Paris – Marseille en roller : 850 km « à la dure » (première partie)

Plus qu'un raid, c'est l'Aventure qu'a choisi David pour rejoindre Marseille depuis Paris. Seul et autonome, refusant le confort et la technologie, il réussit une performance sportive, humaine, authentique et pure. Des conditions simples qui semblent insensées dans notre société moderne. Rencontre avec un aventurier pur et dur...

Par Pierre LABAUNE

Paris – Marseille en roller : 850 km « à la dure » (première partie)

Un raid roller de Paris à Marseille en autonomie

Relier Paris à Marseille en roller n’a rien d’une sinécure. David Nguyen s’est lancé dans un raid roller de 850 km « à la dure » entre les deux villes. C’est avant tout l’aventure que recherche David dans son périple. Marseille depuis Paris.

Bonjour David Nguyen, peux-tu te présenter ?

Je m’appelle David Nguyen. J’ai 28 ans, natif de la citée Phocéenne j’ai grandi un peu partout.
Du sud, ce que j’ai gardé et emmené avec moi dans mes déménagements, c’est mon tempérament explosif, réactif plutôt. J’ai le sud dans les veines, alors j’ai aussi l’aventure dans le coeur. La spontanéité, la sincérité, et la passion pour tout ce que je fais, je suis « entier » comme on dit.

J’ai un parcours scolaire plutôt chaotique, je ne correspondais pas au système lui-même. J’ai quitté le lycée pour un concours et devenir « flic » ! Avec toujours le même cœur dans mon investissement. En tant que Gardien de la Paix, j’étais très fier. Et me suis évertué à faire bien mon boulot au service des autres. C’est ainsi que je suis devenu « Flic à Rollers » à Paris ! Après quelques mésaventures, j’ai changé de voie. Ainsi, j’ai repris l’école pour obtenir un BTS de management et repartir sur d’autres rails, ceux du commerce, aujourd’hui je suis vendeur dans un grand magasin de la capitale.

David Nguyen
David Nguyen

David Nguyen, quelle était ton expérience en roller ?

En fait, je fais du roller depuis l’âge de 7/8 ans, j’ai commencé avec des « quads« , acheté chez Emmaüs. Je m’en souviens encore. Je devais savoir au fond de moi qu’ils me porteraient loin (sourire) ! Vers 12/13 ans j’ai eu ma première paire de roller « in line » ! Ils étaient fluo, à l’époque c’était le top ! Sinon j’ai toujours pratiqué le Roller, de plus en plus régulièrement, et toujours avec la même passion. Mais jamais en club : j’ai toujours été passionné, mais ai toujours aimé en faire librement. J’ai touché un peu à tout, sauts, slaloms, endurance, vitesse. En fait, je dirais que je ne suis spécialiste en rien de particulier. Mais que je suis moyen un peu partout. Un amateur polyvalent.

Avant de te lancer dans ce Paris – Marseille, tu connaissais le raid en roller?

Non, je n’avais jamais effectué de raid avant celui-ci. Mais j’ai souvent effectué des distances de 50 à 100 km pour le plaisir de me balader. J’ai également participé à deux reprises aux 24H Rollers, toujours pour le plaisir.

Comment t’est venue l’idée de ce raid roller Paris – Marseille ?

Comme je te le disais plus haut, j’ai quitté la police pour reprendre les études. Alors que les examens du BTS approchaient, je me demandais comment fêter mon diplôme. Je l’ai obtenu à 26 ans alors que ma vie semblait toute tracée avant ça. En sachant que je n’avais pas un budget monstre. Je n’avais pas été en vacances à Marseille depuis près de 3 ans. L’été approchait. Moi qui suis tout le temps sur mes rollers…l’appel du bitume a été plus fort ! Et d’avantage encore, l’évidence de rejoindre ma ville natale en laissant derrière moi la capitale m’a plu. C’est la ville de mes galères et joies les plus marquantes. Alors je me suis lancé ce défi à moi-même. Comme pour me prouver qu’après toutes les larmes que j’avais du essuyer, j’existais plus que jamais !! Voila, je tenais là mon challenge ! Pendant que d’autres se paient des tours du monde en avion, j’allais me payer un Paris – Marseille avec mes jambes !

David Nguyen, pourquoi avoir choisi de partir seul, en autonomie ?

