1997-2003 : la grande épopée de l’équipe Salomon

Par | Publié le 17 septembre 2020 | Mis à jour le 22 août 2022 | Catégories : Roller course | Sous-catégories : Histoire du roller Histoire du roller | 1724
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En 1997, l’équipe Internationale de roller course Salomon prenait le départ des grandes courses de roller Européennes et mondiales. Christophe Audoire, entraîneur international, a œuvré à la construction de cette équipe légendaire et en devient le manager jusqu’en 2002. Dans ce documentaire de 45 minutes, il retrace les grands moments de l’aventure Salomon…

Histoire de l'équipe internationale Salomon

L’histoire de l’équipe de roller course internationale de Salomon

Ce documentaire revient sur l’histoire du team Salomon ou équipe Salomon. Il survole aussi plus largement les grandes années des équipes pros sur le circuit de la Coupe du Monde. Avec Ligne Droite Roller, nous vous dévoilerons des documents inédits et partageront de nombreuses anecdotes. Il a été réalisé en collaboration entre Christophe Audoire et rollerenligne.com. L’équipe Salomon a marqué l’histoire du roller course.

Interview de Christophe Audoire, ancien manager de l’équipe Salomn

Christophe Audoire (à droite) et Alexandre Chartier (à gauche)
Alexandre Chartier et Christophe Audoire

Bonjour Christophe. Nous sommes ravis de pouvoir revenir sur la grande histoire de l’équipe Salomon Internationale avec toi !

Bonjour Alexandre. Enchanté de parler avec vous des grandes années Salomon ! C’était une expérience fantastique pour moi pendant une période d’environ dix années dont cinq années très très intenses.

Comment l’aventure de l’équipe Salomon a-t-elle démarré ?

L’équipe Salomon débute en 1997. Cependant, de petites graines ont été plantées quelques années auparavant, dès la création de Ligne Droite. Ligne droite avait déjà deux ans et on avait déjà une petite équipe. Elle se composait notamment d’Arnaud Gicquel (Champion du Monde) avec qui on a fondé Ligne Droite… et puis un petit jeune qui apparaît dans les sponsorisés, un certain Pascal Briand (Champion d’Europe Junior). L’équipe grossit progressivement. Deux ans plus tard, nous sommes sollicités par Ultimate, une des marques distribuées par Ligne Droite.

Nous courons par exemple sur le marathon roller de Mannheim (Allemagne). Il regroupe 1000 à 2000 patineurs. Les coureurs font 1er, 2e et 3e !
Durant l’été je suis contacté par la marque Kryptonics qui veut faire une tournée aux Etats-Unis et on cherche à monter une équipe. On y retrouve Pascal Briand, Arnaud Gicquel et d’autres coureurs français.

Nous prenons par exemple le départ de la course à Downers Grove (Illinois). C’était une des premières grandes courses avec des équipes professionnelles comme Rollerblade ou Hyper. Nous sommes tout proches de ce qui deviendra l’équipe Salomon.

1996 - l'équipe roller course Ultimate
Equipe Ultimate sur le podium

A quel moment l’équipe Salomon s’est-elle concrétisée ?

Dans le courant de l’année 1997, je trouve le partenaire INA qui fabrique des roulements et veut se faire connaître sur le marché du roller inline.
Nous faisons une belle rencontre chez Salomon avec Emmanuel Joumard. Il est alors responsable du inline. Leur marque n’est pas encore sortie, ils n’ont pas d’équipe. C’est ainsi que démarre tranquillement l’équipe INA / Salomon.

A l’époque, il y a Pascal Briand, Franck Cardin, Tristan Loy… les trois mousquetaires de base de l’équipe mais aussi Christophe Evart qui travaille chez Ligne Droite. Chez les femmes, l’équipe se compose de Caroline Jean, Caroline Lagrée et d’une jeune espoir plusieurs fois Championne d’Europe Junior : Stéphanie Orsonneau. En 1998, l’équipe va s’étoffer avec Olivier Babonneau (FRA), Fabio Marangoni (ITA).

