Interview freestyle : Naomi Grigg
Close Yr E's vous propose de découvrir une personnalité du roller britannique, la patineuse freestyle Naomi Grigg. Freestyleuse oui, mais aussi bien en tant que compétitrice, démonstratrice, et instructrice, (ça fait beaucoup... et ça fait aussi beaucoup de « ,ices » tout ça) voire même organisatrice (cf. SkateLondon Battle des 15-16 Août 2009)...
Par alfathor

Naomi Grigg est une freestyleuse avant tout. Mais attention, la globe-trotteuse londonienne est multi-casquettes ! Son job ? Rideuse… mais encore ? Elle a pris sa retraite en tant que compétitrice (à mon grand regret) à la fin de la saison 2008 en terminant sur une 4e place au World Ranking WSSA de décembre 2008. Heureusement, elle est toujours présente sur les événements, en tant que juge de Battle, ou MC.
Naomi est également sollicitée aux quatre coins du globe non seulement des shows de dance et de slalom, mais aussi pour organiser des workshops de freestyle.
Et puis, c’est une curieuse et une touche-à-tout : freeskate, saut, high-jump, speedskating, dance, et j’en oublie sûrement… (et là je me cantonne au roller) ‘Suffit d’un air assuré et d’un peu de conviction, et quoi qu’on fasse ça devient cool ! C’est ça le truc, et ça marche ! Naomi, elle peut tenir 3 minutes en crazy avec classe… alors imaginez quand elle complique un peu les combos comment c’est super-classe J !
Fiche technique
Nom : Naomi Grigg
Date de naissance : 21/12/1978
Nationalité et Origines : Anglaise
Job : Rideuse
Une petite définition personnelle du Freestyle ?
Le Freestyle est un embellissement du patinage… c’est ce que je dis toujours quand je donne des cours, et c’est la description parfaite de ce qu’est le Freetyle pour moi. Quand je discute avec un non-rider je dis souvent que c’est un peu comme du flat en BMX ou comme du freestyle en skate à la Rodney Mullen, mais sur des patins… ou sinon je finis par lâcher « c’est faire des trucs bizarres avec tes pieds sur des roulettes ». En général je ne mentionne pas les plots ou seulement pour justifier que « en compétition on utilise des plots pour la précision. » Pour moi, le slalom ne fait que rendre le Freestyle plus marrant et plus intéressant.
Depuis combien de temps pratiques-tu le Freestyle ?
Cela fait maintenant 15 ans que je patine, mais j’ai commencé sur la glace. Je me suis amusée sur glace pendant à peu près 2 ans avant d’avoir des rollers en ligne. Mais j’ai toujours fait du Freestyle, depuis mes tout débuts sur glace, jamais de patinage artistique. En fait je ne fais du slalom que depuis 2003, donc ça fait presque 6 ans.
Comment as-tu découvert le freestyle ? Qu’est-ce qui t’a attirée de premier abord ?
C’était à ce moment où j’ai vu quelqu’un de gracieux, au lieu d’un gars qui ressemblait à un joueur de hockey, qui alternait marche avant et arrière avec une fluidité déconcertante, en faisant des mouvements avec les pieds qui me paraissaient impossibles… j’étais comme hypnotisée.
Avec de l’entraînement j’ai découvert cette impression de flotter, pendant ces moments-là, rien d’autre au monde ne comptait, aucun de ces problèmes habituels d’adolescents. A cet âge-là j’étais du genre révoltée et frustrée, et plus je pouvais mettre de force dans un mouvement, tout en restant équilibrée et fluide, plus j’en tirais de satisfaction, et ça c’est en quelque sorte resté dans mon style.
Dans cet esprit, l’Italienne et le Pendule sont probablement les deux mouvements que je préfère : je peux hurler tout le long, y mettre tout ce que j’ai dans les tripes, et me sentir tellement bien après.
