Le roller : véritable moyen de déplacement
A l'heure où la toute puissante automobile trouve ses limites dans les centre-villes engorgés, les moyens de déplacement dit "doux" ou "alternatifs", se taillent une place croissante dans les solutions de mobilité urbaine. Le roller, au même titre que le vélo, le skateboard ou la trottinette, trouve sa place dans cette logique...
Par alfathor

Le roller : un mode de transport alternatif naturel et logique pour les patineurs
S’aventurer à rédiger un article sur le roller en tant que moyen de déplacement sur un site de passionnés de roller pourrait passer pour une forme de prosélytisme. C’est pourquoi, nous tenterons de faire preuve d’autant d’objectivité que possible en montant en lumière les avantages et les inconvénients de l’usage du roller et du patinage à roulettes en tant que mode de déplacement.
Le roller est-il un moyen de locomotion par essence ?
Par nature, nous pourrions dire que oui, dans la mesure où les roulettes accélèrent et facilitent les déplacements en avalant les distances plus facilement. D’ailleurs, la majorité de la population des patineurs a depuis longtemps intégré le fait que le roller pouvait constituer un mode de déplacement alternatif à part entière. Le roller en raid en ville à ville peut se positionner à la fois comme une pratique sportive et comme un véritable moyen de transport. C’est son essence même, son ADN, le roller est avant tout un moyen de locomotion. Mais est-il pour autant le plus utilisé par les patineurs et le plus pratique ? Pas si sûr…
Le roller reste peu employé pour les déplacements utilitaires
Force est de constater que l’écart reste grand entre l’intention et l’action. En effet, selon une étude réalisée par l’INJEP1 en 2020, parmi les personnes ayant déclaré au moins une pratique utilitaire en 2020, soit 24 millions de personnes, seules 0,7% ont utilisé leurs rollers pour des déplacements utilitaires. Cela reste donc très marginale, même si cela représenterait tout de même environ 168.000 personnes. Dans l’enquête ENPPS 2020, une pratique est considérée comme utilitaire dès lors que la personne déclare au moins une activité physique et sportive (APS) pratiquée pour un déplacement de la vie quotidienne, pour se rendre sur son lieu de travail ou d’études, par exemple.

Ainsi, en 2020, 43,5 % des personnes âgées de 15 ans et plus résidant en France déclaraient avoir eu au moins une pratique utilitaire au cours des douze derniers mois, ce qui représente 24,0 millions de personnes. 83% des pratiquants de rollers les utilisaient uniquement pour la pratique sportive, 13,8% pour une pratique à la fois sportive et utilitaire, et 3,2% exclusivement à des fins utilitaires (Source : ENPPS 2020).

Force est de constater que le roller s’impose peu, pour l’instant, comme une pratique utilitaire du quotidien dans les déplacements :
- 21 % des pratiquants utilitaires de roller ont eu une fréquence de pratique inférieure à une fois par mois au cours des douze derniers mois
- 29% utilisent leurs roller une à trois fois par mois pour se déplacer
- 23% une fois par semaine
- 28% dex à trois fois par semaine
- Et 0% plus de deux à trois fois par semaine.

Et si vous optiez pour le roller dans certains de vos déplacements ?
Nous ne militons par pour le « tout roller » car il serait assez peu réaliste et qu’il ne répond pas à l’ensemble des besoins en termes de simplicité d’usage et de fonctionnalités. Malgré tout, espérons donc que cet article sera lu par d’autres personnes que par les passionnés de la roulettes et qu’il les incitera à envisager le roller comme une alternative supplémentaire, crédible et pérenne dans certains trajets quotidiens. Pas besoin de voiture pour aller acheter son pain en ville !

Les bénéfices du roller en tant que moyen de déplacement
Nous allons donc commencer par rappeler l’ensemble des points qui font du roller un véritable moyen de déplacement avant de nous pencher sur les contraintes liées à cette pratique.
Un déclencheur du roller comme moyen de transport : les grèves
La légende veut que l’utilisation du roller ait explosé en France à l’occasion des grèves de 1995. La plupart des moyens de transports étant paralysés, les travailleurs se sont alors rabattus sur le vélo, la marche à pied et dans une mesure toute relative vers le roller. La photo ci-dessous figura dans le magazine Roller Saga à la fin des années 1990 et illustrait un article sur le roller utilisé comme mode de déplacement par les cadres du quartier de la Défense.

Nous retrouvons d’ailleurs ce phénomène à plusieurs reprises à travers l’histoire, notamment dans l’Angleterre du début du XXe siècle où les transports en grève forcèrent les travailleurs à partir embaucher sur leurs roulettes.