Nous avons d’autres partenaires comme Mogema, Dobby (des chaussures françaises faites à Paris), Ultimate (châssis et roues). Dès le début, le code couleur a toujours été le jaune et noir.

1997 - l'équipe INA Salomon
Equipe INA Salomon

Quelles sont les principales courses auxquelles vous participiez avec le team Salomon ?

Très rapidement, nous nous engageons dans la Swiss Inline Cup, dès les premières éditions. Caroline Lagrée et Caroline Jean font des super courses en Suisse. Puis viennent les premières courses pros en 1998, comme le marathon roller de Berlin que Pascal gagne.

Arrivent les partenaires comme Hyper pour les roues, SKF pour les roulements qui remplace INA, Cébé pour les lunettes et puis un petit logo discret mais néanmoins important : Volkswagen !

Un partenaire automobile, c’est une chose incroyable quand on y pense dans le roller, surtout 20 ans après !

Oui, c’est incroyable parce qu’on découvre des véhicules mis à disposition et c’est marqué en gros dessus « Equipe Salomon ». C’est la première fois qu’on a cette sensation d’être regardés, ça change ! Au début nous n’étions pas à l’aise. Et puis nous nous sommes habitués. Ensuite, c’est devenu une habitude faire des photos, de répondre aux interviews…

On rêvait tous de faire comme les équipes pros de cyclisme, et on se dit « ça y est, on est parti sur le circuit » ! Petit à petit, on devient vraiment pros à 100%. J’arrête Ligne Droite. Je me consacre à 100% à l’équipe pour toutes ces grandes courses avec Salomon.

Les véhicules de l'équipe roller de Salomon en 1998
Les véhicules de l’équipe Salomon fournis par Volkswagen

En 1998/1999, les tenues évoluent. Désormais le gros logo Salomon Inline occupe l’essentiel de la tenue avec SKF, Cébé.

Tout petit on se disait : ça serait génial si on pouvait avoir un sport connu et reconnu… et là ça commence. les médias en parlent, même à la télévision. Il n’y a pas une semaine sans qu’un magazine fasse un article sur le roller inline et ça va s’accentuer de plus en plus.

Début, j’ai eu la volonté d’avoir une démarche professionnelle, même pour la petite équipe Ligne Droite. Nous avions mis en place des contrats avec des clauses précises sur ce qui fallait faire et ne pas faire : bien se présenter, respecter les adversaires…

Salomon nous a fait vivre des choses incroyables. Elle nous a donné les moyens de voyager. C’était les premiers déplacements internationaux en Europe. Vont venir très rapidement les Etats-Unis. Le rêve !

L’époque Salomon et les sponsors mettent vraiment des moyens sur la table, ça va s’accentuer avec le marché du roller florissant. Ils se vend des millions de paires par an dans le monde, et donc il y a besoin de communiquer, d’avoir des équipes.

Salomon a toujours eu cette culture des équipes. Ils avaient aussi des champions de ski qui testaient et développaient les produits, promotionnaient. Nous rentrons tout à fait dans cette lignée-là. Nous avons cette âme, surtout avec Pascal briand.

Vous développez donc les produits utilisés par les patineurs du team Salomon et vendus par la marque ?

Oui, nous développons des châssis par exemple. Très rapidement Salomon nous demande de tester les produits qui vont sortir deux ans plus tard. Tous les châssis. Tout passe par les pieds des patineurs. Nous allons tester plein de choses. Certaines sont écartées. D’autres sont améliorées.

Salomon fait les tests de manière très scientifique avec un produit qui est décliné en cinquante versions, différentes modifications mineures à tester chacune séparément.