Le seul intérêt technique que j’ai jamais eu en patinant, c’était la technique pour exécuter un mouvement de manière souple et fluide etc… La première fois que j’ai vu faire un Crazy (pas en slalom) ça m’a laissée perplexe de voir qu’une telle chose était possible, et la scientifique en moi voulait absolument découvrir co
mment ça pouvait se produire , et à partir de là je me suis peu à peu auto-coachée pendant les sessions les plus calmes à la patinoire.
Influences : T’es tu entraîné seul, avec d’autres ? Quelle importance ont joué les médias dans ton apprentissage ?
Mes 6-8 premières années, je les ai passées quasiment toute seule. Après quelques temps sur glace, j’ai rencontré un ami avec qui j’allais parfois patiner pendant les vacances scolaires… mais à part ça, et particulièrement en roller, j’étais seule. A la patinoire, il y avait des gens, mais je n’allais pas vraiment discuter avec eux. Quand j’apprenais des mouvements, c’était toujours par observation et recopiage.
Quand je suis passée aux rollers, je n’ai pas eu de nouvelles figures pendant peut être 4 ou 5 ans. je me contentais de m’amuser avec ce que j’avais. Puis un jour je suis allée à Londres, j’ai beaucoup appris grâce à 2-3 freestylers fantastiques, et je me suis essayée un peu plus tard au slalom dont j’ai appris les bases à partir des vidéos pédagogiques de Sébastien (Laffargue). Sauf le ‘X’ qui m’a été montré par Close Yr E’s un jour où elle était de passage à Londres J.
Depuis, ça a été un mix d’échanges entre riders et de coups de cœurs sur des mouvements que j’ai vus sur des vidéos de compétitions. En fait sur les vidéos, c’est pas tant les mouvements à recopier qui m’intéressent, mais quand je me retrouve à me dire « Wooooow… qu’est-ce que c’était ça ?! » j’aime comprendre ce qui a pu causer un tel instant de surréalisme.
Palliers de progression : Quels ont été les moments-clé de ton évolution ?
1994 : Premier Freestyle.
2003 : Premier slalom, première compétition, que j’ai gagnée, ce qui a résulté en un sponsoring Salomon.
2004 : Ai commencé à enseigner le slalom hors Angleterre.
2006 : Ai fait une vidéo de moi en train de rouler à Singapour pour mon copain en guise de carte postale, mais les riders singapouriens l’ont adorée et ont tenu à ce que je la mette sur internet. Et d’un coup elle a été regardée partout dans le monde. Alors j’en ai fait une nouvelle, ‘LondonStyle’.
2007 : Je suis passée chez Seba quand ça m’a paru évident que le développement du Freestyle était pour eux une cause sérieuse et permanente.
Des titres qui te tiennent à cœur ?
Pas de titre aujoud’hui , on est catégorie mixte en Angleterre, donc je ne suis même plus championne : je suis actuellement 3e derrière JB Milleret (qu’on considère comme des nôtres maintenant) et Jon Bell. Les jours où j’étais championne d’Angleterre sont précieusement enfouis dans ma banque à souvenirs.
En Slalom freestyle, tu participes à la fois aux compétitions d’Individuel et de Battle : deux formats différents… Qu’est-ce que tu en retires ? Des avantages et inconvénients ?
Là tout de suite, j’aime les deux. Quant le Battle a débarqué au début, j’ai vu l’aspect ‘fun’ du truc, l’aspect freestyle pas planifié, et le côté non formel… et là j’ai pensé que c’était la meilleure chose au monde.
J’ai toujours préféré l’improvisation pendant les compétitions, et j’ai toujours détesté qu’on me dise d’utiliser toutes les lignes de plots avec les différents espacements, comme si c’était des matières scolaires différentes. J’aimais aussi le fait qu’on soit classé en fonction de l’opinion des juges, et non pas en fonction de règles sur un bout de papier , les règles ne peuvent pas vraiment définir le bon slalom freestyle, et la perception d’un bon slalom n’arrête pas d’évoluer étant donné que c’est un ‘sport’ tout neuf , les personnes les plus à même de départager sont celles qui savent de quoi elles parlent et qui sont à l’écoute des aspirations vers lesquelles tendent les slalomeurs.