Les patins à roulettes comme alternative à la bicyclette dans les manoeuvres militaires
L’armée ne fut pas indifférente aux qualités intrinsèques du patinage dans le déplacement de ses troupes. Ainsi, le 1er avril 1895, la revue Le Spectateur Militaire (p. 76-77) consacra un chapitre entier à l’utilisation du patinage à roulettes en tant que moyen de locomotion militaire. Elle l’emprunta d’ailleurs à un journal anglais nommé « Review of Reviews ».

Les avantages des patins à roulettes pour se déplacer en milieu urbain ou sur les routes et voies vertes
La majorité des grandes agglomérations s’équipe progressivement d’immenses parcs de vélos mis à disposition du grand public (type Vélib’ à Paris, V’Cub à Bordeaux). D’ailleurs, un nombre croissant s’électrifie pour en faciliter l’usage. D’autre part, le réseau de pistes cyclables et de voies vertes voit sa densité augmenter progressivement… Hormis dans certaines municipalités où la petite reine recule pour de sombres raisons politiques (heureusement, ce cas reste minoritaire).
Le roller possède de nombreux points communs avec le vélo, comme l’utilisation des pistes cyclables (quand c’est toléré). Il présente aussi quelques différences qu’il est bon de rappeler ou de mettre en lumière.
Le faible encombrement des rollers
Une paire de roller pèse environ 3 kg et ne prend quasiment pas de place. Elle est donc facilement transportable et on peut la stocker facilement. Cela correspond à la même masse qu’un ordinateur portable de taille moyenne.
Si l’on compare l’encombrement d’une paire de roller avec celui d’un vélo, on constate rapidement le gain de place dans le placard ! Il n’est pas nécessaire d’avoir un emplacement pour l’entreposer en arrivant au travail ou chez soi. Ils prennent à peine plus de place qu’une paire de chaussure. On peut donc les emmener à peu près partout, même dans les ascenseurs où les vélos ont parfois du mal à rentrer.

Pas de risque de vol si vous avez vos patins avec vous !
Pas non plus besoin d’un cadenas pour les attacher à un poteau dans la rue et aucun risque de revenir avec seulement sa roue avant et son cadenas ! Ils rentrent dans un casier au travail ou savent se faire discret dans un coin du bureau.
Le roller est maniable si vous avez un niveau technique suffisant
Pour peu que votre niveau technique soit suffisamment bon, les rollers offrent une grande souplesse d’utilisation. Vous passez en un clin d’œil du trottoir à la piste cyclable ou à la route (avec prudence ! ). Du coup, on circule en toute fluidité au cœur des villes, sans grande rupture de rythme.
Le roller peut emprunter les trottoirs à vitesse modérée
En théorie, les vélos ne sont pas autorisés à utiliser les trottoirs. Cela ne les empêche pas de s’y trouver régulièrement ! De l’autre côté, les rollers y sont juste tolérés pour peu qu’ils ne dépassent pas les 5 km/h. Le roller n’a pas non plus véritablement sa place sur les pistes cyclables. Sachez qu’en cas d’accident entre un vélo et un roller sur une piste cyclable, le vélo est dans son droit. Vous n’êtes pas chez vous ! Respectez donc la circulation des cyclistes et la législation qui s’applique roller.
Le coût réduit des patins
Pas besoin d’être un génie des mathématiques pour constater qu’une paire de roller reste beaucoup moins cher qu’un vélo, surtout s’il est électrique. Une paire de patins pour une pratique régulière avoisinne les 200 € contre 300 à 400 € pour un bon vélo, voire 1500 à 2000 € pour une entrée de gamme électrique.
Le roller : une alternative aux bouchons !
Les encombrements qui bloquent les voitures sont un détail : un camion est en pleine livraison en double file au milieu de la rue ? Qu’importe ! Passez sur le côté et le tour est joué. Vous arrivez dans une zone piétonne où la circulation des véhicules est limitée ? Qu’à cela ne tienne, le roller y passe aisément. En effet, il se faufile entre les passants… à vitesse modérée bien évidemment, le respect avant tout !
Les obstacles existent mais restent franchissables
Quand un obstacle se présente, la maniabilité des rollers permet des évitements plus rapides et plus efficaces. Cela pour peu que l’on ait un niveau de patinage correct. Quoiqu’il en soit, la prudence, le respect du code de la route, des autres usagers et l’anticipation s’imposent toujours !
La rapidité des rollers comme moyen de locomotion
Un patineur pratiquant régulièrement peut aisément se déplacer à la vitesse d’un cycliste, entre 15 et 30 km/h, voire plus.
Les temps de transport entre la maison et le travail sont donc quasi-équivalents à ceux du vélo. En outre, ils sont souvent meilleurs que ceux de la voiture dans les grandes villes.
Vous l’aurez compris, la maniabilité du roller permet souvent de gagner un peu de temps. Et puis, quoi de plus marrant que de mettre une pilule à un vélo avant d’embaucher ? Même s’il faut reconnaître que cela devient de plus en plus dur avec les motorisations électriques :-)