Une des plus grandes choses que j’ai découvert est la qualité des châssis. Nous avions l’habitude de considérer les chaussures comme l’élément majeur avec les roues. Le châssis était seulement vu comme un élément qui fait tenir les deux ensemble. Salomon, avec sa culture du ski, nous a aidé à comprendre que l’énergie du pied passer passe par la structure du châssis pour arriver à la roue. Nous découvrons des choses incroyables sur les châssis en arche, les renforts, les torsions.

Après être passés par l’équipe, les produits passaient dans des tests « fitness » avec patineurs plus grand public qui n’avaient pas la même puissance ni le même type de patinage. Il y a vraiment eu des échanges entre la culture du ski et du roller, comme le laçage rapide « quick lace ». C’était vraiment des patins très aboutis. Je vois régulièrement chez Ligne Droite des gens qui viennent avec leurs défunts roller Salomon, presque la larme à l’oeil, même 20 ans plus tard :

 » Mes rollers Salomon sont morts ! Il faut que je les change, mais ils sont tellement biens ! « 

Salomon faisait vraiment de super patins grâce à son équipe…

« Salomon a vraiment créé une avancée et a aussi boosté les autres marques, Salomon les as poussées à innover, à travailler sur la qualité. Il se faisait de très bons patins dans d’autres marques mais Salomon venait avec ce petit plus. »

Salomon, contrairement à d’autres marques, a fait le choix dès le début de la création de ses produits de s’orienter vers le milieu et le haut de gamme, parce que dès qu’on baisse en terme de prix, rapidement, on ne peut plus mettre ce qu’il faut comme qualité en aluminium, en matelassage. Eux disaient : « on propose des bons patins pour le sport. »

Très rapidement, la culture et la communication s’axent sur « inline is a sport »

« Le roller, c’est un sport ».

Ce n’est pas un jouet d’enfant.

Equipe Salomon 1999
L’équipe Salomon en ligne sur une carte postale

Parles-nous de l’année suivante : 1999

Arrivent encore d’autres coureurs. Nous allons renforcer l’équipe avec une orientation très longue distance. L’effectif est d’une dizaine de patineurs avec Pascal Briand (FRA), Franck Cardin (FRA), Juan Carlos Betancour (COL), Tristan Loy (FRA), Juan Carlos va prendre une importance vraiment très importante dans l’équipe Salomon. Il va apporter quelque chose de joyeux et en même temps de très pro, très carré. Nous l’avons fait venir dans l’hiver pour qu’il puisse s’acclimater, pour qu’il découvre la vie en France.

Nous louons très rapidement une maison où tous les coureurs sont logés ensemble. 

Un autre fondeur vient renforcer l’équipe : Cédric Michaud. C’est un gros rouleur. Il y a des jeunes comme Mickaël Lannezval qui est champion de France de fond. Pareil, un très gros rouleur.

Quelles format souhaitiez-vous voir ce développer ?

Nous militions pour des courses de 80 km, 100 km, des courses sur route, par étape, comme en cyclisme. Notre objectif, était d’aller vers les courses cyclistes avec des grandes étapes, pas des petits circuits. Malheureusement c’est un petit peu le chemin inverse qui a été choisi : des courses faciles
à organiser sur un petit circuit.

L’année 1999 a été un tournant : en 1999, l’équipe gagne la Coupe d’Europe. Nous misons sur Pascal, le leader, pour gagner la Coupe d’Europe. Et d’étape en étape, vient la grande finale à Rennes. Pascal gagne la première coupe d’Europe qui n’était pas encore la Coupe du Monde.

Vient l’année 2000…

L’équipe progresse. En 2000, nous avons une autre belle tenue. C’est devenu la « World Team » avec toujours Volkswagen en partenaire. On voit apparaître le Inline World Tour, la transition entre la Coupe d’Europe et la Coupe du Monde. Là on se dit :

« ça y est, le sport décolle. On va vivre quelque chose de génial. « 

A l’origine, l’année d’avant, j’ai suscité une réunion pour rassembler toutes les équipes, les organisateurs, les sponsors afin de créer quelque chose, un circuit international. Iguana était présent avec Coni Altherr. Ils ont trouvé que c’était une excellente idée. Cette initiative est devenue la Coupe d’Europe puis progressivement la Coupe du monde.