Le choix ne s’est pas posé, il s’est imposé ! C’était assez vague dans mon esprit, je savais juste que j’avais envie de tout oublier le temps du périple. C’est pour cela que symboliquement je quittais la Capitale depuis la place de la Bastille. Un peu comme pour (re)faire la révolution, à l’envers ! Ressentir ce qu’a pu ressentir un jeune révolutionnaire en 1789 qui montait vers la capitale pour défendre ses droits, pour la Liberté. Sauf que ma révolution s’opérait en interne, et que ce n’est pas un roi que j’ai décapité, mais certains de mes vieux démons. Donc je ne pouvais que partir seul.

Les précédents raids t’ont-ils inspirés, aidés ?

Inspirés ? Non, pas du tout ! Je dois t’avouer que jusqu’à ce que je commence à me préparer je n’en avais jamais entendu parler, ni même n’avait pensé que cela avait été fait. Ensuite : aidé ? Peut-être un peu, pour ce qui est de l’appréhension. Lors de ma préparation je voulais estimer si j’étais capable de faire cette distance et en combien de temps. En cherchant un itinéraire sur Google Maps que je suis tombé sur l’article de ton raid. Ce qui m’a fait peur c’est que j’avais estimé à 12/15 jours mon périple. Or vous l’aviez fait en un mois, deux fois plus donc. Mais bon, je me suis rassuré en me disant que l’époque n’était pas la même, et les rollers non plus.

Donc, oui quelque part ton raid en 94 m’a aidé, puisqu’il m’a permis de voir le challenge comme moins impressionnant ! Même si plus le jour du départ approchait plus j’avais la trouille de ne pas être à la hauteur de ma passion.

David Nguyen
David Nguyen

Quel équipement (roller et bagages) as tu choisi ?

En fait, je voulais faire ça « à l’arrache », comme pour mettre la dose la plus forte possible d’aventure ! Alors je suis parti avec des rollers de hockey ! J’ai toujours préféré rouler avec ces patins. En milieu urbain c’est l’idéal. Et je tenais à vraiment rester moi, ne pas me transformer en pseudo spécialiste de la vitesse ou de la longue distance. De plus, quelque part je voulais montrer que c’est à la portée de beaucoup de gens. Notamment de beaucoup de jeunes de la capitale qui sont en rollers de hockey.

Coté bagages, j’ai opté pour le sac de camping, parce que le charriot est beaucoup trop encombrant, trop lourd. Le sac c’était beaucoup plus simple à transporter. En effet, ça laisse les mains libres et surtout ça oblige à partir le plus léger possible. J’avais un boxer de rechange, un boxer de bain aussi, des chaussettes, des roues et roulements, de l’huile, à manger, une bouteille d’eau, un sac de couchage, un coussin gonflable, des pansements pour ampoules…enfin bon, je suis parti le plus léger possible. Mais si c’était à refaire, je partirai encore plus minimaliste ! Car je dois avouer qu’au fil de mon aventure, je me suis délesté un peu plus chaque jour, pour ne finir qu’avec le strict minimum !

Et pour ce qui est de la logistique (repas et couchage) c’était aussi « a la dure » ?

Presque ! Je suis tout simplement parti en me disant : « Voilà, j’ai ça pour manger aujourd’hui et demain (beaucoup de barres de céréales et des sandwichs), le reste j’ai ma CB… ». Pour le couchage je suis parti avec un sac de couchage. Je savais que je dormirai à la belle étoile, après tout, les SDF trouvent toujours un coin protégé, pourquoi je n’en trouverais pas moi ?

Couchage à la dure sur un banc
Couchage à la dure sur un banc

Donc tout au long du raid, je me suis nourri en faisant des achats dans les villes que je traversais. J’ai dormi là où je pouvais. Dans les gares, les jardins publics. Les meilleurs endroits que j’ai trouvés étaient des abris-bus. Ainsi, on y est couvert et protégé du vent la plupart du temps. A Vienne j’ai dormi chez l’ami d’une journaliste rencontrée à Lyon, c’était un luxe de dormir sur un vrai lit ! D’ailleurs je le remercie au passage, Nicolas, ainsi que tous les gens que j’ai pu croisés en route et qui m’ont encouragé, ceux qui m’ont offert leur hospitalité le temps de prendre une douche ou manger un peu.

Finalement, niveau logistique, c’était l’aventure à 100%, c’est ça qui a été génial, et pas besoin de le préparer vraiment… Juste à s’y préparer mentalement, car une nuit dans une gare SNCF ou sur un banc public ça ne se fait pas toujours sans crainte.

