Salut tout le monde !
Le premier ultra 300 bornes de l’année est toujours dur… Celui-ci le fut tout particulièrement.
Déjà, le choix de faire 340 km, ce que je n’avais jamais fait (j’avais fait 335 km).
5 km de plus, ça n’a l’air rien, mais quand je termine, à la fin, je peux vous dire que les 5 derniers km sont vraiment durs.
Le tracé :
http://www.openrunner.com/index.php?id=3544547
340,73 km de 04h30 à 21h30, soit 17h00 pile soit 20,04 kmh.
Aller : 170,37 km de 04h30 à 12h32, soit 8h02 soit 21,20 kmh
Retour : 170,36 km de 12h32 à 21h00 soit 8h58 soit 18,99 kmh
Pour le matos : mes rollers M100, bien sûr, montés en 4x110. Pour les roues, j’avais le choix entre :
- Un jeu tout neuf de Matter Image 110 => je me dis, non, je vais me les réserver pour le pur speed.
- Un jeu de Mater Image 110 usées en 108 mm => je me dis : non, autant utiliser les Atom qui sont un peu moins usées (ce fut une erreur)
- Un jeu d’Atom Matrix 110 usées en 109 mm. => et c’est ce que je choisis. Et comme on va voir, mauvais choix.
Je n’embarque que 3 litres : avec le froid qu’il fait, il m’en restera jusqu’au robinet du Burgerhaus de Temmels (km 105).
Pour la nourriture : raisins secs, pruneaux, bananes séchées, briochettes, biscuits, quelques bouts de fromage, 4 tartines de fromage et une mini bouteille de miel dilué.
J’ai donc décollé comme prévu à 4h30 du matin, embarquant 11 kg de matériel, par 3°C, avec un vent défavorable.
Un vent discret en ville, mais qui s’exprime pleinement le long de la Moselle, véritable couloir à courant d’air.
La fraîcheur matinale a dissuadé la plupart des couche tard, bien que j’en aperçoive quelques groupes ici ou là.
Dès Argancy, j’ai droit à une aube magnifique, un dégradé de vert, de rose et de bleu. Les lapins fuient de toutes parts devant moi.
Rue du trou aux serpents, c’était un petit renard, qui a longuement couru devant moi…
Je constate déjà que ma moyenne sera faible à l’aller, ce qui ne me permettra sans doute pas de compenser la moyenne encore plus faible du retour (à cause de la fatigue).
Le froid est tenace. Je le ressens, malgré une veste de sport et un sweat-shirt enfilés par-dessus mon débardeur, plus un bonnet.
Le vent, bien que faible, ne me laisse aucun répit. La manche à air de Yutz confirme bien l’orientation du vent : NE.
À Basse-Ham, par la déviation, c’est une biche sauvage que je débusque au détour de la route.
Les grattons de la piste Koenigsmacker-Malling sont toujours aussi difficiles.
Tous les 20 km, je consulte ma montre pour voir où j’en suis de ma moyenne. Et je vois que ma moyenne est bien trop faible par rapport à mon timing.
Car pour tenir 340 km à 21 kmh, ce n’est pas 21 kmh par étape qu’il faut faire, mais au minimum 23. Or je peine à maintenir le 21 kmh.
Qu’à cela ne tienne, même si c’est dur, je m’en tiens à mon projet, coûte que coûte.
Les derniers 500 m de la piste cyclable de Berg sur Moselle, avant la jonction avec la D64, sont à moitié recouverts de terre sèche et poudreuse.
Les roues Atom Matrix commencent à montrer leur faiblesse :
Tant qu’on est sur du lisse, ça va. Je dirais même que du lisse assez rugueux, ça passe bien.
Mais dès qu’on aborde une portion de route un peu défoncée, c’est la catastrophe.
Ces roues manquent réellement de rebond, tant au niveau de la gomme que du noyau, qui est très raide.
Je sens déjà que mes talons et mes chevilles ne vont pas aimer.
Enfin la belle piste Schengen - Remich, dont les 2 premiers km sont barrés pour cause de travaux.
Heureusement, on peut passer, du moins aujourd’hui : en effet l’enrobé a été découpé par une longue ligne dans le sens de la longueur.
Je suppose que bientôt ce seront les travaux de terrassement et là on ne pourra plus passer du tout.
Après Remich, la route du Vin luxembourgeoise m’ouvre ses falaises calcaires et ses vignes en espaliers.
À Ehnen, la nouvelle piste cyclable qui est censée faire éviter le route pour les cyclistes,
se résume à 300 m de zigzags le long du parc au bord de l’eau, le tout agrémenté d’une petite passerelle au-dessus d’un ruisseau.
Pour moi, ce sera la route, merci.
Idem à l’entrée de Wormeldange : une nouvelle petite (et courte piste) le long de l’eau, qui s’achève en cul-de sac,
sans moyen pour remonter sur la route, où en plus la bande cyclable a été effacée par les services de voirie.
Très peu pour moi encore une fois : pour moi, c’est ON THE ROAD !