Quand s’est créée la Coupe du Monde, on m’a dit :

« Dis donc Christophe, ce serait bien de travailler sur un règlement. »

J’ai travaillé sur le règlement de la Coupe du Monde pendant un mois, durant l’hiver, avec également le cahier des charges. Je suis toujours le manager de Salomon mais j’essaie de contribuer : comment organiser, comment structurer les équipes, tout ce qu’il faut pour faire tourner une belle Coupe du Monde.

Marathon roller du Val d'Oise en 2000
Benoit Perthuis, Arnaud Gicquel, Pascal Briand

Vous voyagez beaucoup !

Oui, on fait vraiment des très belles courses : Engadin dans toute la vallée de Saint-Moritz avec l’hélicoptère qui survole le peloton, les grands marathons comme Berlin… On a de superbes courses en direct avec ESPN aux Etats-Unis à Orlando, juste à côté de Disneyland, dans le parc Universal Studio. C’était super pro avec de belles productions.

 » On est sur la route 200 jours par an, entre les stages, l’équipe Salomon, l’équipe de France. C’est la vie de professionnel. On vit pour notre sport, notre passion et on a les moyens de le faire. « 

Un autre moment fort de cette période est le record de l’heure de Tristan Loy en 2001…

Photo du record de l'heure de Tristan Loy
Tristan Loy pendant son record de l’heure en roller

Oui, le record de l’heure aussi est un souvenir fabuleux, sur l’anneau de Grenoble. On a mis au point un patin « clap » qui ressemble aux patins à glace. Pour ceux qui n’ont pas connus, c’était comme les patins à glace qui s’ouvrent. Le talon se désolidarise de la platine cinq roues. Cela a été une toute petite parenthèse. Cela ne nous aidait pas vraiment à aller plus vite. Il fallait plutôt de plus grosses roues.

Avec Tristan c’était vraiment génial. On avait bien préparé le record avec prise de lactate, analyse des pulsations. On savait exactement à quelle vitesse rouler. Je me souviens que je me déplaçais sur la piste pour lui montrer l’avance qu’il avait sur le record du Monde.

Et puis au bout d’un moment, il a pris un quart de tour d’avance, un demi tour, trois quarts de tour. Dans le dernier quart d’heure, Tristan est dans la souffrance. Je me souviens de ces regards échangés :

« On va le faire, on va y arriver. »

Et petit à petit, il met 400 m et établit le record du monde de l’heure de l’époque.

On voit que Salomon communique sur l’équipe internationale mais aussi sur des équipes nationales…

Oui, très rapidement Salomon va décliner une équipe dans chaque grand pays où la marque est distribuée. Cette équipe nationale n’a pas tout à fait la même tenue. Ils sont en rouge/jaune au lieu de noir/jaune. Ces équipes sont un vivier potentiel pour l’équipe internationale. Cela permet aussi de communiquer au niveau local. Il faut des héros au niveau local. L’équipe se déplace beaucoup. Elle peut pas être dans tous les pays en même temps.

Il y a des ambassadeurs, des experts comme Eddy Matzger aux Etats-Unis, Elisabeth Schrenk en Autriche qui va rejoindre l’équipe internationale. Sébastien Baumgartner qui est toujours très actif dans le roller.

J’ai un super souvenir avec Eddy et Sébastien : nous faisons une vidéo Salomon dans ces années-là.

Ah oui ! La fameuse K7 puis le DVD « Destination Speed » ! Une référence…

DVD Destination Speed
Le DVD Salomon

Oui, avec Pascal, Salomon propose de faire une vidéo technique. J’ai passé tout un hiver à la préparer, à planifier les tournages. Cette vidéo a été fantastique. Elle a été vue et dupliquée en dizaines de milliers d’exemplaires dans le monde, avec ma voix en anglais faite par Eddy et en allemand par Sébastien. Je sais qu’elle a aussi a été traduite dans d’autres langues par des personnes qui ont doublé par dessus ma voix.

