Pourquoi le patin à essieux évince les roues alignées au 19e siècle

Par | Publié le 28 octobre 2022 | Mis à jour le 12 janvier 2023 | Catégories : Toutes | Sous-catégories : Histoire du roller | 353
| Tags : patins traditionnels roller en ligne patins à essieux patins à roues alignés histoire roller

Vous êtes vous déjà demandés pourquoi les patins traditionnels avaient à ce point supplantés les patins à roues alignées à la fin du 19e siècle ? C’est le genre de questions auxquelles l’équipe de REL adore chercher des réponses…

premiers patins plimpton

Le patin traditionnel à essieux éclipse le patin à roues alignées en quelques années

Quad ou inline ? Il est parfois difficile de choisir, même encore aujourd’hui ! La question se pose sans doute depuis l’invention du patin traditionnel à essieux directionnels par l’américain James Leonard Plimpton en 1863. En effet, en diffusant ses modèles à travers le monde, Plimpton fut sans doute à l’origine d’une des plus grandes modes du patinage à roulettes de l’histoire. A tel point que le patin à roues alignées, né plus d’un siècle auparavant dans l’esprit de Jean Joseph Merlin, s’effaça durablement du devant de la scène. Il ne disparut pas pour autant mais force est de constater qu’il n’avait plus les faveurs du grand public.

Prototype de patin de James Leonard Plimpton en 1860
Prototype de patin de James Leonard Plimpton en 1860

Comment expliquer le recul du patinage en ligne et l’essor des patins traditionnel à essieux ?

Selon nous, la raison du déclin du patinage en ligne à la fin du 19e siècle est multifactorielle. Précisons ici que nous ne ferons qu’émettre des hypothèses qu’il vous reviendra de discuter et de contre-argumenter. Diverses raisons techniques et technologiques se conjuguent.

Le manque de maintien latéral des patins à roues alignées

Tout d’abord, un patin en ligne est conçu dans l’esprit d’un patin à glace, à savoir avec des roues assez fines positionnées en une rangée. Mais contrairement à une lame de glace qui peut être relativement basse sous la chaussure, un patin en ligne nécessite un diamètre de roue suffisant pour passer les obstacles. Il faut donc augmenter la taille des roues et rehausser la plateforme. Et par conséquent, augmenter la hauteur du centre de gravité. Lorsque le patin est plus haut, la cheville travaille davantage latéralement. Il faut donc accroître le maintien latéral. Or, à l’époque, hormis avec les systèmes d’éclisses tels qu’inventés par Garcin (ci-dessous), les patins manquaient terriblement de soutien à la cheville.

Le patin à éclisses de Garcin en 1828
Le patin à éclisses de Garcin en 1828

Des matériaux inadaptés à la glisse

D’autre part, même si vous résolviez le problème de la tenue de cheville, il restait un inconvénient de taille : le confort de glisse et l’adhérence au sol. En effet, la plupart des patins de cette période se composaient de cuir pour la tige, de bois et/ou de métal pour le plateforme et les roues. Leurs roues adhéraient mal sur le sol et les chutes étaient donc fréquentes. De plus, il s’avérait également difficile de tourner. Bref, les patins à roues alignés du 19e siècles étaient bien loin de ceux d’aujourd’hui en termes de matériaux, même si leur design restait assez similaire.

Les patins traditionnels : plus sécurisants et plus accessibles à l’époque

Ces inconvénients ouvrir naturellement la voie aux patins traditionnels. la répartition des roues en « carré » apportait la stabilité qui manquait aux patins en ligne. Les essieux, quant à eux, facilitaient la prise de virage, tout en gardant l’ensemble des roues au sol. Ensuite, la surface des roues, plus larges, offrait une meilleure adhérence au sol. Enfin, cette fameuse répartition des roues en carré ne sollicitait pas la cheville latéralement comme pouvait le faire les patins à roues alignés. Ainsi, les patins traditionnels firent la différence par leur simplicité d’utilisation.

Un patin en ligne et un patin traditionnel côte à côte
Un patin en ligne avec des roues en bois et un patin traditionnel JPB Jr côte à côte

L’arrivée du patin traditionnel signifie-t-elle pour autant la mort du patin en ligne ?

Les multiples perfectionnements du patin traditionnel signifiaient-t-il pour autant la fin du patin à roues alignées ? Pas tout à fait. Si le patin à essieux a largement dominé les skating rinks pendant plusieurs décennies, son prédécesseur en ligne a tout de même perduré. Les patineurs à glace restaient sans doute ses principaux utilisateurs, ne serait-ce que pour retrouver la sensation de la « lame ». Des fabricants comme JPB Jr (Allemagne) proposaient indistinctement des modèles dans les deux configurations.

L’analyse des dépôts de brevets confirme cette tendance. Environ 400 brevets de patins à roulettes furent déposés entre 1860 et 1884 aux Etats-Unis. Sur 134 brevets analysés :

  • 3 portaient sur des roues
  • 4 concernaient des patins convertibles
  • 5 des patins cycles
  • 5 avec les roues réparties en triangle
  • 19 des modèles hybrides entre patins traditionnel et patin en ligne, avec par exemple des roues réparties en losange
  • 21 des patins à roues alignés
  • 77 des patins à essieux
Répartition des brevets par type de patin sur la période 1860 – 1884

Notons au passage que la dichotomie quad/inline n’était pas aussi prononcée durant cette période. Les inventeurs tentaient de multiples expériences de répartition des roues afin de trouver une configuration idéale : en losange, en triangle, à une deux, trois, quatre, cinq, voire six roues ou même davantage.

Quelles innovations technologiques permirent au patin à roues alignées de revenir sur le devant de la scène ?

Dans les années 1960, survirent les premiers dépôts pour des patins à roulettes réalisés à base de matière plastique. Puis, dans les années 1980-1990, la création de l’uréthane puis du polyuréthane redonnèrent un nouvel élan au « roller ». Ces matériaux accompagnèrent la mode du roller dans les années 1990-2000.

Le roller « quad » ou patin traditionnel à essieux en embuscade

Puis, le quad revint sur le devant de la scène dans les années 1970 avec le phénomène disco, ensuite avec la pratique du roller derby à partir de 2009 et avec la roller dance durant les confinements… A chaque époque, les deux types de patins coexistent, avec l’un ou l’autre sur le devant de la scène.

Choisir ses patins à roulettes traditionnels
Des patins à roulettes traditionnels à essieux

Pour aller plus loin

La fiche de Plimpton sur Wikipedia

Auteur

Alexandre Chartier

''alfathor''

Alexandre est le fondateur et webmaster de rollerenligne.com depuis 2003. C'est un passionné de roller en général, tant en patin traditionnel qu'en roller en ligne. Il aime le patinage à roulettes sous tous ses aspects : histoire, économie, sociologie, évolution technologique... Aspirine et/ou café recommandés si vous abordez un de ces sujets !

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