Interview : Patrick « Aktarus » Sutnen
Aktarus fait partie de ces anciens du street qui ont chaussé des quads et ont fait de la résistance contre les rollers en ligne. Au fil des années, Patrick Sutnen (c'est son vrai nom) a fait sa place parmi les meilleurs riders français. ReL se penche sur son passé sportif et recueille ses coups de gueule...
Par alfathor

Rencontre…
Salut Aktarus, quel âge as-tu maintenant ?
J’ai 25 ans.
Et tu as débuté en roller à quel âge ?
J’ai commencé à 11 ans, ça fait donc 14 ans de pratique.
Tu faisais du street à l’époque ?
Oui, on peut dire ça comme ça. Je faisais du street en quad (patins traditionnels) tout en étant à fond dans le high-jump ou saut avec tremplin…
Tu vivais où à ce moment ?
A Arnouville-les-Gonesses… entre Sarcelles, Gonesse, Garges les Gonesse et Villiers le bel. Je roulais surtout au Trocadéro à Paris.
T’as découvert le roller comment ?
Je ne sais pas si je dois répondre là ! En fait, ma mère m’obligeait à aller faire de la danse folklorique Arménienne car je suis d’origine… En fait, j’y allais en skateboard. Un jour, arrivé sur le parking de la salle de danse, je vois tout un groupe de jeunes avec des rollers, des filles, des voitures de la musique à fond. Il règne ambiance de dingue. Là, un gars vient me voir en roller et me dit : « Tu peux me prêter ton skate ? »
Là, il me prend le skate me tord en deux (le gars déchire). Là, je me dis « Ok, j’arrête le skate… » J’en faisais seul, c’était plus un moyen de locomotion. A ce moment, je vois les gars sauter par dessus des bagnoles en roller avec des tremplins…
Je suis rentré directement chez moi zappant le cours de danse. Je me suis fabriqué des rollers avec les anciennes paires de mon grand grand frère de dix ans de différence. Je te laisse imaginer. C’était des patins de couleur bleu/blanc/rouge avec des chaussures qui ressemblaient à modèles de boxe. Je me suis donc fait un custom avec les plus vieilles chaussures que j’avais, ma mère m’aurait tué.
T’as roulé longtemps en quad ?
Deux ou trois ans je pense et j’étais vraiment anti anti inline ! Je t’assure une fois, on a vu un gars passer dans la rue avec des lines à l’époque… On l’a attrapé et lui a brûlé les patins dans la rue. C’était trop américain !
Pour nous, ce n’était pas du vrai patin avec sa maniabilité par rapport au truck. On trouvait que c’était trop un objet commercial qui dévaloriseraient le patin en général…
Tu faisais du sport avant d’attaquer le roller ?
A bloc ! J’étais un surexcité de la vie. C’est pour ça que ma mère voulait que je me dépense. J’ai fait beaucoup de judo et d’autres sports mais sans moyens financiers. Rien de structuré à part le judo et la danse en fait.
Et la danse t’avais pas la motivation alors ?
Pas du tout, mais j’étais bon à ce qu’il paraît.
Du coup tu n’as plus fait que du roller ?
Oui, à fond ! Comme je te disais, on faisait et du tremplin et du street à l’ancienne, comme maintenant ce que l’on peut appeler le freeride.
J’en faisais avec La Radikal Street Company (notre crew de l’époque). On faisait beaucoup de randos « caisse » aussi (en catchant). On partait de Gonesse, on faisait le tour de paris et on revenait à une quinzaine de gars.
Mon but à cette époque, c’était le France Roller Tour avec Samir Zemouchi. Je l’ai fait 3 fois. C’est une vraie expérience de la vie quand t’as 15 ans.
C’était la grande époque du Troca alors ?
Oui.
Tu regrettes cette période ?
Oui et non. On va dire que c’était moins excessif que maintenant. Il n’y avait pas ce star system pour rien. Les riders de l’époque étaient de vrais riders… pas comme maintenant où il s’agit de « sucer » pour passer dans un magazine…
Qu’est-ce qui a changé selon toi maintenant dans l’esprit des riders ?