Elle a servi à beaucoup de patineurs à apprendre des petites gestes techniques. Les bases…

C’était l’objectif : A travers des champions, de présenter la technique et donner envie d’aller plus loin.

Vous aviez aussi une belle équipe à ce moment-là…

Oui, avec Pier Davide Romani (ITA), Luca Presti (ITA), le petit frère du grand Massimiliano Presti et l’arrivée aussi d’une équipe féminine parce que jusqu’à présent, il y avait Caroline qui était un petit peu esseulée. La volonté a été de signer un contrat avec Andrea Haritchelar (ARG), championne du Monde. Puis Nathalie Barbotin a rejoint l’équipe. Il y avait un objectif très clair pour chacune : Pour Nathalie : gagner la Swiss Inline Cup et pour Andrea, gagner la World Inline Cup. Elles ont rempli leur mission.

Chez les garçons, Mickaël Lannezval est toujours là, Benoît Perthuis est venu renforcer l’équipe. C’est également un fondeur. Il y a besoin d’équipiers, les courses sont très structurées, avec des équipes très fortes. Il faut une structure pour emmener Pascal, principalement, pour qu’il puisse placer son sprint, sa pointe de vitesse sur les 200 derniers mètres. Et pour ça il faut contrôler la course. Il ne faut pas qu’il y ait des échappées où il faudrait remonter. Chacun a son rôle : il y a les capitaines, les défenseurs… On parle beaucoup de tactique, comme au football.

Ensuite, nous passons Volkswagen à Saab, pour devenir l’équipe Saab/Salomon.

Comment se font les opportunités avec les grandes marques comme celles-ci ?

Les marques de roller cherchaient à passer le relais à d’autres grandes marques, comme dans les équipes cyclistes. Ce ne sont pas les marques de vélo qui sont mises en avant, mais de plus grosses marques, plus grand public : le principal partenaire est équipé par Salomon. C’est l’équipe Saab équipée par Salomon.

D’autres gros sponsors se joignent à l’équipe avec Powerbar, Polar…

Comment attire-vous de grandes marques comme celles-ci ?

Le roller est très présent. Ce sont les marques qui viennent au roller. Elles viennent en disant :  » On voudrait s’associer à cette image-là. »
Nous sommes allés en Suède avec l’équipe par exemple, pour faire le grand lancement mondial de la voiture de cette année-là, avec tous les médias. L’équipe faisait une démonstration avec les voitures. L’image des patineurs étaient utilisée dans la publicité.

J’ai souvenir de l’émission  » Envoyé Spécial «  qui est venue filmer en Suisse avec les équipes Rollerblade et Salomon. On peut présenter notre sport. L’impact de la télévision est fabuleux. Le weekend suivant, on prend l’avion à Nantes, comme presque tous les weekends de compétition. L’équipe porte toujours les tenues Salomon et les gens disent : « Ah, c’était vous à la télé ! «  et là on se dit :  » Ouaouh ! «  Malheureusement, il a manqué le petit truc qui fait que ça explose. ça n’a pas continué. C’était en 2000 / 2001 et on commençait à sentir un léger frémissement, que cela pouvait peut-être redescendre…

Salomon - inline is a sport
Le finish impressionnant de Michael Lannezval devant le Colombien Jorge Botero

Au niveau sportif, c’est pourtant le renouveau après deux années de remise en question…

On est toujours très actif. L’équipe est revenue au tout premier plan après un passage difficile au niveau des résultats.. Cela a été une des plus grandes années. L’équipe a un deuxième capitaine, un deuxième leader qui vient renforcer Pascal, avec différentes possibilités pour gagner. Il s’agit de Massimiliano Presti.

