Roller : simples vérités sur ses possibilités
On rencontre fréquemment des questions concernant l'amélioration de la performance. Bien souvent, le néophyte a déjà son idée, assénée comme une vérité par une connaissance plus ou moins bien informée : change tes roulements, tu ne peux pas avancer avec ça, fait des fractionnés, il n'y a que ça de vrai, sans la technique, tu ne peux rien...
Par alfathor

Tentons une approche rationnelle…
En fait, s’il n’y a rien de vraiment faux dans ces réflexions, les effets sont très variables pour un adulte qui cherche à progresser. Et tous les domaines n’offrent pas le même potentiel de gain. Quels sont donc, en toute clarté, les paramètres qui ont le plus d’importance ?
Le roller, comme toute action menant au mouvement du vivant, est régi par des lois mécaniques, physiques, chimiques… qui se traduisent par une consommation d’énergie.
On laissera aux experts de chaque domaine scientifique le soin de quantifier précisément les valeurs précises et les lois de variation des quantités en fonction du résultat obtenu. On ne retiendra que l’essentiel, déductible du bon sens et de l’observation. Pour que chacun ait une notion perceptible, les gains possibles (ou les écarts incompressibles) seront traduits en km/h.
Liste des points de consommation d’énergie :
On peut distinguer deux pôles principaux de consommation.
- Ce qui est lié à l’environnement et aux lois physiques mesurables simplement : la vitesse, la pente, les frottements mécaniques et aérodynamiques…
- Ce qui est lié au métabolisme et à la variabilité humaine : les capacités musculaires, articulaires, pulmonaires et cardiaques… voire psychiques !
La mécanique
Le roulage sur le sol dépend du rapport entre la qualité du revêtement du sol, du diamètre des roues, de la qualité de la gomme des roues, de celle des roulements et de la charge (poids du patineur). Elles sont citées par ordre d’importance.
Interviennent aussi la rigidité de la platine et la précision du chausson pour assurer appui et guidage de qualité. C’est le critère qui a le moins d’influence sur la vitesse maxi (des records du monde de vitesse vieux de plus des 10 ans ont été effectués avec des petites roues). Néanmoins, la qualité du matériel et la taille des roues permet de gagner 1 à 2 km/h sur route.
La pente et la vitesse sont évidemment deux sources de ralentissement importantes. Les lois de la physique sont simples à utiliser pour calculer la variation de vitesse ou d’énergie. En gros, l’énergie consommée varie exponentiellement avec l’angle de la pente ou avec le carré de la vitesse. Contrairement à des idées reçues, une petite surcharge pondérale ne sera pas trop gênante sur plat. Mais il est incontestable qu’en montée, elle se paiera cash.
La physiologie
La vitesse nécessite de la puissance. Celle-ci peut être obtenue par 2 moyens : la force pure ou la fréquence. (Ex : un petit moteur essence tournant vite a la même puissance qu’un diesel plus gros tournant moins vite). Dans les deux cas, l’énergie consommée pourra être équivalente.
L’énergie est obtenue chimiquement par la combustion d’une partie de notre alimentation stockée en sucres et graisses dans nos muscles, grâce à l’apport d’oxygène de l’air. Le rendement de cette réaction chimique augmente avec l’entraînement, mais les écarts varieront peu entre deux individus s’entraînant similairement.
Ce qui est plus déterminant, c’est la quantité d’oxygène qu’on fournit pour assurer l’effort. Deux éléments interviennent là encore : la capacité pulmonaire et la capacité cardiaque. Les poumons extraient l’oxygène de l’air pour le transférer dans le circuit sanguin. Plus ils sont capables d’en transférer, mieux notre sang est oxygéné. Mais cela n’est rien si le sang n’est pas envoyé vers les lieux de consommation de l’oxygène, c’est à dire les muscles pour le mouvement. C’est le cœur, qui en pompant, assure cette circulation.
Il ne faut pas oublier que notre corps fonctionne en permanence. Au repos, donc au ralenti, il consomme déjà des calories proportionnellement à la respiration et à la fréquence cardiaque. La digestion, à elle seule, entraîne une augmentation des consommations. De même, la fièvre lors du combat contre une infection. Les mouvements nécessaires à la locomotion sont donc une consommation supplémentaire. Notre fréquence cardiaque constitue une sorte de compteur de consommation. Plus le rapport entre le maximum et le mini au repos est important, plus on a de potentiel. La technique du geste amènera des économies possibles pour éviter de faire consommer tout ce qui n’est pas utile à la propulsion.
Pour le cœur et dans une moindre mesure, pour les poumons, l’entraînement est important.