La dimension ludique du patinage à roulettes
Etre acteur de son déplacement, c’est quand même plus agréable que d’être passif derrière son volant à ruminer dans les bouchons ! Un parcours entre deux points peut s’avérer amusant : on slalome entre des poteaux, on monte et on descend des trottoirs, on passe des bosses, on voit les automobilistes rager dans la file de voiture embouteillée alors que l’on file nonchalamment vers son objectif…
Les bienfaits pour la santé de se déplacer en roller
Hormis quelques chutes inévitables, le roller est une activité excellente pour votre condition physique, elle améliore vos capacités cardio-respiratoires, renforce votre ceinture lombaire, améliore votre équilibre. Nous avons consacré un article complet sur ce sujet, n’hésitez pas à aller le consulter.
La dimension écologique
Peu polluant, silencieux, le roller offre de sérieux atouts au plan écologique. Il permet un déplacement souple avec un très faible impact sur l’environnement. Les rejets se limitent à ceux émis lors de sa production, à un peu d’huile qui file des roulements et à l’usure de la « gomme » des roues sur la chaussée.
Attention, pensez cependant à l’impact de la pollution urbaine sur la santé des rollers
Le roller : un maillon de l’intermodalité
La notion d’intermodalité, vous connaissez ? Il s’agit en fait de combiner plusieurs moyens de transports pour se rendre d’un point à un autre rapidement et efficacement.
Vous le savez, les déplacements dans de nombreuses agglomérations, notamment en région parisienne sont fastidieux, en particulier de banlieue à banlieue. Vous pouvez donc utiliser différents moyens de transports pour vous rendre dans un lieu donné : partir de banlieue en RER ou en voiture, atteindre la périphérie de la ville, chausser les rollers pour atteindre un quartier mal desservi.
En comparaison, le roller est souvent aussi rapide que le métro ou le tramway.

Les limites du roller comme moyen de déplacement
Maintenant que l’on vous a peint un magnifique tableau des avantages du roller comme moyen de déplacement, nous allons pouvoir nuancer notre propos. Que cela ne vous décourage pas pour autant de chausser les roulettes !
Le niveau de maîtrise nécessaire aux déplacements en roller
Le premier facteur limitant reste pour beaucoup de patineur reste leur aisance en patin : pratiquer dans une salle avec un sol lisse, sans aléa, avec un moniteur à côté dans un environnement stable, cela n’a rien à voir avec la jungle urbaine !

Les trottoirs, les pavés, les bandes anti-dérapantes, les plaques d’égouts, les flaques d’eau, d’hydrocarbure, les passants, les laisses de toutous, les autres usagers sont autant d’obstacles potentiels qui se dressent devant vous.
Il convient donc de s’initier à quelques techniques de patinage pour que ces ces gênes (toutes relatives) deviennent banales et se transforment en jeu. Une fois les rollers maîtrisés, patiner en ville est un réel plaisir. L’environnement urbain reste le terrain de jeu privilégié des patineurs.
Les variations climatiques limitent la mobilité en roller
Le roller, au même titre que la moto ou le vélo, reste soumis aux conditions climatiques. Il est tout à fait possible de patiner par temps de pluie, simplement, l’exercice peut s’avérer périlleux si l’on adapte pas sa technique de patinage et son équipement.
Le sol rendu glissant nécessite une adaptation de votre patinage : des foulées plus courtes, moins amples et moins puissante, une position plus fléchie. Il vous faudra aussi énormément de temps et de patience en rentrant à la maison pour nettoyer et entretenir le matériel si vous n’êtes pas équipé de roulements anti-rouille.
L’hygiène : une question incontournable quand on se déplace en patins
Fier comme Artaban sur vos roulettes, vous arrivez en vainqueur au bureau. Vous avez esquivé le chihuahua vengeur et sa traitresse de laisse télescopique. Vous avez aussi sans doute frôlé la vicieuse borne en bois au milieu de la piste. Enfin, vous avez aussi peut-être évité de peu la bouche de gaz au couvercle volé sur la chaussée. Vous voilà filant à la façon d’un lémurien nonchalant sur roulettes à travers la ville. Vous êtes joué de tous les pièges… et vous êtes en sueur, puant des aisselles !
Si votre entreprise est équipée d’une douche, pas de problème. Sinon, votre patron risque de regarder vos auréoles sous les bras avec un oeil suspicieux.
Le dilemme est là : Se déplacer en réduisant votre impact sur l’environnement nécessite une tenue de rechange. Rares sont les sociétés qui sont équipées d’une douche pour leurs salariés. Au regard du nombre croissant de personnes qui vont travailler autrement qu’en voiture, la chose finira peut être par s’imposer. En attendant, prévoyez un jeu de vêtements de rechange dans votre sac et au bureau.
Le manque d’infrastructure adaptées aux déplacements en roller
Si le roller trouve parfaitement sa place comme moyen de transport intra ou péri-urbain, qu’en est-il en milieu rural ?
Aux revêtements non adaptés des routes de campagne, s’ajoute aussi le manque de pistes cyclables permettant de circuler en toute sécurité. Il faut donc se contenter des départementales les moins fréquentées. Pour votre sécurité, n’oubliez pas d’être visible en hiver ou en soirée !