Cela a été difficile de le faire venir. Il courait avec Chad Hedricks, plutôt aux Etats-Unis. Massi amène quelque chose et l’équipe prend davantage corps. Elle se fédèrent autour Pascal et Massi. Chacun a son rôle. Nous sommes de plus plus pointus et plus adapté à ce type de course courte. L’équipe qu’on avait forgé pour de longues distances a dû être revue, ça a été un crève coeur. On a été obligé de se séparer d’anciens coureurs qui n’avaient malheureusement plus le profil pour ce type de courses.
Cela a été des moments difficiles, parce que c’est toujours bien quand tout va bien et qu’on accueille du monde mais c’est plus dur quand il faut se séparer des coureurs.

« Dans ces moments où la performance n’était plus là, Il y a des remises en question. Pourquoi on ne gagne plus ? Pourquoi les autres sont plus forts ? « 

Finalement, la structuration succède à la remise en question

Et puis on restructure l’équipe. Deux à trois ans avant, en tant que manager, j’avais tiré la sonnette d’alarme en disant : Attention, si on part vers ce type de course où c’est très court, ça ne dure qu’une heure, les courses vont très vite, elles sont faciles, ça se joue dans les deux derniers kilomètres. Ce ne sont plus tout à fait les mêmes coureurs. Il faut des coureurs capables de rouler à 50 km/h et non plus tenir 40 km/h de moyenne sur longtemps.

Je me souviens de Massimiliano, lors des premiers entraînements en Sardaigne, on teste les sprints et il patine à 70 km/h derrière la voiture ! Coffre ouvert.
On a une équipe pro, une équipe qui se comprend au millième de seconde. On répète beaucoup ce qui va être fait et donc ça s’enclenche très vite. La première course de la saison, ils font 1,2, 3, 4 !

2002 : Salomon en Sardaigne
L’équipe Salomon à l’entraînement en Sardaigne

C’est un peu le duel au sommet avec Rollerblade…

Oui, Rollerblade a mené les deux années d’avant. Ils avaient pris l’ascendant sur la Coupe du Monde. Alors on a travaillé sur un châssis 5×84 mm et c’est énorme. On a l’impression que 84 mm, on n’arrivera jamais à les emmener. Vingt ans plus tard, avec les 125, on en rigole !

« On teste et on se dit : ça va vraiment vite ! « 

Pour garder l’avantage, on utilise un châssis marqué 5×80 mm, on gratte le 84 mm sur toutes les roues et les coureurs courent en 5×84 mm. Il n’y avait pas de limite dans le réglement.

Et tout le monde se dit :  » Ils sont forts ! « . Après les courses, on enlève les roues de 84 mm parce que les autres ont des doutes et regardent. On remet les roues de 80 mm et les coureurs disent :  » Tu vois, c’est des roues de 80 ! « 
Le stratagème dure deux mois et demi environ avant que les concurrents comprennent. On a fait un bon coup, on est content ! Les autres essaient de mettre les roues de 84 sur des châssis 80 mm … mais ça ne passe pas ! Il faut limer les ponts avant la course. Et petit à petit, tout le monde est passé en 84 mm. 

Il y avait l’équipe féminine également !

Oui, c’est important car 50% des pratiquantes roller sont des femmes. Donc il fallait communiquer dans ce sens. Elisabeth Schrenk a été une super équipière, tout comme Caroline Lagrée qui était dans ses dernières années de patinage. Nathalie Barbotin, quant à elle, était en pleine progression : championne d’Europe, 3e aux Championnats du Monde. Et puis Andrea s’était blessée l’année d’avant dans une grosse chute. Elles sont au top et gagnent, la Swiss inline Cup pour Nathalie, la Coupe du Monde pour Andrea. C’était l’objectif.

Ce furent les plus belles années du roller, à quel moment cela a-t-il changé ?

A un moment, le marché s’est essoufflé et le jeu des rachats a modifié la donne.

2002 : départ d'une course de la Swiss Inline Cup
2002 : départ d’une course de la Swiss Inline Cup

Comment est arrivée la fin de l’équipe ?