Pourquoi t’être imposé des conditions aussi dures entre Paris et Marseille en roller ?

En fait, je ne me suis imposé qu’une seule règle d’or : Tout improviser ! J’ai expliqué le choix des rollers, et pour ce qui est des conditions… c’est tout simplement pour ne dépendre QUE de moi ! Parce que je voulais me rapprocher de l’expérience du gars qui fait un tour du monde, seul, en pleine aventure « pure et dure » !

David NGuyen, as-tu tout de même préparé ton parcours (et tes étapes) ?

Oui, j’ai préparé mon parcours sur le net, en étudiant un minimum la carte de la France, ses fleuves, ses montagnes, ses autoroutes…par simple logique j’ai décidé très vite d’éviter les hauts reliefs, et donc de longer les cours d’eau. Alors en suivant cette logique, depuis Paris le trajet passe par Nevers, Mâcon, Lyon et Orange. Le seul doute planait entre Nevers et Mâcon, car les villes y sont moins nombreuses et les routes plus rares (ce fut d’ailleurs la partie la plus dure du raid).

Panneau d'entrée de ville de Montélimar
Panneau d’entrée de ville de Montélimar

Ensuite, pour vérifier la fiabilité des itinéraires fournis sur le net j’ai effectué des randos du type Paris-Melun-Paris ou encore Paris-Savigny-Paris en suivant à la lettre les indications données…ce fut un calvaire ! Certains chemins indiqués étaient en terre, certaines rues n’existaient plus ou étaient en travaux.

Finalement, j’ai du me résoudre à me préparer une liste de villes étapes pas trop distantes les unes des autres (50 km maximum), et durant le raid, j’ai demandé mon chemin peu à peu ou l’ai trouvé grâce aux panneaux de signalisation routiers.

David Nguyen, tu veux dire que tu n’avais même pas une carte routière pour ton raid Paris Marseille ?

Non, rien sur moi, j’ai complètement improvisé ! La pure aventure !

Fin de la première partie
Vous trouverez la seconde partie de cette interview en cliquant ici

GlobeRollers, site officiel du raid

Texte : 8wd / David Nguyen – Photos : GlobeRollers

raid roller David Nguyen paris marseille
Auteur Pierre Labaune
Pierre LABAUNE '8WD'

Patineur depuis 1984, Pierre s'est frotté à presque toutes les disciplines du roller. A 20 ans, il traverse la France en patins pour rejoindre le Bowl de Marseille, où il s'est installé depuis. Si son cœur reste attaché à l'acrobatique, c'est aujourd'hui sur la longue distance que son esprit s'évade. Une expérience riche de rencontres, et une vision large, qui lui permettent un recul sur le monde du roller.

15 responses to “Paris – Marseille en roller : 850 km « à la dure » (première partie)”

  1. Régis
    24 mars 2010 at 17 h 02 min
    Le post de souk est resté, aucun problème donc.
    Il faut avoir un moral d'acier, surtout quand on passe par de l'imprévu.
    En esp
  2. nico
    24 mars 2010 at 16 h 32 min
    juste bravo
    un léger grain de folie qui laisse de l'admiration
  3. Miklc
    24 mars 2010 at 15 h 40 min
    Just Ouhaou!
  4. Kat
    24 mars 2010 at 13 h 32 min
    J'ai connu un raid, mais à quatre, abandon à la ROCHELLE en partant de PARIS, c'était génial, bon courage à lui.
  5. Jennifer
    24 mars 2010 at 12 h 43 min
    Impressionnant ! vraiment bravo...
  6. go
    24 mars 2010 at 11 h 44 min
    Géant, on en redemande!
  7. fandumardi
    24 mars 2010 at 11 h 17 min
    d'un frère à l'autre salut mec il faudrait que tu organise un tour de l'île de la réunion je serai sur la route pour te suporter n'oubli jamais que tu serra toujours le bienvenu chez moi
  8. cofi
    24 mars 2010 at 8 h 35 min
    Chapeau :)
  9. BenASEB
    24 mars 2010 at 0 h 50 min
    Ce n'est pas extraordinaire ni nouveau. Personnellement j'ai préféré l'exploit de Pierre Labaune (il y a 10 ans), qui à mes yeux est 100 fois plus impressionnant, mais je reconnais que c'est pas trop mal là pour un début, peut mieux faire quand même. On attend la suite pour se faire une réelle opinion car ce qui compte c'est la pugnacité, et là ce n'est pas encore prouvé qu'il continuera.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *