Rencontre avec un bénévole passionné de roller street : Michaël Barbieri
Sur REL, nous parlons souvent des champions et de leurs performances exceptionnelles lors des compétitions. Ces dernières ne pourraient avoir lieu sans quelques bataillons de bénévoles qui s'investissent chaque weekend sur le terrain. Aujourd'hui nous avons décidé de mettre en lumière Michaël Barbieri, bénévole en charge de la communication au sein de la commission roller freestyle / street...
Par alfathor

Portrait d’un bénévole du roller street
Bonjour Michael, est-ce que tu peux te présenter ?
Bonjour ! Disons que je suis le père, comme il y en a plein d’autres, d’un jeune rider de 13 ans. Mon fils Charles m’a entraîné à le suivre de skatepark en skatepark. Comme la plupart des papas et mamans dans ma situation, je me retrouve à la fois chauffeur, soigneur, coach, supporter, bricoleur en urgence… Un vrai sacerdoce, quoi ! (rires)
Je vis à Dijon où nous sommes gâtés en termes de riders, avec trois membres de l’Équipe de France, tous plusieurs fois titrés : Florian Petitcollin, Nicolas Servy et Jérémy Domingues. Difficile de faire mieux pour entrer dans le monde du roller street ! Et il y a plein de jeunes qui poussent derrière pour venir prendre leur place. Notre club (AMSports) est très dynamique et je baigne dans une émulation qui donne envie de s’investir.
Es-tu pratiquant ? Si oui, quelle discipline et à quelle fréquence ?
Oui bien sûr. J’ai pratiqué le roller avec assiduité pendant au moins… deux heures. Donc, je pense avoir une certaine expérience (rires) !
Plaisanterie à part, je suis incapable de tenir debout très longtemps sur des roulettes. Ce qui me rend encore plus admiratif des performances des jeunes et moins jeunes riders que j’ai eu la chance de rencontrer. Les voir évoluer me donne très envie d’essayer de les imiter. Non seulement il me faudrait des années de travail pour acquérir un tout petit niveau mais, en plus, j’ai trop peur de la chute. Chuter à mon âge revient à mettre une tortue sur le dos.
C’est ce que je trouve impressionnant chez les adeptes du roller street : cette capacité qu’ils ont à débrancher les fils de leur cerveau pour tenter des figures improbables et risquées. A mon âge, on ne peut plus débrancher les fils, ils sont collés par l’usure du temps. Je me contente donc d’être un spectateur assidu, ce qui permet d’avoir le plaisir sans les bleus.
Qu’est-ce qui te plaît dans le roller ?
Au-delà de la discipline qui est très spectaculaire, très technique et extrêmement difficile, j’aime surtout l’état d’esprit qui y règne. On est loin des sports-spectacles où l’argent coule à flots et où l’égo règne en maître. Ici, on a de la solidarité et de l’entraide. Les plus expérimentés ne manquent jamais de conseiller les débutants. Il n’y a pas de mépris ni de moqueries et il n’est pas rare de voir un champion multi-médaillé donner de son temps pour guider les premiers pas d’un tout petit, quand bien même il ne le connaît pas et même s’il l’a rencontré il y a cinq minutes.
Les compétitions sont bon enfant, sans aigreur ni mesquinerie. Les riders aiment les tricks pour les tricks. Tous sont capables d’applaudir et d’admirer sincèrement une figure, même si c’est celle d’un adversaire et même si elle leur coûtera leur place sur le podium. Apprécier les performances des autres, soutenir et encourager les concurrents, féliciter celui qui les a battus, s’organiser une petite session sauvage entre rivaux, c’est cela qu’on voit sur les contests.
A ce stade, ce n’est plus du fair-play, c’est de la noblesse ! Je ne connais pas d’autres sports où on trouve une telle ambiance.
Qu’est-ce qui t’a motivé à t’impliquer en tant que bénévole au sein de la commission freestyle ?
Tout ce que je viens de dire. Je pense que le roller street mérite vraiment qu’on le fasse mieux connaître. C’est un sport qui a tous les atouts pour séduire le grand public : des champions sympathiques et charismatiques, des compétitions à l’ambiance débridée, du spectacle, du spectacle, du spectacle…
Quand mon fils s’entraîne avec ses potes sur les skateparks extérieurs, il est très fréquent que des badauds ou des promeneurs s’arrêtent pour regarder. Ils ne manquent jamais d’être impressionnés, même (et surtout) par les plus jeunes. Je ne compte plus les papies et mamies qui interrompent la balade du chien pour s’ébahir devant les petits voltigeurs. Ça, c’est un signe ! Ça veut dire que ça intéresse même ceux qui n’y connaissent rien.
Et puis, Précy avait besoin d’aide (Précilia Verdier, élue à la Fédération en charge du roller street). Elle n’est guère soutenue et se battre seule peut vite créer du découragement. Avec mon amie Myriam, bénévole elle aussi, nous avons décidé de faire tout ce qu’on peut pour la seconder et alléger sa charge de travail. Il y a des chantiers immenses à lancer pour améliorer le Championnat de France, médiatiser la discipline, structurer le monde du roller, développer la pratique féminine, avec plusieurs objectifs : d’abord, faire reconnaître le roller street comme sport de haut niveau et, ensuite rêvons un peu, en faire un sport olympique.
La période est favorable ! Avec l’entrée du skateboard aux JO, partout en France, les villes construisent des skateparks. En étant pragmatiques, on peut aussi se dire que les pays qui accueilleront les Jeux auront envie d’amortir leurs investissements. A partir du moment où il y aura des parks pour la pratique du skate, il n’est pas interdit d’imaginer qu’on pourrait les exploiter pendant la quinzaine Olympique pour d’autres sports de glisse urbaine. Le skateboard et le roller, c’est la même famille et, du reste, c’est la même Fédération. Si on peut faire comprendre ça au CIO, on sera sur la bonne voie.
La Fédération Internationale travaille dans ce sens, notamment en organisant les World Roller Games. Si on peut apporter notre aide et avoir notre part, notre toute petite part, (je ne suis pas naïf, je sais bien que le CIO n’attend pas après nous), ce serait dommage de passer à côté.
Bref, ça fait beaucoup de raisons d’être motivé.
En quoi consiste ton travail au sein de la commission ?
On m’a confié la communication. C’est un terme générique qui englobe beaucoup de choses. J’écris des articles sur le site de la Fédération, pour présenter les compétitions ou les grands événements. Je mets en place le calendrier des étapes du Circuit National, en liaison avec les différents organisateurs. Je communique nos actions sur les réseaux sociaux, je fais des vidéos pour présenter le Championnat, des interviews avec les riders… Tout ce qui permet de mieux mettre en lumière la discipline.
Je déborde un peu de ma fonction quand je suis présent sur les contests pour répondre à des interrogations, pour aider les organisateurs en cas de nécessité, pour guider les gens dans le labyrinthe des règlements… J’essaye d’être un peu partout où on peut en avoir besoin.
Le plus gros chantier de ces dernières semaines, c’était la création d’un site spécifique au roller street. Quand je suis arrivé dans ce milieu, il y a quelques années, j’ai regretté le manque d’informations. Ou plutôt, le manque d’accès facile aux informations. Il fallait aller à la pêche aux renseignements ici et là, ce n’était pas pratique. L’idée du site, c’était de tout regrouper en un seul endroit et d’offrir une meilleure visibilité. Que vous cherchiez les derniers résultats, les règlements, les classements, le calendrier des compétitions, tout est là. C’est important si on veut acquérir de la crédibilité d’avoir un lieu, même virtuel, qui répond à toutes les questions.
N’hésitez pas à aller le visiter à cette adresse : crfstreet.wordpress.com.
Est-ce que cela te prend beaucoup de temps chaque semaine ?