D’autres facteurs interviennent : notre stature et notre squelette. Nous ne sommes pas tous égaux sur ce plan. Petit gros ou grand maigre, toutes les combinaisons sont possibles. Gros poumons plus gros cœur ou bien l’inverse, là aussi, le hasard et la génétique nous proposent toutes les combinaisons.
On doit admettre qu’à niveau d’entraînement identique, un individu plutôt longiligne, doté de poumons conséquents et d’un cœur à la fois fréquent et musclé sera naturellement plus performant qu’un autre court sur jambes, avec une capacité pulmonaire réduite et un cœur limité. Un entraînement intensif permettra au deuxième de se muscler, mais ne lui permettra pas d’utiliser ses muscles à pleine puissance pendant de longs moments. De même, la longueur de ses jambes et la raideur de ses articulations ne lui permettront pas d’effectuer un mouvement aussi efficace que le premier.
Pour l’athlète doué, l’entraînement lui permettra de renforcer sa musculature, mais surtout de l’utiliser. Car la quantité d’oxygène qu’il fournira sera compatible avec le besoin. Avec un gabarit bien adapté, il pourra en plus progresser techniquement, ce qui lui permettra de créer la différence avec les individus à son niveau.
On rencontre des athlètes qui n’ont pas un gabarit impressionnant par la taille. Mais s’ils sont champions, n’en doutez pas, ils possèdent une capacité pulmonaire et un cœur hors norme… La puissance musculaire qu’ils possèdent est suffisante pour compenser par une fréquence supérieure de mouvement un écart avec les plus grands.
Comparaisons physiologiques
Deux individus équipés à l’identique roulent cote à cote. Le premier a un pouls à 50 le matin et atteint sa VO2 Max à 210 pulsations. Pour le second, ces valeurs sont respectivement de 60 et 190. Ils peuvent lever la même charge en squat ou à la presse. Pour atteindre 20km/h de vitesse, ils sont en endurance et cela leur coûte environ 50% de VO2. Le premier bat à 105, le second à 100. A 25km/h, tous les 2 battent à 150. Pour le premier, il est encore en endurance (71% de FC), pour le second, il est déjà en résistance (79%). A partir de là, l’écart se crée. Si la vitesse est stabilisée à 25km/h, le premier a une autonomie de plusieurs dizaines de kilomètres, le second de quelques kilomètres seulement. Si on continue d’accélérer, le second explose en quelques centaines de mètres, alors que le premier peut maintenir une même vitesse tant qu’il n’a pas atteint le seuil de résistance.
A ceux qui prétendraient que la technique intervient dans ce cas, on demandera de faire le même test dans une cote violente, où la technique est secondaire, ou bien sur un vélo d’appartement. Le résultat sera le même. L’écart en pourcentage de puissance développée et donc de vitesse potentielle sera important, se traduisant par une différence pouvant largement dépasser 5 km/h à vitesse stabilisée. Comme dans d’autres sports, on considère qu’un individu non entraîné peu développer 150W en continu, avec un bon entraînement, un sportif moyen atteint 250W, et les champions peuvent dépasser 400W. Un écart du simple au double ne peut pas être comblé entre 2 individus s’ils ont déjà un passé sportif.
Comparaisons techniques
Aérodynamique
La traînée aérodynamique est le plus gros poste de consommation d’énergie du patineur sur le plat. Elle nécessite entre 70% et 90% de l’effort de propulsion.
En dessous de 20 km/h, la position aérodynamique a peu d’influence, car la valeur de la traînée (du freinage par l’air) n’entame pas le potentiel d’endurance. Entre 20 et 30km/h, l’accroissement de 50% de la vitesse se traduit par une résistance de l’air multipliée par 2.25 ! Entre 20 et 40 km/h, c’est par 4 qu’il faut multiplier le freinage par l’air. Ceci n’est vrai que pour un patineur isolé qui n’adapterait pas sa position en fonction de la vitesse. En s’abaissant et en améliorant sa position de pénétration dans l’air, il peut réduire entre 30 et 50% cette traînée. Cependant, la position idéale ne sera pas favorable au mouvement et à la respiration. C’est pourquoi, c’est essentiellement en descente que le bénéfice sera sensible. (On comprend pourquoi certains restant immobiles en position de vitesse descendent plus vite que d’autres qui patinent en oubliant de se baisser). Et sur plat, c’est le compromis entre position et respiration qui pourra être amélioré grâce à l’entraînement. Notons que ce qu’on gagne par la position est réduit par une consommation musculaire supplémentaire due au gainage.