Crazy Roller faisait la pluie et le beau temps sur la France. Le magazine était lié à un boîte de distribution. Il communiquait sur une politique du street pur pour faire user les patins plus rapidement. Vu que ça ne lui coûtait rien en pub, il avait tout à gagner. Les jeunes ne l’ont pas compris, jusqu’au point de leur faire mettre des pantalons « slim » (j’appelle ça des collants).
Ils n’ont pas mis les vrais riders en avant grâce à la notoriété du magazine car ils faisaient plus de park.
Tu as travaillé en collaboration avec Rollerskate ?
Oui un peu, j’ai été responsable de rubrique…
Pour les magazines, tant que ce ne sont pas les vrais riders qui prennent les rennes en main, le « bin’s » n’avancera pas… C’est pourquoi je veux m’y impliquer avec l’aide de mes potes du roller et le biais de mes connaissances !
Tu penses quoi du marché du roller et des marques en ce moment ?
Stand by. Ils n’y croient plus. A croire que les grandes marques se contentent de ce qu’elles ont et attendent de voir du changement, mais si elles ne font rien, je pense que les statistiques ne peuvent que chuter. il faut parier sur l’image que peuvent donner les riders…
Les riders se mettent tous à faire n’importe quoi : boire, fumer, etc. Ce n’est pas bon ! C’est là où les marques doivent mettre des « coups de pied au cul » de certains riders… et les transformer en vrais pros.
Tu crois donc à la professionnalisation des riders ?
Oui. C’est comme pour un enfant, si tu ne lui dis pas « arrête », il n’arrêtera jamais. Il faut leur mettre des petites claques de temps en temps pour les remettre dans le droit chemin.
Moi je pense à de belles structures comme Woodward et d’organiser de grosses compétitions comme aux States.
Tu penses que la mentalité peut évoluer dans le street ?
Oui, si ce sont les riders qui entreprennent les choses. C’est aux plus anciens de montrer l’exemple… moi par exemple.
J’arrive parfois à le faire avec fierté.
Tu penses quoi toi du « No Pads » ?
Je pense que pour de vrais entraînements, il faut mettre des protections. Un exemple : dans le patinage artistique, quand ils sont en compétition, ils n’ont aucune protection. Je pense qu’il y a du bon à prendre un peu partout autour de nous. Bien sûr le casque reste indispensable.
C’est quoi ton souvenir de gamelle le plus violent ?
C’est celle que j’ai prise aux Etats-Unis l’année précédente aux championnats du Monde à Dallas. Je suis tombé sur la tête à cause d’un problème technique sur mes patins.
En fait, j’ai changé mes roues, j’ai mis des Cozmo pour aller plus vite et le diamètre était trop grand. Je les utilisais sur des platines à suspensions. A la réception d’un gros trick en arrière, ça a bloqué net !
Je suis tombé sur la tête mais même avec le casque, j’ai perdu connaissance. C’était la veille au soir des championnats du Monde. Voilà pourquoi je l’ai foiré.
J’ai failli m’étouffer avec mon casque tellement mon visage avait gonflé.
Et quel est ton meilleur souvenir en roller ?
C’est à chaque fois que je mets mes patins !
Tu vois le roller comme un sport ?
A ça oui ! C’est sûr que ce n’est pas un sport collectif même ça commence maintenant avec la venue du roller-soccer (je suis dans l’équipe de Toulon d’ailleurs).
Je trouve là aussi que les marques devraient s’y intéresser comme les équipementiers sportifs. Là, on va peut-être signer un contrat avec une marque italienne.
Selon toi, le roller-soccer a un plus grand avenir que d’autres pratiques du roller ?
Ouais, car le foot c’est le sport que tout le monde a déjà pratiqué, c’est populaire, le roller aussi. Il faut plus de communication encore.
Tu vois comment ton avenir en roller ?
Tant que je pourrai pratiquer, je le ferais et toujours à fond.
Moins de street et plus de roller-soccer ?
Non, non, non ! On va dire que c’est pour les moments de détente le roller-soccer.
On va parler un peu de ta vie à côté du rollo : tu as quoi comme formation ?
Un bac pro Études et définition des produits industriels ainsi qu’un BTS de management des unités commerciales.