J’ai envie de dire que ça dépend des semaines. Il y a des périodes très calmes et puis des moments de grande activité. En fait, tout dépend surtout du calendrier. Même s’il y a toujours quelque chose à faire, les époques de compétition sont plus exigeantes en termes de temps passé, avant, pendant et après. A ces moments-là, il faut se démultiplier pour essayer d’être sur tous les fronts. J’ai la chance d’être travailleur indépendant et de pouvoir organiser mon temps sans rendre compte à un patron, ça aide. Pour l’instant, c’est plus un plaisir qu’une contrainte et je ne compte pas vraiment les heures. S’il y a un besoin, il faut y répondre, c’est ma seule philosophie.
On constate une érosion du bénévolat de façon générale, avec des gens qui s’impliquent sur de moins longues durées et de façon beaucoup plus ponctuelle.
Comment expliquerais-tu cela ?
Je ne sais pas. Peut-être que l’époque est un peu plus individualiste, peut-être que les gens n’ont plus envie de faire des efforts pour les autres… Le bénévolat, c’est ingrat. On n’est pas reconnu par les instances, on est sollicité par les licenciés ou leurs parents, qui ont toujours quelque chose à réclamer ou à contester.
En plus d’avoir du temps et de l’énergie à dépenser, il faut se munir d’une épaisse carapace pour se préserver. Sans doute que peu de gens ont envie de subir tout ça pour, finalement, aucune reconnaissance.
C’est pour ça qu’il est important de comprendre que rien n’est possible sans les bénévoles. La plupart des sports fonctionnent avec leur aide et il ne faut pas hésiter à les soutenir. Si on veut plus de bénévoles, il faut leur accorder une certaine gratitude, les remercier et les encourager. Ce sont des gens qui œuvrent modestement dans le seul but d’aider une discipline à se développer et même, plus généralement, à exister.
Les riders et tous ceux impliqués dans le roller doivent s’unir, se regrouper, se battre ensemble pour le seul bien de leur sport, pour pouvoir le pratiquer encore longtemps et dans les meilleures conditions possibles.
Que dirais-tu pour motiver des personnes à apporter leur aide ?
Que c’est passionnant de fréquenter des passionnés : les riders ne pratiquent pas par loisir ou par désœuvrement. Ils ne font pas du roller comme ils feraient autre chose. Ils vivent roller, ils pensent roller, ils SONT roller !
Qu’ils entreront dans un milieu chaleureux et convivial : partout où je suis allé, que ce soit en compétition ou en entraînement, j’ai rencontré des gens heureux, épanouis, ouverts aux autres et toujours prêts à partager. On est toujours bien accueilli sur un skateparc. Quand on arrive, on admire les performances sportives et, à force de les côtoyer, on finit par les admirer eux, tout simplement, parce que, pour la plupart, ce sont de belles âmes, avec de belles personnalités et de belles valeurs.
Que c’est enrichissant à titre personnel de pouvoir apporter sa petite pierre à un édifice qui se construit depuis longtemps avant nous et qui continuera de se construire encore longtemps après nous.
Qu’on a besoin de toutes les bonnes volontés parce qu’on a des champions d’envergure internationale et qu’il faut les mettre en avant, que le roller street peut devenir un grand pourvoyeur de médailles mondiales, que ce soit dans des Championnats internationaux, des J.O…
Ces garçons et ces filles parcourent le monde pour porter leur passion sans rien gagner. On n’est pas dans des salaires de footballeurs, la vie est dure quand on est rider. Il faut avoir un travail à côté, gérer soi-même sa carrière, démarcher les sponsors… Ils méritent quand même franchement qu’on leur donne un petit coup de main, non ?
Tribune libre : si tu souhaites ajouter quelque chose…
Je ne sais pas. Vive la République, vive la France et Dieu bénisse l’Amérique ! (rires)
Plus sérieusement, je ne regrette à aucun moment d’avoir découvert le roller qu’on appelle agressif, même si je n’aime pas ce terme (il n’y a tellement rien d’agressif chez aucun d’entre eux !). Je ne regrette à aucun moment mon engagement et je suis prêt à m’engager le plus longtemps possible.
Et merci REL de donner la parole à un simple bénévole.
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