Pourtant, il y a peu, je suis tombée amoureuse pour la première fois de l’individuel classique en compétition , préparer des combos , je trouve ça génial de pouvoir mettre un peu en forme son slalom sans avoir à s’occuper de ce que les autres sont en train de faire. C’est impossible de réussir une compétition de freestyle individuel WSSA si on ne montre pas une harmonie dans notre freestyle , par opposition à montrer uniquement de la technique qui n’en finit pas de se compliquer. J’aime l’idée de pouvoir chorégraphier une petite routine.
Je pense qu’on a besoin de ces deux formats de compétition , le défi technique improvisé et l’expression artistique préparée.
Freestyleuse avec ou sans plots… deux approches différentes. Que t’apporte chacune d’elles ? Quels sont les avantages et les inconvénients des plots pour toi ?
Le Freestyle sans plots ça devient ennuyeux parfois. Ca ne l’était jamais… jusqu’à ce que je découvre le slalom. Le slalom ouvre des possibilités de tricks et des challenges infinis à cause de ces plots à la con qui sont en plein milieu du passage… si bien qu’on peut s’occuper inlassablement. Et puis il y a tellement d’autres riders qui parlent ce langage (nb : slalom) , alors que pour le freestyle hors-plots il ne reste aujoud’hui qu’un seul vrai bon groupe… à NYC !
Ce que j’aime dans le freestyle sans plots c’est la libération de toute restriction, on n’est pas obligé de faire attention. On oublie le sol, on ferme les yeux, et c’est parti , faire des larges mouvements expressifs de dérapage, sans avoir à se soucier de la direction ou du contrôle. Des fois c’est bon de craquer, et de juger son patinage seulement sur des aspects comme la beauté ou la fluidité du geste etc… plutôt que sur le fait que t’aies fait tomber un plot ou pas, en fonction de quoi ton patinage est techniquement plus ou moins correct.
Tes sessions aujourd’hui ?
Je ne m’entraîne plus vraiment. A force de voyager à droite et à gauche je n’ai plus trop l’occasion ni la motivation. Mais je sais comment m’entraîner correctement, c’est juste que je ne le fais plus. Il faut absolument que j’aie mon iPod allumé quand je roule. En général j’aime bien bosser des nouveaux mouvements que je viens de récupérer, et puis m’amuser à faire des trucs un peu au hasard. Souvent je me dis que ça serait cool de me remettre sérieusement à m’entraîner , mais d’abord je dois réduire les voyages. Si je devais reprendre j’aurais une liste de choses à améliorer… je pense que je travaillerais des tricks techniques pendant une demi-heure, ensuite 3 ou 4 nouveaux mouvements de style, et après je prendrais un peu de temps pour mélanger le tout sur des enchaînements.
Quelles sont les parties de ton patinage que tu voudrais améliorer ?
J’aimerais que mon patinage soit plus propre, plus rapide, plus puissant, et plus en accord avec la musique. J’adore quand quelqu’un arrive à deviner sur quel beat je suis en train de rouler alors que j’ai le casque sur les oreilles.
J’aimerais aussi améliorer ma posture, et je dois apprendre à relâcher les bras sur les mouvements techniques. A cause de problèmes de cou, je ne peux plus trop travailler les tricks en heel wheeling, mais il y a certains mouvements en toe que j’apprécie vraiment ! Les seuls mouvements techniques que j’ai vraiment envie de faire, ce sont ceux que je peux faire avec confiance, et où je peux retrouver ce sentiment de non-prise de tête et d’expression que j’ai dans le reste de mon slalom.
La liste est longue, et il faudrait vraiment que je m’y remette sérieusement pour y arriver… mais ça serait génial.
Ton Job de Coach Freestyle
Comment tout a commencé ?
A la base, je suis devenue instructrice pour aider mes amis à faire ce que je savais faire. Et je me suis prise au jeu, les mouvements se sont compliqués, et communiquer un mouvement à une autre personne m’a fasciné de plus en plus. C’est tellement plus que juste savoir quoi faire de ses pieds : comment réaliser un mouvement avec aisance et harmonie, avec puissance, fluidité, mais surtout… avec dignité !