Je franchis donc le pont de Wormeldange et passe côté allemand (Wincheringen).
J’aperçois enfin Nittel. De l’autre côté au Luxembourg à Machtum, les travaux de voirie sont loin d’être finis.
Ensuite à Wellen, je constate que la nouvelle piste cyclable qui nous fait passer désormais sous le nouveau pont de Grevenmacher est en service.
Cela évite d’avoir à gravir puis à redescendre sur le pont, c’est pas plus mal.
Faut juste faire attention que la piste franchit la route à un endroit, et que sur 100 m, elle se trouve en zone inondable.
Voici Temmels et son Burgerhaus. Sur mes 3 litres embarqués, il m’en reste 1. J'en puise 2, fais mes mélanges.
Je peux maintenant enlever une couche : le sweat-shirt (enfilé par dessus la veste).
Je dois vite réorganiser mon sac à dos pour ranger tout ça, et c’est reparti.
J'enlèverai la veste quelques km plus loin, entre Wasserliech et Konz, pour rester en débardeur à 10h00 du matin.
Réorganisation du sac, tout cela me fait encore perdre du temps. Franchissement du pont de Konz.
Après la piste de Konz, voici Trèves et sa piste en pavés. Les roues Atom ont tendance à buter sur les aspérités plutôt que de rebondir dessus.
C’est déstabilisant, et fatigant à la longue. On est obligé de corriger avec le reste du corps.
La traversée de Trier se fait tranquillement sous le soleil, puis c’est Rüwer, sa piste cyclable défoncée, son absence de tracé cyclable en agglomération,
en enfin Kenn, où les rues sont désormais du billard.
Mentalement je continue d’évaluer ma moyenne, qui reste faible.
Et ce ne sont pas les pavés de la piste de Longuich - Riol qui vont m’aider.
Plus loin sur la piste de Mehring, cette portion qui ressemble à une véritable route, à flanc de colline boisée, avec son parapet le long de la rivière,
je croise un groupe de joggueurs, tous vêtus du même uniforme bleu (une équipe de foot peut-être ?).
Après Mehring, il me semble que toutes les souffrances de cette rando sont ici compensées par la beauté du paysage.
C’est Detzem, Thornich… la “Petite Suisse”. Thörnich, où une rue est largement investie par une fête bruyante.
Ce sont les Feuerwehr (pompiers) qui occupent tout le secteur : ils ont leurs camions bleus,
et toute une terrasse de restaurant où les chopes de bière rivalisent avec les assiettes de frites. Ça sent la saucisse grillée !
Plus loin à Köwerich, la forte odeur de créosote est toujours là, autour des piquets de bois imprégnés de goudron.
La taille moyenne des grains de raisins, sur les grappes, est de l’ordre du grain de couscous… du couscous d’un beau vert en fait.
Je dépasse Leiwen, Trittenheim puis Neumagen où c’est l’heure de manger. Les restaurants exhalent tous leurs odeurs de repas bien arrosés.
Les badauds hésitent devant les cartes des menus, ça rigole fort sur les terrasses.
Allez, les derniers kilomètres avant le demi-tour ! C’est le coin le plus mignon de tout le parcours en fait.
C’est Piesport, et Niederemmel. Niederemmel, à 12h32, enfin. Changement de bouteille. J'ai mis 8 heures. Et 2 minutes.
Je m’assois 2 minutes. D’habitude, je ne fais pas ça. Mais là, il le faut. Dans l’autre sens, maintenant, c’est vent de dos, non ? Je vais faire 16 heures ?
C’est parti dans l’autre sens ! Effectivement, un bon petit vent de dos m’aide considérablement sur quelques kilomètres.
Mais la piste est loin d’être rectiligne, elle zigzague même beaucoup, or, l’aide du vent de dos ne compense jamais les efforts faits lorsqu’il est de face.
Neumagen, retour. Je m’invite sans demander à qui que ce soit au robinet d’eau du réservoir d’eau potable, au mouillage de plaisance.
(Je dois avoir l’air tellement habitué du coin que personne ne me demande quoi que ce soit.)
J’avais bu mes 3 litres, j’en puise 3, largement de quoi tenir jusqu’à Temmels (dans 57 km).
Et c’est reparti pour la suite des évènements, en sens inverse. Le soleil tape assez fort, mais j’ai prévu une casquette et des lunettes de soleil.
Une ribambelle de motards s’exerce à rouler en file indienne, assez lentement, à la même vitesse, et dans le même sens, sur une magnifique petite route.
Très gros blousons, combinaisons, bottes. Ils ne prendront pas de coup de soleil aujourd’hui. Il est vrai qu’il y a un petit vent frais.
À Thörnich, c’est toujours la fête des pompiers. Un groupe de jeunes futures recrues (en mode “découverte” ? ) arborent un uniforme bleu.
Vers Mehring, je commence à prendre conscience que le vent n’est pas resté orienté de la même manière.
Il était Nord-Est, or maintenant il provient du secteur où se trouve le soleil, de ma gauche. Il est donc Est-Sud-Est, encore défavorable.
