une figure et qu’ils la réussissent. Même une petite fille qui descend une courbe, j’ai l’impression que c’est moi !

La mentalité dans le monde du roller street a beaucoup évolué. Aujourd’hui, Anaëlle Nogueira, l’approche me semble plus sportive qu’auparavant.

C’est tout à fait vrai. Il y a cependant plein de façons de voir notre sport. De nombreux riders vont en session avec leur bière et s’en fichent. Et il y a aussi toute une partie des pros où avant c’était à la mode d’être à la cool, d’aller en soirée et de faire ses finales après avoir dormi deux heures. Aujourd’hui, cela se fait un peu moins. Les jeunes font plus attention à leurs performances et à leur corps. D’autres vont en compétition pour s’amuser, se retrouver entre potes. On est aussi contents de se voir, de faire la fête. Ce côté fête existe toujours mais aujourd’hui, personne n’en veut à un athlète qui va se coucher tôt.

Anaëlle Nogueira au skatepark Le Hangar de Nantes
Anaëlle Nogueira au skatepark Le Hangar de Nantes

La technique a évolué aussi, auparavant, les gros tricks aériens avaient l’avantage sur les slides, aujourd’hui, c’est un peu l’inverse. Qu’en penses-tu ?

Des riders comme Roman Abrate sont aussi techniques en slide qu’en tricks aériens. Il fait partie des seuls riders de la dernière génération qui fait l’effort d’aller inventer ou faire des tricks aériens issus du ski freestyle par exemple; Il amène les jeunes vers des doubles rotations et c’est aussi pour ça qu’il est connu. Il pousse les limites du sport. Il est aussi très bon en slide.

Je ne pense pas que le slide et les rotations soient des spécialités différentes. L’un n’empêche pas l’autre. C’est un sport très libre. J’adore la technique de slide, je fais beaucoup de courbes, mais les rails m’amusent un peu moins.

On a tordu les pieds dans à peu près tous les sens, comment vois-tu l’évolution de la technique dans le futur ?

Déjà, il faudrait que l’on soit un peu plus nombreux. Car tant que nous ne serons pas assez nombreux, il n’y aura pas d’intérêt à augmenter le niveau en compétition. Avec plus de concurrence, comme en trottinette, le niveau est tiré vers le haut. En effet, les meilleurs sont des monstres de technique avec des figures inhumaines. Ce n’est pas qu’ils sont plus forts, mais il faut se distinguer dans le nombre.

On verra certainement moins ce que l’on a vu il y a 10 ou 15 ans dans les vidéos. Je pense à ces gars qui montaient faisaient un trick avec 50 mètres de vide à côté. C’était peu technique, mais une dinguerie parce que s’ils se rataient, ils pouvaient en mourir.

Désormais, nous allons plutôt vers des tricks hyper techniques avec des enchaînements de slides et de rotations presque plus humains. On verra cependant moins cela en compétition car c’est trop risqué en technique. Cela se tentera plutôt en best trick.

Anaëlle Nogueira, est-ce que tu vois des riders relativement âgés qui continuent de rouler ?

Oui, il y en a en roller au skatepark Le Hangar, mais aussi en BMX. Je pense à deux gars qui ont la quarantaine. Ils sont un peu limités d’ailleurs parce qu’ils touchent le plafond quand ils rident dans la big au Hangar. Parmi les gens du roller, Roman a 35 ans. Ce n’est pas vieux, mais ça commence à faire dans le street. Des anciens qui ont arrêté et qui reviennent, je pense à Stéphane Alfano.

Comment on aborde le roller street en prenant de l’âge ?

Perso, je n’ai jamais été aussi au top que maintenant. Je n’ai pas l’impression que 30 ans ce soit vieux. Mais, bon, jene bois pas, je ne fume pas. J’ai toujours faitbeaucoup de sport. Je n’ai pas l’impression que la vieillesse me touche. Je n’imagine pas arrêter le roller un jour !

Il n’y a pas d’âge ! Il y ajuste l’âge où tu arrêtes parce que tu as d’autres priorités dans ta vie. Il n’y a pas beaucoup de trentenaires dans mon milieu. Souvent, c’est quand tu temaries et que tu as des enfants que c’est le coup de grâce. Et nous restons une minorité à pouvoir en vivre.

Oui, et pour les femmes, les études supérieures marquent souvent un point d’arrêt…

Oui ! Je le vois avec les jeunes, dès qu’ils ou elles passent du collège au lycée. S’ils ont un cursus difficile comme médecine, cela devient plus compliqué de venir au skatepark tous les jours.

Cela m’offre une bonne transition avec les initiatives comme le label Girls Welcome, pour favoriser la pratique des femmes. Comment vous l’avez vécue en tant que participantes ?

Bein, c’est cool ! Cela a amené un peu de prise de conscience chez les organisateurs. Personne ne pensait à mal en ne mettant pas de catégorie pour les femmes. Ils ne se rendaient pas compte que des jeunes avaient envie de participer et d’être motivés par une catégorie spécifique. C’est bien que la fédération les mette en avant. Cela a été un bon coup de boost pour au moins se poser la question de cette catégorie pour les femmes.

Maintenant que la catégorie est en place depuis environ 2015, comment c’est installé aujourd’hui ? C’est passé dans les moeurs ?

Oui, en fait, aujourd’hui, il ya même trois catégories avec les pros, les amatrices et les moins de 14 ans. Les règles sont les mêmes que pour les garçons, notamment à Nantes où nous avonsbeaucoup de filles sur les compétitions.

Rendez-vous bientôt pour le troisième volet de l’interview où Anaëlle Nogueira nous expliquera l’organisation du Nantes Roller Festival !

Pour aller plus loin

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Voir la page Balado Roller

Auteur

Alexandre Chartier

''alfathor''

Alexandre est le fondateur et webmaster de rollerenligne.com depuis 2003. C'est un passionné de roller en général, tant en patin traditionnel qu'en roller en ligne. Il aime le patinage à roulettes sous tous ses aspects : histoire, économie, sociologie, évolution technologique... Aspirine et/ou café recommandés si vous abordez un de ces sujets !

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