La capacité de transport de marchandise reste limitée
Une paire de rollers peut vous emmener sans problème au supermarché mais vous n’aurez sans doute pas le droit d’y rentrer juché sur vos roulettes. Ou alors vous avez opté pour des patins détachables.
Si le patin ne nécessite pas de place pour se garer, la capacité de stockage s’avère limitée quand il s’agit d’y transvaser un caddie plein à ras-bord des courses hebdomadaires. Vous pouvez toujours utiliser un cabas à roulettes à trainer derrière vous… à moins de pousser le caddie jusqu’à chez soi et de le ramener au magasin ?
Un statut qui reste à améliorer / définir pour le roller comme mode de déplacement ?
Voilà quelques années, plusieurs personnes qui utilisaient leurs patins pour se déplacer ont eu la mauvaise surprise d’être verbalisées par les autorités, en vertu d’un article de loi de 1876 qui interdit les jeux sur la voie publique.
Heureusement, après procédure en justice, la plupart de ces procès-verbaux ont été annulés et la jurisprudence a joué. Toujours est-il que le statut reste en suspens. En attendant, le fait d’être assimilé à un piéton laisse quelques libertés…
Mode de déplacement – Quelques conseils si vous vous déplacez en roller ou en patins à roulettes
Pour que le roller trouve sa place parmi les autres moyens de déplacement, un minimum de courtoisie et de savoir-vivre doivent s’installer.
Respecter le code de la route et les autres usagers
Les rollers ne sont pas des barbares, contrairement à l’image que certaines municipalités s’entêtent à communiquer. Prouvons-leur que le roller est avant tout un citoyen !
Les rollers ne sont que tolérés, où qu’ils soient :
- Sur les trottoirs, roulez au pas en surveillant toujours les réactions des piétons.
- Ensuite, sur les pistes cyclables, les vélos sont prioritaires.
- Sur les voies vertes, tous les usagers ont les mêmes droits. La cohabitation ne peut se faire que si chacun respectent les règles communes.
- De nuit ou en zone sombre, portez un équipement réfléchissant ou lumineux pour être vus. C’est d’ailleurs obligatoire dans certains pays.
- Sur la route, Les voitures restent les reines du bitume. Tout comme les cyclistes, les rollers ne pèsent pas lourds face aux armures d’acier, même s’ils ne sont pas en tort. Inutile de jouer les gros bras, jetez toujours un oeil derrière vous et serrez quand une voiture passe, quitte à arrêter de patiner. Votre mouvement est ample et peut surprendre l’automobiliste.
- Ne circulez pas face à la circulation comme un piéton, même si le code de la route le demande, cela fait peur aux conducteurs qui ne s’attendent pas du tout à vous voir là.

La courtoisie n’a jamais fait de mal à personne
Saluez les autres usagers, remerciez-les s’ils font l’effort de vous laisser passer, anticipez les croisements en choisissant rapidement votre sens de circulation, ralentissez aux abords des virages sans visibilité, des croisements, ou en passant à côté des piétons qui peuvent être surpris par votre vitesse.
Inutile de rappeler aux gens qui laissent leur chien et leurs enfants sans surveillance qu’ils ne sont pas respectueux des autres personnes ou qu’ils mettent en danger leur descendance, dans ces cas là, quoi que vous disiez, la personne en face trouvera toujours une excuse pour vous incendier, vous le grand méchant roller…
Et je plierai comme un roseau dans le vent …ZEN !
Bonne route !
Notes de bas de page
1. LEFEVRE Brice & RAFFIN Valérie (2020) « Les pratiques physiques et sportives en France – Résultats de l’enquête nationale 2020 menée par le ministère chargé des sports et l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) », INJEP, Paris
Pour aller plus loin
Photos : Alfathor, Roller91 et droits réservés – article de 2009 mis à jour en 2015, 2022 et 2024
SergeR
22 octobre 2024 at 9 h 20 minLise
3 mai 2022 at 16 h 06 minalfathor
4 mai 2022 at 14 h 04 minDidier
4 mai 2009 at 22 h 08 min