Ça me donne une claque. Et moi qui comptais sur un vent de dos sympa pour le retour…
À Riol se trouve un minuscule débit de boissons, une sorte de kiosque à vin ou à bière, pratiquement sur la piste cyclable.
Une fois ils avaient carrément mis des bancs en bois en travers de la piste. Cette fois ils avaient juste mis des cônes de chantier.
J’appréhende chaque zone de pavés ou gros grattons défoncés, car cela, combiné au vent et à la fatigue, c’est dur.
Trèves et ses pavés. Cela fait un petit moment qu’une certaine nausée du sucré s’est installée.
Je bois un minimum, en me forçant un peu. Dans ma tête, je n’arrête pas de calculer, et je ne peux qu’observer la chute de la moyenne.
Wasserliech au retour : il y a un match de foot sur le terrain, avec pas mal de spectateurs : ça joue fort !
Enfin la dernière étape de ravitaillement en eau : Temmels. J’ai bu 2,5 litres en 57 km seulement, depuis Neumagen.
Je puise donc 2,5 litres aussi et repars avec une charge de 3 litres.
J’en profite pour jeter à la poubelle une bouteille vide inutile, quelques sachets, etc (pour faire de la place dans mon sac).
La longue piste de Nittel me dit clairement : “T’as eu le vent de face à l’aller ? Ben tu l’auras de face aussi au retour, na !”
Pfff… elle est vache quand même.
Et revoici la route du Vin Wormeldange - Remich. Là, ya un truc qui n’est pas normal : Pourquoi y a-t-il autant de voitures,
et pourquoi roulent-elles aussi vite ? Pourquoi mordent-elles sur la bande cyclable ?
D’ailleurs, à Remich, une fois de plus, la ville est remplie de bagnoles de luxe. On s’attend à voir n’importe quoi…
Comme cette énorme Rolls-Royce garée au bout du parking, devant l’embarcadère du pont.
Il faut slalomer entre les promeneurs, éviter les portières qui s’ouvrent, les enfants qui courent…
Puis tout redevient calme, vers Schengen. Une intense fraîcheur semble couler d’une colline qui surplombe le route.
Mais je n’avais jamais connu ma petite D64F aussi fréquentée. Des automobiles comme s’il en pleuvait.
Non seulement c’est du gros gratton mais en plus je dois resserrer le patinage.
Puis c’est Contz-les Bains, Malling… Koenigsmacker… Basse-Ham…
Je calcule encore et encore. J’ai tout de même une chance de rester dans les 20 kmh sur cet ultra. Faut juste rester concentré.
Je commence aussi à ressentir du froid. Bientôt je vais devoir faire une pause pour me rhabiller…
Je sais déjà que je mettrai presque une heure de plus que prévu sur mon programme.
Or comme j’avais prévu un retour à 20h40, peu de temps avant que le soleil ne se couche… ça va faire tard…
Va falloir remettre les loupiotes, aussi…
La traversée de Thionville est très calme. Les gens sont rentrés chez eux depuis un moment.
Sur la piste d’Illange (rue de la Digue) au niveau du port, mon regard a intercepté une écriture faite à la craie blanche, sur l’enrobé :
“Coucou… “ (je n’ai pas eu le temps de distinguer à qui ce message s’adressait). Cela me fait imaginer tout et n’importe quoi…
Maintenant, c’est un calme absolu, le vent est tombé. Mais le froid devient trop intense, cela me bouffe mon énergie.
À Richemont, en haut du pont, je remets mon sweat-shirt polaire, tandis qu’en bas, des jeunes se font un joyeux barbecue.
Le soleil est proche de l’horizon sur la piste de La Maxe, tandis que c’est le moment pour les insectes volants de faire leurs parades.
Malgré la lumière déclinante, je remets mes lunettes de soleil pour me protéger les yeux. (je les enlève vers l’usine EDF).
Au pont Éblé, je remets mon bonnet, ma lampe frontale et ma lampe rouge que je tiens derrière moi.
Je calcule mentalement que je peux arriver à la maison pour 21h30, ce qui serait amusant,
puisque ça ferait un run de 17h00 pile poil. Mais ça ne se fera pas sans effort !
Je traverse un Metz des plus calmes où les quelques passants, en T-shirt ou en chemise, me regardent passer comme un OVNI.
L’approche de la maison me donne du courage et je peux encore envoyer quelques pointes de vitesse vers Marly.
J'atteins mon portail à 21h30, exactement, et c’est donc un ultra de 17 heures exactement, incroyable.
Marrant comment, pour de simples jeux de calculs mentaux, le corps est capable de fournir de l’énergie… pour quoi ? Pour le fun…
Alors que tout en moi est cassé, brisé, haché menu. Mais je suis, une fois de plus, très heureux.
Quelques bons jours de repos maintenant !
Voici mon tableau de moyennes à jour. (avec les dernières corrections des moyennes étapes par étape)
Total de litres bus = 10 litres dosés à 4 doses de poudre isotonique par litre (Isostar "Hydrate & Perform")
