Yann Guyader : Impressions de Colombie
Yann Guyader a passé plusieurs mois en Colombie cet hiver, à s'entraîner avec Cecilia Baena. Le français multiple champion du Monde nous livre ses impressions sur le fonctionnement du roller dans cette nation mythique du roller sud-américain et fait tomber quelques préjugés...
Par alfathor

La place du roller en Colombie
Je voudrais réduire à de justes proportions le mythe qui prétend que le roller est presque aussi connu que le foot : les colombiens connaissent effectivement notre sport mais pas les coureurs. Ce qu’ils connaissent c’est le sport roller de course, et parmi les coureurs Cecilia (Baena) à travers notamment les publicités.
C’est très différent d’ici, les patineurs sont pratiquement tous professionnels (au sens où ils n’ont pas d’autre activité) sans forcément être payés. Au club de Bogota sur 70 patineurs une cinquantaine ne font que ça.
L’institut du sport (IDRD) donne un salaire mensuel selon les résultats, cela concerne à Bogota une quinzaine de patineurs.
C’est une autre approche que la nôtre, ils s’investissent d’abord totalement et ils essaient d’atteindre le niveau.
Les entrainements
Une journée type d’entrainement commence par du vélo de 6h00 à 10h00 du matin puis roller de 15h00 à 18h00. C’est difficile de vraiment faire autre chose dans la journée, ça explique que pour réussir il faille s’y consacrer à plein temps.
L’approche de l’entrainement sur une saison est différente de la nôtre, ils n’ont pas de période de repos ou de préparation foncière. Sauf le repos possible pour ceux qui ne font pas le mondial.
Il y a une douzaine de pistes non couvertes à Bogota. Dans le club de Cecilia (Baena) 160 patineurs licenciés participent aux courses. Ceux qui n’ont pas le niveau pour courir ne courent pas, ils restent à l’école de roller qui va jusqu’à 14 ans.
Cela donne des groupes d’entrainement nombreux et bien homogènes. C’est une excellente émulation, et ils ont l’habitude d’aller beaucoup plus vite avec ce bon peloton, ça leur donne du rythme. Par contre comme ils bénéficient de l’effet « gros peloton » ça nécessite plus de volume.
Les courses en Colombie
Le championnat de district de Bogota regroupe 40-50 seniors Hommes et Femmes de bon niveau. Ainsi chaque course a un bon niveau. La limite, c’est que cela ne satisfait que ceux qui ont envie de s’investir totalement.
Il n’y a que des courses traditionnelles, pas de courses type Kid’s Roller, ou open FIC.
D’octobre à mai, une fois par mois, une course « championnat de Colombie » a lieu sur quatre jours, deux sur circuit routier et deux sur piste. Le but est de marquer des points pour la sélection, il n’existe pas de titre de champion de Colombie, pas de maillot.
Les poussins et benjamins sont dans un même championnat (en terme d’organisation des courses), les minimes, cadets et seniors dans un autre.
En Colombie cela représente donc une course importante par mois, une dizaine dans l’année. Ils sont toujours forts, mais ils n’arrivent pas à passer au-dessus, ils ont une forme linéaire.
Au-delà de ses avantages, cette organisation de l’entrainement et des compétitions suscite des interrogations et montre ses limites
Principe français : on ménage les enfants, on veille à leur équilibre et à leur santé.
Pas eux. Le but c’est de gagner, de saisir l’opportunité offerte, dans un contexte socio-économique bien différent et qui est l’une des raisons de cette attitude. Mais c’est la porte ouverte à de grosses dérives, que chacun peut imaginer. Et avec d’autant plus de risques qu’il n’y a aucun encadrement médical comme en France, pas de suivi longitudinal. Ils sont hyper structurés pour l’entrainement mais aucune place n’est donnée à une individualisation.
Globalement ça peut apparaître comme plus structuré qu’en France. Mais en fait en France il y a davantage de suivi fédéral (pour les athlètes en pôles) et ministériel (suivi médical longitudinal).
Ils arrivent aux limites de leur système. Le principe est de mettre du volume dès le début à tout le monde. Leurs juniors sont en avance, ça marche pour les résultats en juniors, mais très peu arrivent à passer la marche vers les seniors.
Conclusion
Je pense que c’est l’Asie qui va dominer parce que chez eux on apprend d’abord à patiner. Il n’y a pas un seul coréen (ou coréenne) qui patine mal en juniors au mondial. Certains colombiens si, et dans ce cas c’est leur avance physique qui fait la différence dans cette catégorie.
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7 mars 2010 at 16 h 34 min