Pendant l’été 2004, après une année de recherche limite obsessionnelle sur de pauvres cobayes, j’ai organisé mon tout premier workshop de Freestyle à Londres, dans Hyde Park. Il y a eu beaucoup d’échos positifs sur notre forum de roller (www.serpentineroad.com), et on m’a sollicitée pour faire des workshops en Europe…et de plus en plus loin. Aujourd’hui des lieux plus conventionnels font l’affaire, et ils peuvent accueillir la venue de nouvelles communautés de slalom, ce qui maintient l’effet boule de neige à travers le monde.
Et dans l’avenir ?
J’ai organisé des workshops jusqu’à Singapour, en Thaïlande, et en Australie…mais j’ai trouvé un nouveau défi. Un weekend avec un rider de 9h-13h, si souvent que ça soit, ça ne me suffit plus. J’ai envie d’amener des changements plus significatifs et permanents dans le slalom des gens , au fil des ans, le niveau moyen de mes ‘élèves’ est monté en flèche et je me retrouve à coacher des gens qui sont bien plus avancés en technique que moi , peut-être en les aidant à acquérir plus d’énergie dans leur slalom, à savoir quoi faire de leurs bras, à créer une impression de légèreté , ce genre de choses. Ça ne m’intéresse plus de m’en tenir à balancer continuellement des nouveaux tricks aux gens.
Donc maintenant je commence à organiser des Retraites de slalom en continu du lundi au vendredi, ce qui laisse largement le temps pour ancrer des nouveaux mouvements, mais aussi pour réapprendre au corps à bouger différemment en slalomant. Pour l’instant j’ai juste fait un pilote d’essai à Londres, et j’en ai savouré chaque instant… particulièrement maintenant qu’on a le temps d’inclure des feedbacks en vidéo.
En 2009, il y aura des Retraites à Miami, Boston, et peut-être un Bis à Londres.
Tout ceci fait bien sûr partie d’une machination diabolique pour faire voyager les gens à ma place… ;)
D’autres passions ?
Je suis une invétérée du Bâton du diable ! Je défie n’importe qui à un concours de vitesse en puzzle ! Et j’ai gagné des concours de décoration avec mon pyrographe à loupe ! Mon dernier hobby c’était d’apprendre le Coréen, mais là je crois que je suis entre deux… j’ai une certaine tendance obsessionnelle quand je m’y mets. Il y a tellement d’aptitudes que j’aimerais apprendre une fois que j’aurai posé mes valises !
Le revers de la médaille : j’ai échoué deux fois à l’examen de première année en piano (oui, il faut croire que c’est possible), et je ne sais pas nager correctement.
Quelque chose à rajouter ?
Si vous en avez assez de regarder en boucle toujours les mêmes vidéos péda, et que vous avez envie de regarder des trucs avec des tricks un peu plus bizarres, vous pouvez jeter un œil à l’onglet Trick sur mon site http://www.skatefreestyle.com , surtout la section « other tricks »… il y a quelques mouvements de style qui pourraient vous intéresser.
Si vous avez envie de parler à d’autres freestylers à propos de n’importe quel aspect du freestyle, à mon avis le meilleur forum sur internet en ce moment c’est www.freestyleskaters.org (le forum freestyle des USA, mais utilisé par des riders du monde entier).
Remerciements… ?
Merci à Cheri pour avoir pris sous son aile l’unique autre rideuse esseulée et pour lui avoir appris le Barrel-roll. Et à Richard pour apprécier tellement Cheri qu’il nous a montré le Crazy.
Liens utiles
Vidéo LondonStyle (2006)
Vidéo Naomi in San Francisco (2007)
Vidéo PSWC 08
Vidéo Shanghai Slalom Open 07
Vidéo World Leisure Games (ChunCheon, KOR) ’08
Site de Naomi SkateFreestyle
Forum roller de Londres
Site roller de Londres
USA Freestyle forum
Site de la WSSA
Interview sur Rollersouk.com (Fr)
Interview sur Londonskaters.com
Interview sur Skateline.com
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