Tu travailles dans quel domaine ?
Dans l’architecture. Rien à voir mais ça me plaît et il y a du travail là-dedans. Je suis en train de monter ma société de consulting en service de qualité dans les skateparks.
En revenant des Etats-Unis où j’étais resté un mois et demi, je n’avais plus de sous. En arrivant, j’ai demandé à Anis Iboulalem ce qu’il faisait comme boulot. Il ma dit qu’il faisait de la plomberie, qu’il y avait du boulot. Revenu avec le décalage horaire, je m’étais présenté à la boite d’intérim où il était. En 2 minutes, la nana me propose un boulot de main d’oeuvre. J’ai accepté et de fil en aiguille, j’ai fait de la plomberie, et me suis retrouvé dans un bureau d’étude.
De là, j’ai reconnu un logiciel sur les ordinateurs. Je leur ai dit que je le connaissais. Ils m’ont dit qu’ils cherchaient un dessinateur. J’ai passé un entretien. De là, j’ai signé un CDI direct !
Et la société que tu veux créer ?
J’ai déjà dessiné des skateparks « gracieusement » à Arnouville notamment et un autre qui malheureusement n’a pas vu le jour. J’ai été aussi consultant pour la partie bowl du skatepark de Paris. De ce fait, je me suis trouvé une nouvelle passion : je suis pro rider et dessinateur.
Tu vis du roller ?
Plus trop justement, mais c’est donc là où je veux arriver. Le mieux pour les skateparks, c’est qu’ils soient réfléchis par de vrais riders. J’ai la « chance » de pouvoir retranscrire en dessin ce que les meilleurs ou les débutants riders voudraient pour évoluer.
Je voudrais donc faire cela par passion avant tout, et faire en sorte de donner une meilleure image pour les villes et pour le sport.
Je ne veux pas escroquer les villes avec des budgets de folies. La concurrence est rude sur le secteur, ça ne va pas être facile.
Que comptes-tu faire pour faire la différence ?
Justement, le service qualité, car je sais de quoi je parle et rajouter une dimension artistique au skatepark. J’aime aussi entreprendre donc, de là, je peux faire intervenir tous les corps d’états technique et trouver les prix les plus bas pour que le client soit satisfait.
Parlons sponsors : qui te soutient maintenant ?
Alors, en premier lieu, Hawaii Surf que je ne remercierai jamais assez. Ensuite, je pense à Valo qui a toujours été très réglo. Merci aussi à Skin Industries, une marque vestimentaire de freestyle motocross… et RSC mon crew.
Quelle est ta position par rapport aux compétitions fédérales ?
J’ai fait le circuit des coupes de France l’an passé et j’ai tout gagné.
Tu penses qu’il faut passer par le circuit fédéral pour arriver à un circuit structuré en street ?
Cette année, cela dépendra des conditions mises en place pour les riders car l’année dernière, il fallait un peu trop se débrouiller par soi-même. Au bout d’un moment, j’ai eu l’impression que c’était un événement organisé juste pour dit qu’il en ont fait un.
Que penses-tu du fait qu’il n’y a pas d’équipe de France de street en 2008 ?
Je trouve ça vraiment dommage. Le principal problème vient du fait que l’on fait tout avec des bénévoles et que l’on ne met pas les moyens. Ce n’est pas normal que le seul support de communication d’un événement comme un championnat de France soit un fichier excel sur le site fédéral.
Regarde, les seules choses dont on entend parler sur le roller dans les grands médias et à la télévision, c’est Taig Khris. Lui, il sait travailler son image. Il faut jouer avec les sponsors et les médias. Il a su se mettre en avant via la TV. Il a su se vendre.
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Quelques photos sur le site de Nice Roller Attitude
Photos : Droits réservés et Vincent Dessailly
Mathias N.
20 août 2008 at 12 h 44 minmajor@theclan.fr
19 août 2008 at 14 h 57 minLan'
17 août 2008 at 23 h 55 minchoco style
12 août 2008 at 16 h 07 minAlexx
11 août 2008 at 14 h 11 minIl nous a gratifié de sa présence dans notre petit spot couvert à Massy la semaine dernière et il tout retourné !!
Big Up ! ;)