Ce n’était pas encore tout à fait la fin de l’équipe. On vient de parler de 2002/2003, sur cette lancée, il y a eu une super saison. Pascal gagne la Coupe du Monde après Massimiliano Presti. Viennent aussi les premières courses de roller en Corée.

Je ne suis plus manager l’équipe Salomon. Je deviens directeur de course de la Coupe du Monde. Nous avons travaillé dur avec Coni Altherr sur la Swiss Inline Cup et la World Inline Cup.

Je garde cependant toujours un oeil sur l’équipe. Ils sont toujours là. Un nouveau marché émerge en Asie, mais le marché américain est vraiment en baisse. On sent qu’il y a un essoufflement en Europe. Cela devient plus dur de boucler les budgets et aussi plus dur au niveau médiatique.

L’équipe va se réduire. L’équipe féminine va s’arrêter. Nathalie, par exemple, va partir dans l’équipe Kia. Avec la baisse du marché, Salomon décide d’arrêter la production. Ils avaient pourtant de supers rollers, un catalogue vraiment incroyable avec les TR Vitesse en 2002, les Custom Fit…

Et c’est la fin de l’aventure…

La décision est prise de stopper. Et donc l’équipe pro s’arrête naturellement avec la marque, deux saisons plus tard. Ce sont 10 ans de rêve qui s’étiole petit à petit. On garde de super souvenirs !

Oui, Salomon a cela de particulier, que même 20 ans après, les gens s’en souviennent encore. Dès qu’on voit une combi noire et jaune, cela évoque Salomon. Il y a vraiment une trace qui a été laissée qu’aucune autre équipe n’a pu laisser.

Oui, je crois qu’il y avait cette volonté dès le début, d’être professionnels, avec des athlètes disponibles. Ce n’est pas toujours facile.

On avait un code :

« On gagne, on perd : sourire et on va répondre aux journalistes, aux patineurs et aux fans qui étaient là pour demander des autographes sur les cartes. »

Le succès des patineurs étaient tel que de mémoire en Asie, il y avait des posters géants…

Oui, en Asie. plus précisément en Corée. Des posters géants des patineurs sur les panneaux pub, avec des files de 100 m pour venir faire signer des autographes ! Pascal était connu à cette époque-là en Corée. On rencontrait des fois des Coréens dans les aéroports qui s’exclamaient :  » Ah ! Pascal Briand ! «  C’était marrant !

Voilà, c’était une belle expérience de vie, par ce qu’il en reste aussi vingt ans après. Pas seulement les résultats, pas seulement des vieux maillots mais aussi des souvenirs de vie, d’expériences, d’amis…

Merci Christophe pour ce témoignage sur les grandes années de l’équipe Salomon. Peut-être se retrouvera-t-on prochainement pour un autre épisode ?

Oui, nous pourrions aborder l’aspect compétition avec Pascal Briand et peut-être aussi avec Nathalie Barbotin, ce qu’était la vie de l’intérieur des courses. 

L'équipe Salomon qui signe des autographes
Equipe Salomon en pleine signature d’autographes avec Franck Cardin, Pascal Briand et Arnaud Gicquel

Liens utiles

Pour en apprendre davantage sur Christophe Audoire, et son parcours d’entraîneur et d’organisateur de courses rendez-vous sur www.christophe-audoire-coach.com et son site de vente de matériel de roller www.ligne-droite-roller.com

Photos d’archives : Swiss Inline Cup, World Inline Cup, Collection personnelle de Christophe Audoire

Auteur

Alexandre Chartier

''alfathor''

Alexandre est le fondateur et webmaster de rollerenligne.com depuis 2003. C'est un passionné de roller en général, tant en patin traditionnel qu'en roller en ligne. Il aime le patinage à roulettes sous tous ses aspects : histoire, économie, sociologie, évolution technologique... Aspirine et/ou café recommandés si vous abordez un de ces sujets !

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