Le peloton
On peut se faire une idée du freinage de l’air par la comparaison de vitesse du même individu dans un peloton et hors du peloton. On peut économiser jusqu’à 30% de son énergie de propulsion dans le peloton. On comprend aisément le phénomène d’écran protecteur de celui qui est devant vous. C’est moins intuitif, mais même le premier du peloton a sa tache facilitée. Sa traînée individuelle est réduite, car elle est reportée à la fin du groupe.
La différence de vitesse moyenne stabilisée de 2 à 3 km/h entre le peloton et l’isolé (ou entre individus n’ayant pas la même position de patinage) permet d’avoir une idée de l’influence du facteur aérodynamique. L’écart s’accroît avec la vitesse.
La technique
C’est le dernier facteur intervenant dans le bilan. Elle intervient sur tous les facteurs que nous avons cités plus haut. Elle permet d’améliorer le rendement sur chacun, mais également d’optimiser les combinaisons possibles. Par exemple, on pourra citer en vrac : le réglage des platines améliorera le rendement de la poussée. La position améliorera la vitesse ou bien la récupération. La tactique permettra de gérer son potentiel cardio-vasculaire sans gaspillage inutile. Ou bien de provoquer une surconsommation chez le concurrent. Le geste optimisé et la possibilité de le maintenir longtemps, la capacité à changer de rythme et d’accepter des variations de fréquence importantes, acquis à l’entraînement, permettront là encore de gagner un pourcentage non négligeable entre deux individus de même potentiel de base.Et ça se traduira par 2 à 5 km/h de mieux sur une course, par rapport à un débutant, même costaud.
Bilan général
Les différentes valeurs proposées dans cet exposé ne sont pas extraites de mesures précises, mais découlent de l’observation pratique. Elles sont destinées à quantifier une pratique intermédiaire, soit un parcours entre 20km et un marathon. La précision a moins d’importance que le rapport des valeurs entre elles. En résumé et par ordre d’importance croissante, voici à quoi sont dus les écarts entre les uns et les autres :
- Matériel : 1 à 2 km/h
- Aérodynamique : 2 à 3 km/h
- Technique : 2 à 5km/h
- Potentiel physique : > 5km/h
On retrouve bien là les écarts entre open et élite en course. On constate que le facteur le plus influent est le potentiel physique. C’est également celui qui est le plus difficile et le plus long à faire progresser. C’est dans l’enfance qu’il a le plus de variabilité. A niveau d’entraînement identique, pour des adultes, les écarts de potentiel de base seront hélas retrouvés en grande partie à l’arrivée.
La somme des autres facteurs permet d’espérer gagner entre 5 et 10 km/h au grand maximum, selon son niveau de départ et ceci, dans le meilleur des cas !
Conclusion
Il est possible de s’améliorer. Pas de transformer un âne en pur-sang.
Pour devenir champion, il faut naître potentiellement champion.
Oui, le travail donnera toujours des résultats. Souvent modestes.
Rassurons-nous, il y a de quoi se faire plaisir quand même.
L’autre voie
Le mot travail a été employé volontairement, dans toute son acceptation. Ca signifie : contraintes, outils, règles… Or il est notoire que nous progressons jusqu’à 25 ans environ, que nous stabilisons nos performances ensuite. Alors, est-ce que je suis bien concerné par ce travail?
Pour peu de différence, nous pouvons choisir le plaisir simple de rouler souvent. En observant ou en écoutant les champions, nous pourrons adopter une partie de ce qui nous convient, à notre rythme. Nous délaisserons ce qui ne convient pas à un organisme différent, à un état d’esprit différent. En roulant souvent, nous trouverons naturellement le relâchement, la liberté et le plaisir qui nous stimulent et donnent des résultats pas si éloignés que ça de ce qui nous est possible !
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Prosper
18 novembre 2009 at 23 h 51 minQuelques remarques cependant :
Les pourcentages de marge de progression que tu avances me semblent un peu trop piffomètriques. La marge technique est beaucoup plus importante que tu ne le penses.
Dans le domaine physiologique tu parles uniquement du système aérobie. Cela voudrait dire que tu limites ta reflexion aux courses longues (marathon et au dessus).
On peut réussir en roller avec des aptitudes aérobies modestes (200, 300, 500, voire 1000m).
Toujours en physio, éliminons un lieu commun : la capacité pulmonaire n'est pas un facteur limitant. Les poumons humain sont surdimensionnés par rapport au système circulatoire. Le facteur limitant c'est d
BenASEB
18 novembre 2009 at 23 h 25 minJe suis entièrement d'accord avec prosper'mais sans langue de bois je dirai que tout est mélangé,que c'est faux pratiquement pour tout et j'espère que les gens ne croirons pas ces âneries. aucune objectivité scientifique!